Intervention de Christian Noyer

Commission d'enquête sur le rôle des banques et acteurs financiers dans l'évasion des ressources financières en ses conséquences fiscales et sur les équilibres économiques ainsi que sur l'efficacité du dispositif législatif, juridique et administratif destiné à la combattre — Réunion du 9 juillet 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Christian Noyer gouverneur de la banque de france

Christian Noyer :

L'une des difficultés réside dans la comptabilisation précise des implantations offshore. Nous couvrons des pays importants économiquement pour l'UE et ses exportateurs, tels que la Suisse, le Luxembourg ou l'Autriche. Je ne peux donc pas fournir une réponse uniforme à vos questions.

La Suisse est ainsi un des plus grands pays d'exportation pour les industriels français. Il est donc normal que les banques accompagnent les entreprises françaises en Suisse. Il est vrai que ce pays peut servir de refuge fiscal à de grandes fortunes mais, dans ce cas, les résidents français ne font pas appel à des banques de leur propre pays. Par conséquent, la gestion de fortune concerne plutôt des clientèles d'autres régions du monde, agissant d'ailleurs dans la plus grande légalité pour des raisons de diversification de patrimoine.

La Suisse est d'ailleurs un des pays les plus exigeants en matière de réglementation prudentielle et de contrôle prudentiel. Nous accordons beaucoup d'importance, conformément aux textes dont nous veillons à l'application, à l'existence d'un système centralisé visant à l'application des réglementations et du contrôle des risques dans les banques françaises.

En revanche, nous accordons assez peu d'importance aux pays des Antilles, sauf sur des créneaux spécifiques comme le financement des navires ou des avions.

J'ai le sentiment que le rôle de ces zones dans le déclenchement de la crise financière est faible. La crise financière est née de l'accumulation de leviers d'endettement trop importants des particuliers, des entreprises, des systèmes bancaires.

Sur une construction déjà fragile, la diffusion de produits innovants complexes a commencé aux Etats-Unis dans des secteurs peu réglementés. Ces produits étaient construits de manière tellement opaque que la répartition du risque attendue a, en fait, abouti à une suspicion généralisée sur la valeur des actifs et donc au déclenchement d'une crise de liquidités, puis au blocage des marchés monétaires et des refinancements entre banques.

Cette crise a donc surgi dans un pays particulièrement développé. Des poches non réglementées ou mal surveillées ont permis l'accumulation des instruments déclencheurs de la crise.

J'en tire la conclusion que nous avons besoin de progresser, tous ensemble au niveau international, pour éviter que des pans entiers de l'activité financière échappent à des règles, aussi communes que possible, et à une surveillance, aussi harmonisée que possible. Bien entendu, nous nous exposons aussi au risque en provenance de zones non réglementées et, pour cette raison, particulièrement attractives d'un point de vue fiscal. Il est donc légitime que les Etats s'unissent pour éradiquer ces zones de sous-réglementation et de sous-fiscalité, même s'il est difficile d'affirmer qu'elles ont joué un rôle essentiel dans le déclenchement de la crise.

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