Intervention de Christian Cointat

Réunion du 26 février 2014 à 14h30
Débat sur la situation des outre-mer

Photo de Christian CointatChristian Cointat :

Donnons-lui sa chance et sortons enfin, monsieur le ministre, de ce qui demeure, qu’on le veuille ou non, une forme d’assistanat, pour entrer dans une ère de véritable développement partagé pour un bénéfice commun.

Ce rêve qui hante mes pensées peut devenir réalité si la volonté est au rendez-vous. Comme le disait Churchill, « toute volonté trouve son chemin. » Il suffit que les autorités de notre pays se convainquent que tout doit être fait pour que l’outre-mer ne soit plus à la remorque et devienne lui aussi, là où c’est possible, le « train avant » directeur de la France. Cela suppose, d’abord, d’en avoir la conviction et, ensuite, de se donner les moyens de changer la configuration de l’attelage.

Certes, les difficultés budgétaires ne nous aident pas et rendent les contraintes encore plus délicates. Mais l’enjeu est de taille et l’avenir n’attend pas. Il est indispensable que l’outre-mer puisse véritablement prendre son envol économique, social et stratégique vers les horizons prometteurs que nous souhaitons tous atteindre.

Commençons, au moins dans une première phase, par transformer ce rêve en une vision collective de la France de demain, dans laquelle l’outre-mer serait en pointe, en son nom, dans toutes les zones de renouveau du monde. Cette vision, il me semble l’avoir retrouvée dans les propos de notre collègue Paul Vergès.

Prenons, par exemple, le cas de la Nouvelle-Calédonie. Si, comme je le souhaite de tout cœur, elle choisit, le moment venu, de rester française, ne serait-il pas plus efficace, compte tenu de sa position privilégiée dans le Pacifique et de tous les atouts dont elle dispose, que ce soit elle qui, avec la Polynésie, porte les intérêts de la France dans cette région du monde et parle en son nom ? §

À propos de la Calédonie, permettez-moi d’ouvrir une parenthèse. Les Calédoniens sont en effervescence. Je reçois des pétitions, des protestations, des appels à soutien sur deux sujets.

L’un, qui a été évoqué par Pierre Frogier, est relatif aux listes électorales pour les élections provinciales, dont les indépendantistes demandent le retrait de près de 7 000 inscrits. Or ces listes sont déjà gelées, ce qui est, vous en conviendrez, assez spécial en démocratie. Il est donc souhaitable de ne pas aller au-delà du raisonnable…

L’autre sujet concerne le traitement qui serait réservé au Haut-Commissaire, pourtant un grand commis de l’État et un serviteur loyal de la France. Je le connais, et je peux garantir ses qualités.

Pouvez-vous nous rassurer, monsieur le ministre ? Car nous sommes inquiets. Les réseaux sociaux bourdonnent ; ce n’est pas bon signe. Pouvez-vous nous dire clairement, en vous appuyant sur des actes concrets, que le Gouvernement n’est pas en train d’abandonner la France en Nouvelle-Calédonie ? Nous avons besoin d’en être certains.

Je referme la parenthèse néocalédonienne pour évoquer la Guyane. Tout le monde sait que le Brésil est promis à un bel avenir. Nous avons tout intérêt à privilégier le rôle de la Guyane dans nos relations avec ce grand pays.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, on peut multiplier les exemples de ce que peut nous apporter l’outre-mer. Mais, avant l’action politique, il faut bien entendu, comme l’ont dit de nombreux orateurs avant moi, régler les retards économiques et sociaux.

Si l’explosion que j’appelle de mes vœux pour propulser les ultramarins vers des lendemains heureux n’est pas immédiatement au rendez-vous, en raison de la crise financière, vous pouvez, monsieur le ministre, par cette vision partagée du futur et des lignes directrices claires, ne pas briser le rêve, et nous laisser l’espérance.

Si, déjà, le ministère des outre-mer pouvait rassembler et maîtriser la totalité de l’effort budgétaire de l’État pour tout le domaine dont il a la charge, cela donnerait un sens et une force concrète à la vision que j’évoquais précédemment. Elle pourrait prendre réellement corps.

Vous pouvez d’autant mieux y arriver, monsieur le ministre, qu’une politique bien comprise à l’égard de l’outre-mer ne peut être ni de gauche, ni du centre, ni de droite : elle doit être celle de la France en tant que telle, de la France tout entière. Nous avons des devoirs à l’égard de nos compatriotes ultramarins, mais ils nourrissent aussi des attentes au sein de notre grande communauté française.

Il nous revient de faire en sorte qu’ils occupent au cœur de la nation la place – et toute la place – qui leur revient naturellement. Alors, à leur tour, ils pourront le moment venu nous faire bénéficier de leur proximité des centres névralgiques du futur, comme de leur expérience du terrain au sein des différents continents, au contact des réalités d’un monde en mouvement et qui n’attend pas.

Oui, l’avenir de l’outre-mer, c’est notre avenir à tous. Comme disait Henri Bergson, « l’avenir n’est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons faire. » Alors, faites-le, monsieur le ministre ! Courage ! Franchissons enfin le boulevard périphérique qui nous étrangle dans Paris, et faisons vivre pleinement tous ces beaux coins de France, si loin soient-ils ! §

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