: elle peut présenter des avantages.
Nous avons la responsabilité de légiférer dans tous les domaines où elle est utilisée et de trouver le juste équilibre en chaque matière.
C’est ce que nous ont précisément invités à faire les arrêts rendus le 22 octobre 2013 par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Dans ces arrêts, la haute juridiction judiciaire se prononce sur la question de la légalité de la géolocalisation et sur celle du contrôle judiciaire du recours à cette technologie en matière pénale. Considérant que notre législation est trop imprécise, elle nous invite à nous prononcer sur la question, afin de trouver un juste équilibre entre les nécessités de l’enquête et la protection de la vie privée.
Les membres de mon groupe et moi-même considérons que ce juste équilibre avait été trouvé avec le texte adopté par le Sénat le 20 janvier dernier.
Alors que le texte initial donnait aux forces de l’ordre la possibilité d’utiliser la géolocalisation pour des infractions punies d’au moins trois ans d’emprisonnement, la commission des lois du Sénat avait porté ce seuil à cinq ans, conformément à la jurisprudence de la CEDH, qui considère que cette technique doit être réservée aux faits d’une particulière gravité.
La commission mixte paritaire n’est pas revenue sur la position adoptée en séance publique par le Sénat, laquelle restait satisfaisante dans la mesure où le seuil de cinq ans était conservé et abaissé à trois ans pour les délits prévus au livre II du code pénal, ainsi que le rapporteur vient de l’indiquer.
Concernant le contrôle judiciaire du recours à cette technologie, la CMP a retenu la position adoptée par l’Assemblée nationale, qui nous semble moins protectrice que celle qu’avait votée le Sénat. En effet, en cas de flagrance, le procureur de la République donnera une instruction valable quinze jours consécutifs, et non huit jours, solution qu’avait retenue le Sénat.
Quoi qu’en dise Jean-Jacques Hyest, la position du Sénat était conforme à l’avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés : cette dernière avait rappelé que l’utilisation de dispositifs de géolocalisation doit être encadrée avec précaution, car « particulièrement sensible au regard des libertés individuelles, dans la mesure où ils permettent de suivre de manière permanente et en temps réel des personnes, aussi bien dans l’espace public que dans des lieux privés ».
La CNIL a notamment attiré l’attention sur le fait que, « dans le cadre des procédures de flagrance, la durée de l’autorisation du procureur de la République devrait être de huit jours, reconductible éventuellement une fois, conformément à l’article 53 du code de procédure pénale ».
Surtout, elle a considéré que « des mesures spécifiques [devaient] être prévues par la loi pour protéger certaines professions exposées par leur activité ou par le secret des sources ». On pense principalement aux magistrats, aux journalistes ou encore aux avocats.
Certes, un compromis a été trouvé avec nos collègues députés. Cependant, la procédure accélérée a été engagée sur ce texte, ne nous permettant pas d’aller au bout des débats. Au demeurant, je regrette que le Gouvernement ait recouru si souvent à cette procédure ces derniers temps. Je ne nie pas l’urgence qu’il y avait à légiférer pour éviter de nuire aux enquêtes en cours. Cela dit, le recours à la procédure accélérée nous empêche d’envisager toutes les hypothèses. Sur des sujets attentatoires aux libertés individuelles, il me semble qu’une deuxième lecture aurait été très utile.
C’est d’autant plus vrai que la CNIL, saisie le 5 décembre 2013 par le Gouvernement, n’a rendu public son avis qu’après le passage du texte au Sénat. Je rappelle quand même que l’avis de cette instance ne peut être rendu public que sur demande du président de l’une des commissions permanentes des deux assemblées. En l’occurrence, cette demande a été formulée le 7 février dernier par le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, expliquant pourquoi l’avis de la CNIL n’a été publié qu’à cette date.
Il serait peut-être utile et sage de systématiser la publication des avis rendus par la CNIL. En tout cas, c’est une demande que je formule !
Malgré toutes ces remarques, madame la ministre, nous voterons en faveur de ce texte. §