Madame Férat, vous avez souhaité avoir un débat sur l’épargne populaire, sujet tout à fait essentiel à propos duquel vos différentes interventions, mesdames, messieurs les sénateurs, ont soulevé un grand nombre de points qui en confirment la richesse.
Je souhaite dire quelques mots d’introduction avant de répondre à vos interventions et de contribuer ainsi au débat.
Je résumerai mon propos liminaire de la manière suivante : la France a la chance d’être un pays où l’épargne des ménages est l’une des plus abondantes de la zone euro. Celle-ci est une ressource précieuse pour financer notre économie, et le Gouvernement a déployé de nombreux efforts pour mettre l’épargne des Français au service du financement de notre économie et de nos entreprises, en particulier des PME, auxquelles je suis particulièrement attentive. Le Gouvernement mène cette action en ayant par ailleurs le souci de la bonne protection des épargnants, car l’épargne se nourrit de la confiance.
Premier point : l’épargne des Français est abondante.
En 2013, nos concitoyens ont épargné près de 65 milliards d’euros, soit 15, 6 % de leur revenu. Leur patrimoine global s’élève en tout à près de 12 000 milliards d’euros. Si l’essentiel de ce patrimoine est un patrimoine immobilier, plus d’un tiers correspond à un patrimoine financier, qui représente près de 4 200 milliards d’euros, soit 2, 1 fois la richesse nationale. Pour les ménages, à l’échelon individuel, épargne immobilière et épargne financière servent à assurer un complément de retraite, à détenir une épargne de précaution ou à transmettre un capital à leurs héritiers.
Cette épargne est détenue auprès des établissements bancaires sous forme de livrets et de dépôts, des organismes d’assurance sous forme d’assurance vie, de fonds de placement à travers les OPCVM ou encore en détention directe avec l’acquisition de titres de créance et de valeurs mobilières. Cette épargne est donc mise directement ou indirectement au service du financement de l’économie. C’est même la première source de financement de notre économie.
Deuxième point : tout le Gouvernement est mobilisé pour trouver les moyens permettant de mettre davantage cette épargne au service du financement de la croissance.
Le financement de la croissance, c’est en particulier le financement des entreprises pour leur permettre de se développer, d’investir et d’innover. Cela s’inscrit dans le pacte de responsabilité proposé par le Président de la République le 14 janvier dernier, afin d’accélérer le cercle vertueux de l’innovation, de l’investissement, de la compétitivité et de l’emploi.
Aujourd’hui, près de 26 % du patrimoine financier des Français est investi in fine en actions. Pour mobiliser encore mieux l’épargne des ménages français qui ont les ressources suffisantes pour participer davantage à ces défis, des réformes majeures ont déjà été entreprises. Je ne citerai qu’un exemple, rappelé par nombre d’entre vous, celui du lancement du PEA-PME, qui intervient parallèlement à la redynamisation de l’accès des ETI aux financements de marché. Ce nouveau produit devrait permettre de drainer davantage d’épargne vers le segment des PME cotées et inciter de ce fait un nombre plus important d’entreprises en développement à rechercher auprès des marchés les ressources nécessaires à leur croissance. Le relèvement du plafond du PEA participe d’un objectif plus large de redynamisation de l’épargne en actions.
L’épargne la plus populaire, notamment le livret A, contribue également à cet objectif à travers l’intervention du fonds d’épargne, qui centralise une partie des dépôts des livrets A et des livrets de développement durable, non seulement pour le financement du logement et des investissements des collectivités locales, mais aussi pour le refinancement de la Banque publique d’investissement, BPI France. Le Gouvernement et la majorité ont ainsi souhaité donner un nouvel élan à l’épargne populaire. C’est dans cet esprit que le plafond du livret A a été relevé de 50 % et celui du livret de développement durable doublé. C’est aussi la raison pour laquelle la condition d’accès au livret d’épargne populaire a été simplifiée et améliorée, avec le passage d’un plafond d’impôt à un plafond en revenu fiscal de référence.
Troisième point : l’action du Gouvernement vise à renforcer la protection de l’épargne et à l’accompagner dans ses mutations.
Parce que les Français épargnent pour préparer leur avenir ou celui de leurs enfants, ils recherchent une certaine sécurité financière, pour assurer leur retraite ou faire face à des pertes de revenus imprévues. Il est donc essentiel de leur assurer un cadre protecteur. Le Gouvernement y est d’autant plus attentif que l’épargne ne peut se transformer en un financement durable de notre économie que si elle possède une certaine stabilité, qui ne peut s’acquérir qu’au prix de la confiance. Ainsi, nous suivons le développement de nouveaux modes d'épargne et de financement en nous efforçant systématiquement de tirer tous les enseignements de la crise.
Cela se traduit par exemple, du côté des ménages, par la volonté de faciliter l'investissement direct des particuliers dans des projets innovants. Ainsi, il sera très prochainement mis en place un cadre propice aux nouveaux modes de financement, en particulier les financements participatifs comme le crowdfunding. Celui-ci consiste à permettre, grâce aux possibilités qu’offre désormais internet, le financement d'entreprises, notamment de très jeunes entreprises en phase de création ou de développement, par un grand nombre de petits épargnants apportant à une plate-forme une multitude de petits financements. Une réforme de ce cadre devrait aboutir dans l'année afin de permettre son développement. Je suis particulièrement vigilante à ce que ce nouveau cadre offre une protection suffisante à l’épargnant.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, l'épargne populaire est un sujet éminemment concret. Notre capacité à transformer cette épargne, faite d’une multitude de petits montants, en des financements utiles à notre économie est essentielle et constitue l'une des priorités de l'action du Gouvernement.
Je souhaite maintenant répondre aux différents orateurs.
Madame Férat, vous avez souhaité focaliser votre intervention sur l'épargne réglementée, en particulier sur le livret A.
Vous avez mentionné la réforme de 2008, qui a conduit à la généralisation de la distribution du livret A, ce qui a entraîné un regain de la diffusion de ce produit et de la collecte de fonds, dont une large part est centralisée dans le fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations. Comme vous le signalez, cette réforme a contribué à écarter le risque d'un manque de fonds pour le financement du logement social. Je vous remercie d'avoir rappelé que le Gouvernement, en relevant les plafonds du livret A et du livret de développement durable, y avait lui aussi fortement contribué.
Vous souhaitez que le livret A et le livret de développement durable retrouvent toute leur visibilité. Sur ce point, je ne partage pas nécessairement votre analyse. Il est indéniable, selon moi, que le livret A et le livret de développement durable sont aujourd'hui des produits très largement connus et diffusés. Les inégalités entre les montants des encours, que vous pointez à juste titre, …