Intervention de Jean-Pierre Cantegrit

Réunion du 7 décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — Action extérieure de l'état

Photo de Jean-Pierre CantegritJean-Pierre Cantegrit :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'aurais aimé vous entretenir des nombreux sujets qu'un sénateur représentant les Français de l'étranger peut aborder. J'imagine toutefois que certains de mes collègues le feront avec autant de talent que moi-même. Aussi aborderai-je les crédits d'assistance de votre ministère, monsieur le ministre.

Depuis 1977, ces crédits permettent d'aider nos compatriotes expatriés démunis, handicapés ou âgés et, ce qui est plus récent, les enfants français en détresse.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances dans le cadre de la mission « Action extérieure de l'État », rattachés au programme 151 « Français à l'étranger et étrangers en France » et dévolus à la sous-action 13 « Pôle Social », sont d'un montant de 16, 89 millions d'euros pour 2007. Ils sont répartis entre l'aide aux personnes, pour 16, 09 millions d'euros, et les subventions aux sociétés de bienfaisance, pour 800 000 euros.

Si l'on compare ces crédits à ceux qui avaient été alloués en 2006, soit 16, 81 millions d'euros, on ne peut que regretter la stagnation constatée alors que, dans le même temps, les crédits d'ensemble de votre département augmentent de 3, 8 % et que ceux de la mission dont fait partie l'action sociale progressent de 2, 4 %. Si on leur avait appliqué ce coefficient, ils seraient de 17, 22 millions d'euros. Ce serait encore bien loin de nous permettre d'engager toutes les actions que nous pourrions entreprendre pour les Français démunis, monsieur le ministre.

Du fait de cette stagnation, si l'on veut continuer à aider les quelque 5 150 allocataires, sans oublier les enfants français en détresse dont le nombre ne cesse d'augmenter, les services de la direction des Français à l'étranger vont devoir continuer à gérer l'attribution des allocations de solidarité ou des allocations aux handicapés, ainsi que les diverses aides qui sont accordées, avec la minutie et la rigueur dont ils font preuve depuis plusieurs années. Je tiens ici à rendre hommage à M. Barry Delongchamps et à ses collaborateurs, dont la gestion est exemplaire.

La commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger du ministère des affaires étrangères, où je représente le Sénat et à qui il revient en principe de décider du montant de ces diverses allocations, ne peut plus désormais qu'entériner les propositions qui lui sont soumises. Augmenter l'un des montants proposés reviendrait en effet à en diminuer un autre de la même somme et l'arbitrage nous est extrêmement difficile.

Cette gestion restrictive, mais nécessaire, de la direction des Français à l'étranger est due à la pérennisation d'une situation dont je crains qu'elle ne se maintienne. On ne peut que le déplorer, car cela empêche toute progression, toute action novatrice à l'égard des Français de l'étranger, pour lesquels on remarque une paupérisation croissante.

Or, tant que les crédits du « Pôle social » de votre ministère ne connaîtront pas de hausse significative, on ne pourra engager aucune action qui permettrait à nos compatriotes expatriés de sentir que la solidarité nationale s'exprime aussi à leur égard.

Quelles améliorations pourrait-on apporter, me direz-vous, monsieur le ministre, puisque de nombreuses aides sont déjà accordées à nos compatriotes en difficulté à l'étranger.

Eh bien ! il s'agit d'abord d'aider l'enfance en détresse, élément nouveau auquel nous devons faire face. Je connais votre grand coeur, monsieur le ministre, et je ne doute pas que ce sujet vous interpelle.

Je prendrai un autre exemple : la caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger, la CFE, que je préside. La suspension du paiement de la rétroactivité de cotisation correspondant à deux ans de cotisation pour les allocataires du ministère des affaires étrangères a été demandée. La CFE ne serait pas opposée à une telle mesure, mais c'est une caisse d'assurance volontaire. Elle gère des fonds dont elle est responsable. Elle considère donc que c'est à l'État, c'est-à-dire au ministère des affaires étrangères, sur ses crédits sociaux, de faire en sorte que cette rétroactivité ne s'applique pas.

En ce qui concerne les personnes âgées résidant à l'étranger qui ne peuvent revenir en France, il serait équitable de leur permettre d'avoir accès, dans leur pays de résidence, à des maisons de retraite françaises, comme il en existe déjà au Brésil, au Maroc ou en Tunisie.

De telles maisons pourraient être multipliées pour nos compatriotes âgés qui terminent leur vie dans leur pays de résidence et n'ont pas les moyens de rentrer en France. Pourquoi d'ailleurs le feraient-ils ? Comment seraient-ils accueillis ?

Au moyen des crédits du « Pôle social », le ministère des affaires étrangères pourrait participer à la création de tels établissements, aux côtés d'associations locales ou de sociétés de bienfaisance. Sans vouloir récréer à l'étranger ce qui existe en France pour les plus démunis, ce qui est évidemment impossible, nous pourrions nous engager dans une voie similaire et adaptée aux contingences locales.

Enfin, je ne vous l'apprendrai pas, monsieur le ministre, puisque vous avez été ministre de la santé, il existe en France un système d'accès aux soins particulier aux plus démunis. Pour veiller à la santé des Français de l'étranger, dont les plus démunis sont, comme en France, ceux qui sont le plus touchés par la maladie, nous pourrions mettre en oeuvre des campagnes d'information et de prévention relatives au Sida, aux maladies endémiques, mais aussi à la vaccination. Ces campagnes seraient spécifiquement destinées à nos compatriotes et ciblées sur les risques médicaux liés à leur pays de résidence.

Nos consulats, qui oeuvrent déjà dans ce sens, n'ont que des moyens limités, de même que les associations ou les sociétés de bienfaisance : leur action est forcément restreinte. Si l'on veut mener de véritables campagnes préventives, et toucher ainsi tous les Français, il faut plus de moyens.

Parallèlement, il serait souhaitable de multiplier les dispensaires, où nos compatriotes les plus démunis pourraient se faire vacciner et recevoir des soins d'urgence dans de bonnes conditions. Bien entendu, il faut agir avec précaution et discernement, afin de ne pas heurter les autorités locales et de ne pas contrevenir à la législation locale.

Mais, sans argent, comment pouvons-nous faire ? Si nous voulons que les Français de l'étranger connaissent l'équivalent de ce qui se fait en métropole, ce qui est bien entendu l'objectif d'un représentant des Français de l'étranger, et ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, il est indispensable que les crédits d'assistance s'accroissent de façon substantielle, monsieur le ministre. Sinon, nous finirons par régresser, et les Français expatriés exclus du système continueront à être de plus en plus nombreux, ce qui serait inacceptable.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, tout en soutenant votre action, que j'apprécie, j'aurais souhaité que ce budget soit augmenté de façon plus significative.

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