Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 2 février dernier, lorsque nous avons examiné ce projet de loi en première lecture, je m’étonnais déjà de la méthode employée par le Gouvernement pour faire adopter ce texte d’affichage, juste avant les élections municipales.
J’avais alors dénoncé le recours à une proposition de loi, interdisant de fait la réalisation d’une étude d’impact. Pourtant, ce texte est vraiment susceptible d’affecter l’attractivité de nos entreprises.
J’insistais également sur l’absence de concertation des partenaires sociaux, en contradiction avec l’article 1er du code du travail.
Or les faits viennent aujourd'hui confirmer l’inutilité de la procédure accélérée, puisque nous aboutissons tout de même à deux lectures dans chaque chambre.
J’avais également relevé l’incohérence qu’il y avait à faire examiner ce texte au fond par la commission des affaires sociales, alors que c’est la commission des affaires économiques qui en avait été saisie à l’Assemblée nationale, ce qui semble aller de soi pour une proposition de loi traitant beaucoup des parts des sociétés et d’OPA.
Cette nouvelle lecture vient confirmer notre impression de désorganisation au niveau de la procédure. Le texte, après son rejet en commission mixte paritaire, a été examiné en seconde lecture par les députés lundi dernier. Quant à la commission des affaires sociales du Sénat, elle a rejeté le rapport de Mme Emery-Dumas, que je salue avec amitié pour le travail qu’elle a effectué dans des conditions tout de même un peu difficiles, sur un texte très compliqué.
Depuis mardi, comme vous le savez, monsieur le ministre, nous avons eu des sujets beaucoup plus importants à traiter tant en commission qu’en séance plénière.
Vous imaginez donc bien que, dans ce contexte, mercredi, lorsque Mme la rapporteur a présenté son rapport, nous n’étions guère au fait – il en était en tout cas ainsi au groupe UMP – de ce qui avait été décidé à l’Assemblée nationale. Nous avons découvert que les députés avaient rejeté un certain nombre des dispositions, qui, sans nous convaincre totalement, constituaient tout de même des mesures de bon sens adoptées par le Sénat.
Je n’évoque par les incertitudes liées à l’horaire d’examen de la proposition de loi, puisque nous ne savions pas si nous en discuterions hier dans la journée, dans la nuit ou au petit matin, ce qui révèle selon moi le peu d’intérêt que le Gouvernement attache à ce texte. En effet, la plupart du temps, on connaît approximativement l’heure de passage en séance d’un texte. Qu’aurions-nous entendu sur vos travées, chers collègues siégeant à gauche de cet hémicycle, si la majorité précédente avait agi avec une telle désinvolture ?
Sur le fond, j’ai décidé que je ferai gagner du temps à tout le monde en évitant de répéter ce que j’ai déjà dit en première lecture. Et je vous ferai grâce, monsieur Desessard, des intitulés que nous aurions préféré voir retenus pour donner un titre à cette proposition de loi ! Car l’expression « économie réelle » ne parle guère aux Français.
Je relèverai seulement que l’Assemblée nationale a rejeté plusieurs assouplissements importants apportés par le Sénat.
Ainsi, concernant l’obligation de recherche d’un repreneur, ce sont désormais tous les établissements qui sont concernés, alors que notre texte et la proposition de loi initiale visaient uniquement les établissements employant habituellement au moins cinquante salariés. Les députés ont donc stigmatisé les entreprises dans leur ensemble, sans prendre en considération leurs difficultés.
Je noterai encore que Mme la rapporteur avait fixé au 1er juillet l’application de l’article 1er, mais que les députés ont avancé cette date au 1er avril, ce qui correspond quasiment à la date d’entrée en vigueur du texte !
Enfin, le texte issu de l’Assemblée nationale n’est nullement revenu sur les risques d’inconstitutionnalité, s’agissant notamment de l’atteinte à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété.
Ce sera maintenant à une autre instance d’en juger ! Mais cette dernière comme le Gouvernement en ont maintenant l’habitude !
En conclusion, aucune surprise : notre groupe votera, comme en première lecture, contre ce texte, qui pointe la responsabilité des entrepreneurs dans tout projet de fermeture, alors même que des dispositifs visant à empêcher les abus existent déjà.