Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 20 février 2014 : 1ère réunion
Stéréotypes dans les manuels scolaires — Table ronde

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin, présidente :

Je suis heureuse d'ouvrir ce matin cette table ronde consacrée aux stéréotypes dans les manuels scolaires. Permettez-moi tout d'abord de saluer la qualité des intervenants qui ont positivement répondu à notre invitation : Mme Françoise Vouillot, membre de la commission stéréotypes, rapporteure du groupe « éducation » du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE f/h) ; M. Pascal Tisserant, enseignant chercheur, coordinateur de l'étude rendue à la Haute autorité de lutte contre la discrimination et pour l'égalité (HALDE) en 2009 ; Mme Christine Guillemaut, coordinatrice du Laboratoire des stéréotypes au Laboratoire de l'égalité ; Mme Emmanuelle Latour, adjointe à la cheffe du Service des droits des femmes et de l'égalité entre les hommes et les femmes, en charge des ABCD de l'égalité au Ministère des droits des femmes ; Mme Johanna Barasz, conseillère technique en charge des ABCD de l'égalité au Ministère de l'éducation nationale et Mme Amandine Berton-Schmitt, chargée de mission éducation au Centre Hubertine Auclert, que nous avons entendue le 30 janvier 2014 pour un premier échange sur ce sujet sur lequel elle a une expertise particulière.

Comme vous le savez, à la suite des travaux rendus en juin 2013 et consacrés aux femmes et à la culture, notre délégation a décidé d'approfondir sa réflexion sur les stéréotypes sexués à partir des représentations des femmes et des hommes dans les manuels scolaires, notre collègue Roland Courteau en sera le rapporteur.

L'enjeu de cette nouvelle étude, sur laquelle les rapports et les textes abondent, nous semble essentiel.

Comme le rappelait Sylvie Cromer devant notre délégation le 30 janvier 2014, le manuel scolaire fait partie des biens communs d'une société, en ce sens que, au-delà de sa fonction d'organiser des connaissances à un moment donné, le manuel est aussi un lieu symbolique de construction et d'expression des valeurs d'une société.

Pour notre délégation, il est primordial que le manuel scolaire soit un vecteur de promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes :

- tout d'abord parce que nos représentations se construisent dès l'enfance : au travers de la vision du mode et de la société qu'ils véhiculent, les manuels peuvent contribuer à transmettre la culture de l'égalité ;

- ensuite, parce que le manuel scolaire est un outil de transmission entre l'école et les parents d'élèves, parfois même le seul. En cela il constitue un puissant levier de changement social et d'évolution des mentalités des enseignants et des élèves, mais aussi des familles ! Or, le constat est unanime et partagé : les manuels scolaires sont loin de remplir cette fonction.

Les récents travaux du Centre Hubertine Auclert, qui publie une étude par an sur les représentations sexuées dans les manuels scolaires depuis 2011 - et dont je salue la représentante, présente parmi nous ce matin - ont abouti aux mêmes conclusions que l'importante étude remise en 2009 à la HALDE, coordonnée à l'époque par M. Tisserant, également parmi nous aujourd'hui, ce dont je le remercie.

Ces travaux révèlent une sous-représentation très importante des femmes, qui résulte à la fois d'un déséquilibre numérique et de procédés d'invisibilisation et de la persistance de stéréotypes sexués. Ainsi, l'étude quantitative et qualitative des manuels d'histoire de 2de générale et de CAP par le Centre Hubertine Auclert est édifiante : les femmes y sont quasiment absentes des notices biographiques, dont seulement 3,2 % leur sont consacrés, et elles ne représentent que 4,2 % des auteurs des documents proposés à l'étude dans ces manuels...

Le récent rapport sur la lutte contre les stéréotypes filles-garçons, remis à la ministre des droits des femmes en janvier 2014 par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, est également très sévère. En effet, on peut y lire que, « malgré une évolution qui, ces dernières années, va dans le sens de l'égalité et qui a été rendue possible par plusieurs travaux de recherche et par la mobilisation de certains acteurs associatifs et politiques, les livres, les manuels mais aussi les programmes scolaires restent fortement prisonniers des stéréotypes de genre ».

Nous attendons donc beaucoup de nos travaux et de votre précieuse collaboration. Je laisse la parole à mon collègue et rapporteur, M. Roland Courteau, pour animer notre discussion.

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