Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 17 avril 2014 à 15h00
Égalité réelle entre les femmes et les hommes — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation  :

... concerne environ 70 000 jeunes femmes en France.

La plupart de ces jeunes filles sont mariées contre leur gré pendant les vacances dans leur pays d’origine, avec la complicité de leur famille. Nos postes diplomatiques et consulaires sont sensibilisés à ce phénomène.

À cet égard, il est heureux que le Sénat ait pris l’initiative de permettre le rapatriement en France, par les autorités consulaires, de femmes étrangères victimes d’un mariage forcé et retenues contre leur gré à l’étranger pendant une période de plus de trois ans, au terme de laquelle leur carte de résident est devenue périmée.

Je me réjouis que les députés aient adopté conforme cet article 15 sexies adopté par le Sénat en première lecture.

Je trouve également opportun le nouvel article 15 septies introduit par l’Assemblée nationale, laquelle a souhaité renforcer l’exigence de consentement des époux, quelle que soit leur loi personnelle. La modification du code civil adoptée par les députés permet de contester un mariage conclu, par exemple, dans un pays où un simple consentement formel au mariage suffit, si la preuve est apportée que le libre consentement des deux époux n’est pas vérifié.

J’en viens aux dispositions supprimées par l’Assemblée nationale et dont la commission des lois a maintenu la suppression.

En première lecture, le Sénat avait introduit un article 15 quater prévoyant qu’un rapport annuel fasse le bilan de l’application de la loi en matière de traitement des violences envers les femmes et qu’un observatoire de ces violences soit créé dans chaque département.

Cet article a été supprimé par l’Assemblée nationale au motif que ce dispositif serait redondant avec la Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains, la MIPROF.

Or, en matière de violences, nous le savons bien, si les faits sont invisibles, cela contribue à maintenir les auteurs dans un sentiment d’impunité. Mesurer régulièrement, au niveau local, l’évolution des faits de violences dénoncés par les victimes et analyser les modalités de leur traitement fait partie, de mon point de vue, du dispositif de prévention et de lutte contre les violences. C’est aussi donner le signe de la mobilisation locale.

Par conséquent, la suppression de cet article par l’Assemblée nationale me semble regrettable. J’en demanderai le rétablissement par voie d’amendement.

Le sort réservé aux dispositions en faveur des femmes étrangères victimes de violences mérite que nous nous y attardions.

En première lecture, l’Assemblée nationale a supprimé le III de l’article 14, qui étendait à Mayotte le dispositif d’exonération de taxes pour la délivrance et le renouvellement des titres de séjour.

Quant à l’article 14 bis, il permettait la délivrance d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », autorisant l’exercice d’une activité professionnelle à l’étranger déposant plainte pour proxénétisme ou traite, ou témoignant dans une procédure concernant ces délits.

Sa suppression a été maintenue par la commission des lois, et je le regrette. Je suggère que la commission spéciale saisie de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel se penche sur ce sujet, crucial pour assurer le parcours de sortie de personnes prostituées.

Enfin, sans revenir sur le fond de l’argumentaire que j’ai déjà largement développé, je reste convaincue du bien-fondé de l’exclusion du recours à la médiation pénale en cas de violences conjugales.

Cette disposition, introduite en première lecture sur l’initiative de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, a été supprimée à l’Assemblée nationale. Conformément à la position que j’ai défendue en première lecture, j’en demanderai le rétablissement par voie d’amendement.

Telles sont les remarques que je souhaitais faire en tant que présidente de la délégation aux droits de femmes. Je ne doute pas que nos échanges permettront d’améliorer encore ce beau texte. §

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