Vouloir sans cesse élargir le cadre d'intervention de l'OTAN, comme le souhaitent nos amis américains, c'est d'abord s'éloigner des principes qui la fondent, mais c'est aussi et surtout affaiblir la défense de l'Europe.
S'agissant du Darfour et de ce qui est en train de devenir une crise régionale symptomatique, cette guerre menée à « huis clos » a déjà provoqué la mort de 200 000 personnes, en moins de quatre ans. Ne nous y trompons pas, chaque jour, le nombre de victimes et de « déplacés » ne cesse de croître.
Malgré les grands discours, les déclarations, les engagements, et même la présence des 7 000 Casques blancs de l'Union Africaine, ce drame semble ne pas prendre fin. Bien plus, les récentes actions de groupes rebelles montrent que le conflit déborde sur le Tchad et en Centrafrique. En un mot, cette crise se régionalise.
Combien de morts, combien de massacres, combien de réfugiés supplémentaires faudra-t-il avant qu'une action efficace soit conduite ? Combien de temps faudra-t-il encore attendre avant de faire appliquer la résolution 1706 de l'ONU votée voilà plus de trois mois ? Quel autre drame faudra-t-il pour enfin imposer les décisions de la communauté internationale et envoyer sur place les 17 000 Casques bleus et les 3 000 policiers prévus ?
Monsieur le ministre, vous savez comme moi que nos accords de défense mobilisent nos soldats dans la région pour faire face aux groupes rebelles, dont tout porte à croire qu'ils sont armés par Khartoum.
Aussi, devant la montée des périls, je souhaite connaître la prochaine étape de notre action dans la région. Au Tchad, ne pensez-vous pas que notre aide politique et militaire devrait être conditionnée à la tenue d'un véritable dialogue politique, pour offrir une issue autre que militaire ?
S'agissant de la Somalie, les tribunaux islamiques contrôlent désormais Mogadiscio et la majeure partie du territoire somalien. Il n'est nullement besoin de souligner les nouveaux risques de violation des droits de l'homme dans cet « Afghanistan potentiel », où opéreraient désormais des agents d'Al-Qaida. Au-delà, la victoire des tribunaux islamiques s'accompagne de vives tensions avec l'Éthiopie et l'Érythrée : l'Éthiopie a massé des troupes à ses frontières.
Dans une résolution adoptée hier à l'unanimité, le Conseil de sécurité a approuvé le déploiement d'une force régionale, qui vise à protéger les membres et les infrastructures du gouvernement provisoire face à l'avancée de l'Union des tribunaux islamiques.
Le risque d'un embrasement imminent de la région est donc bien réel. Croyez-vous, monsieur le ministre, que cette résolution sera réellement appliquée, et surtout suffisante, pour stabiliser la région, contrer l'action des tribunaux islamiques et faire enfin respecter l'embargo sur les armes ?
Plus globalement, je m'interroge sur une certaine vacuité de notre politique africaine. Quelles sont ses lignes de force ? Où est la cohérence dans toutes ces actions réalisées au coup par coup ? Face au risque sérieux de voir une crise régionale profonde s'installer, il me semble urgent de répondre à cette question.
Telles sont les remarques que je souhaitais formuler sur ces sujets majeurs qui occupent notre diplomatie.
Monsieur le ministre, s'agissant du budget que vous nous présentez, je constate, à l'instar de nombreux orateurs, y compris de votre propre majorité, que les crédits ont bien diminué depuis quatre ans.
Dans le domaine de l'action extérieure, le « moins-d'État » est-il synonyme du « mieux-agir » ? Je ne le crois pas ! La réduction des crédits et des personnels se poursuivra-t-elle jusqu'à rendre notre outil diplomatique complètement inefficace ?
Aujourd'hui, sur ces travées, nous nous accordons tous à dire que l'action extérieure de l'État est une nécessité impérieuse à l'heure de la globalisation. Or le budget qui nous est proposé n'est pas, de mon point de vue, à la hauteur de ces enjeux. C'est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe socialiste ne le votera pas.