Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 7 décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — Action extérieure de l'état

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Néanmoins, il semble que les ors du Palais d'Orsay nous laissent croire qu'il en est ainsi, puisque le poids de l'histoire nous entraîne à conserver le deuxième réseau diplomatique après celui des États-Unis, mais avec un budget des affaires étrangères de 4, 5 milliards d'euros, alors que ce pays dispose de 25 milliards.

Cela nous conduit à un saupoudrage qui émousse considérablement notre action et va à l'encontre de l'efficacité et de la culture du résultat, alors que celle-ci s'impose à tous les ministères.

Elle a pour objectif la meilleure utilisation possible de chaque euro et doit exprimer aussi une stratégie. L'histoire a façonné notre diplomatie et l'implantation de nos ambassades, mais, aujourd'hui, notre appartenance à l'Union européenne et les techniques de télécommunications nous imposent de transformer considérablement notre carte diplomatique. Le fait de posséder le deuxième réseau diplomatique constitue-t-il une garantie d'efficacité ? Non !

Je crains que la hiérarchie des postes diplomatiques ne soit obsolète, car trop peu différente de celle de l'époque de la création des Nations unies. De plus, le budget des affaires étrangères soutient-il une stratégie ? Avant de défendre l'idée d'un réseau diplomatique qui devrait être beaucoup plus adapté au service d'une stratégie, je voudrais souligner le caractère exemplaire des réformes conduites par votre ministère, monsieur le ministre.

J'évoquerai tout d'abord les effectifs.

Alors qu'ils sont en baisse depuis douze ans, pour 2007, une nouvelle réduction de 257 équivalents temps plein travaillés, ou ETPT, est prévue. Les effectifs de ce ministère étant très modestes au regard de l'ensemble des effectifs de l'État - de l'ordre de 0, 5 % - il n'est plus justifié de poursuivre cette baisse, car cela risquerait de mettre en danger le bon déroulement des missions régaliennes dont ce ministère a la charge. En quinze ans, les effectifs du ministère ont déjà été réduits de 11 %.

Des progrès sont également à relever en matière de réalité budgétaire. Avec la LOLF, sont reconnus comme faisant partie du ministère les recrutés locaux. Leur rémunération ne fait donc plus partie des dépenses de fonctionnement, mais constitue une partie de la masse salariale du ministère, ce qui a plus de sens.

Par ailleurs, la signature, le 18 avril dernier, d'un contrat triennal de modernisation liant le ministère des affaires étrangères et le ministère du budget représente une première, ce dont je vous félicite, monsieur le ministre.

Les principales évolutions inscrites dans ce projet de budget sont la conséquence des engagements pris dans le cadre de ce contrat : la rétrocession de 100 % des produits des ventes immobilières à l'étranger, afin d'atteindre un autofinancement de politique immobilière du ministère en trois ans ; un taux de retour au budget du ministère de 50 % de la recette issue des frais de visas, qui représentera un financement complémentaire pour la modernisation du réseau consulaire ; enfin, l'introduction de la biométrie dans les visas.

Toutefois, quelle stratégie a-t-elle été décidée ?

La nécessité de conduire une réflexion structurée sur notre diplomatie vient seulement d'être relancée. Le comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger ne s'était pas réuni depuis huit ans. Il l'a enfin été sous l'égide du Premier ministre le 25 juillet dernier. Monsieur le ministre, huit ans de réflexion ne sont pas un gage de réactivité.

De plus, aucune ligne budgétaire n'est inscrite pour l'intelligence économique, qui demeure un programme de défense. Cela n'est-il pas aberrant, alors que celle-ci devrait constituer un élément essentiel de notre stratégie économique ?

La création prochaine d'un conseil des affaires étrangères a été annoncée le 17 octobre dernier ; il s'agit là d'une bonne décision.

Les plus grandes diplomaties mondiales se transforment ; ainsi, soulignons la réorganisation du Foreign Office, le redéploiement annoncé du réseau nord-américain au service d'une diplomatie « transformationnelle ».

Pour bien poser la problématique, je reprendrai l'intitulé du séminaire de Royaumont : « L'outil diplomatique face aux défis de l'européanisation et de la mondialisation » ; ce sont là deux défis qu'il faut absolument relever.

En dix ans, le nombre d'implantations dépendant du ministère des affaires étrangères situées en et hors de France est passé de 461 à 418. Cette reconcentration va dans le bon sens, même si elle est encore insuffisante pour donner plus d'efficacité à notre diplomatie par un laser beaming destiné à muscler notre stratégie.

La réorganisation du réseau consulaire, notamment en Europe, se poursuit, mais beaucoup trop lentement.

Ainsi, pourquoi conserver en Espagne, en plus de l'ambassade et du consulat général de Madrid, trois consulats généraux à Bilbao, Séville et Barcelone, ainsi que deux antennes consulaires à Alicante et Malaga ? Je m'étonne également de la conversion d'un certain nombre de consulats dans l'Union européenne en « consulats d'influence », exerçant à la fois une mission d'influence et une fonction culturelle. Pourquoi conserver un consulat d'influence à Anvers, c'est-à-dire à cinquante kilomètres de Bruxelles ? J'arrête là l'énumération !

Ayons à l'esprit - ce n'est pas une boutade - que certains petits consulats consomment près de la moitié de leur budget pour fêter le 14 juillet ! Les maintenons-nous pour comptabiliser le camembert, le champagne, l'armagnac consommés comme des exportations ?

Plus solennellement, sommes-nous trop peu européens pour penser que nos ressortissants ne sont pas partout chez eux dans l'Union européenne ? Pourquoi maintenons-nous des dizaines de fonctionnaires dans les capitales européennes, alors que les villes chinoises allant jusqu'à 10 millions d'habitants en sont dépourvues ?

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