Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 17 avril 2014 à 15h00
Égalité réelle entre les femmes et les hommes — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au terme de la première lecture à l’Assembléenationale, le 28 janvier dernier, du projet de loique nous examinons aujourd’hui, certainesdispositions du texte modifié par les députéstranscrivaient des recommandations formulées, notamment, par notre délégation, et je ne pouvaisque m’en réjouir.

Je considérais, alors, que l’examen par l’Assemblée nationale avait permis de faire avancer la place des femmes, en particulier dans le secteur culturel et, également, au regard de l’objectif de représentativité équilibrée dans les conseils d’administration des établissements publics. Ces dispositions, sur lesquelles je vais revenir dans quelques instants, traduisaient des recommandations formulées par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de notre assemblée et prolongeaient donc le travail engagé par notre délégation.

Le texte résultant des travaux de la commission des lois du Sénat connaît des évolutions notables.

Certaines de ces évolutions sont confortées, et je m’en félicite. En revanche, d’autres ont été supprimées. Aussi, je souhaite revenir sur ces suppressions et poursuivre le dialogue constructif et harmonieux qui a présidé à nos débats depuis le début de l’examen de ce projet de loi.

Je regrette, en premier lieu, que les articles 16 bis, 18 B et 22 quinquies, qui régissent le secteur culturel, aient été supprimés.

Vous le savez, notre délégation a consacré, l’année dernière, une importante part de ses travaux à la place des femmes dans le secteur de la culture.

Les procédés d’invisibilisation des femmes à l’œuvre dans ce secteur hautement symbolique appellent des réponses fermes et des actes concrets.

En prévoyant, à l’article 22 quinquies, la création d’un observatoire de l’égalité entre les hommes et les femmes dans la culture et la communication, placé auprès du ministre chargé de la culture, les députés consacraient dans la loi l’existence de l’état des lieux sur la place des femmes établi annuellement par ce ministère.

Nous le savons bien, ce genre d’initiatives dépend largement de la volonté politique. Nous avons la chance, aujourd’hui, de collaborer avec une ministre particulièrement sensibilisée à la question de la place des femmes à la tête des institutions culturelles. Mais demain ?

La logique de cooptation et le fonctionnement en réseau du secteur culturel constituent véritablement un handicap pour les femmes. Il me semble, tout en entendant l’argumentaire développé par la commission des lois, que la reconnaissance légale du devoir de vigilance sur la question est un minimum que nous pouvons attendre des gouvernements actuel et futurs. Je demanderai donc, par voie d’amendement, le rétablissement de cet observatoire.

Dans le même secteur, l’obligation de dispenser un enseignement sur l’égalité, la lutte contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes et les violences dans les écoles de journalisme et les écoles d’architecture faisait également partie des recommandations de notre délégation.

Les articles 16 bis et 18 B introduits par les députés transcrivaient cette demande dans la loi. La commission des lois les a supprimés.

Pour notre délégation, la sensibilisation des étudiants et étudiantes qui vont construire nos représentations de demain est primordiale.

Je ne pense pas qu’introduire une sensibilisation à la lutte contre les stéréotypes sexués dans les programmes aille à l’encontre de la liberté pédagogique que nous reconnaissons aux établissements qui les forment. Néanmoins, j’entends l’argument selon lequel ces modules de formation devraient être introduits dans toutes les écoles de formation artistique, sans distinction. Cette question s’inscrit donc dans le cadre de nos travaux de suivi des recommandations formulées dans notre rapport de délégation sur les femmes et la culture.

J’entends aussi l’argument de l’autonomie de ces écoles. Cependant, celle-ci ne doit pas les dispenser d’œuvrer, comme établissements de formation, au respect de principes constitutionnels, notamment celui de l’égalité, qui régissent notre République.

Le second volet, qui a été substantiellement révisé par la commission des lois, concerne l’extension des objectifs de représentation équilibrée, en particulier dans les instances dirigeantes des établissements publics.

Lors de l’examen par le Sénat du texte qui est devenu la loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, notre délégation avait appelé à l’exemplarité des établissements publics. Elle avait suggéré que l’objectif soit d’atteindre la parité dans ces derniers.

En introduisant, aux articles 19 ter et 20, une obligation de parité pour les personnalités qualifiées dans les conseils d’administration des établissements et entreprises publics, les députés allaient dans ce sens. L’article 22 ter A étendait ce même objectif aux établissements publics de coopération culturelle, les EPCC.

La délégation a toujours considéré que l’État devait être exemplaire et montrer la voie. La délégation voyait ainsi l’aboutissement d’un travail qui lui tenait particulièrement à cœur.

En supprimant ces dispositions au nom de la rigidité ou de la contrainte qu’elles engendraient pour les entreprises publiques, la commission des lois remet en cause l’argumentation sur laquelle est construite l’obligation légale de représentativité équilibrée des membres des instances dirigeantes des entreprises, et envoie un signe négatif au secteur privé en matière d’exemplarité du secteur public. Je défendrai donc, par voie d’amendement, le rétablissement de ces dispositions.

Parmi les avancées introduites par l’Assemblée nationale et maintenues par la commission des lois, je voudrais, à titre personnel, saluer la suppression à l’article 5 quinquies C de la condition de « situation de détresse » posée par le code de la santé publique pour recourir à l’IVG. Il était temps, me semble-t-il, que la loi reconnaisse aux femmes la libre appréciation de la nécessité dans laquelle elles se trouvent de mettre fin à une grossesse.

Je voudrais aussi commenter deux mesures très importantes du projet de loi concernant les mariages forcés, qui constituent une forme particulière de violence à laquelle la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est particulièrement sensibilisée.

Il faut rappeler que cette pratique d’un autre âge, qui n’est autre qu’un viol qui dure toute une vie, ...

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