Toutefois, le taux de pauvreté des plus de 60 ans est aujourd’hui stabilisé à 10 %, soit un niveau inférieur à celui de l’ensemble de la population, qui s’élève à 13 %, et en net recul par rapport au taux de 30 % des années soixante-dix.
Depuis vingt ans, notre système de retraite a fait l’objet de nombreux rapports et de plusieurs réformes : celle qui a été menée par M. Balladur en 1993, celle des régimes complémentaires AGIRC et ARRCO en 1994 et 1996, la création du Fonds de réserve pour les retraites, en 1998, et du Conseil d’orientation des retraites, en 2000, la réforme Fillon, en 2003, enfin la réforme des régimes spéciaux, en 2007 et 2008.
Malgré ces mesures, le déséquilibre financier de notre système s’est accentué. Il est très largement lié à l’évolution démographique : le rapport entre cotisants et retraités est passé de 4 en 1960 à 1, 43 aujourd’hui pour le seul régime général, sachant que l’espérance de vie, il faut le reconnaître, a augmenté de six ans depuis les années quatre-vingt, en raison des progrès en matière de santé et de modes de vie.
Il faut cependant garder à l’esprit que, comme le niveau moyen des retraites, l’espérance de vie varie beaucoup dans notre pays en fonction de la situation des uns et des autres, en particulier selon que l’on est cadre ou ouvrier.
La crise financière puis économique de 2008, qui s’est prolongée par une crise sociale et qui se poursuit encore aujourd'hui, a bien entendu eu également des conséquences négatives sur l’équilibre des retraites : la masse salariale a perdu 5, 6 points entre 2008 et 2009 et la reprise de la croissance, d’ailleurs incertaine, ne comblera pas cette perte de recettes.
Dans notre rapport, nous analysons également les différents leviers paramétriques pouvant être utilisés afin de revenir à l’équilibre comptable et financier, dont les trois principaux – ceux que l’on évoque le plus souvent – sont l’âge, la durée de cotisation et l’assiette des cotisations.
J’aborderai premièrement l’âge.
Faut-il reculer l’âge légal aujourd'hui fixé à 60 ans ? Ne serait-ce pas pénaliser plus longtemps ceux qui, avant 60 ans, ne sont plus en activité, non pas parce qu’ils ont souhaité cesser le travail mais parce que leurs employeurs n’ont plus voulu d’eux, ce qui est bien souvent le cas ?
L’augmentation du taux d’emploi des plus de 50 ans conditionne la viabilité de toute politique en matière de retraites. A contrario, repousser l’âge légal de départ à la retraite ferait-il reculer mécaniquement l’âge moyen de cessation d’activité des seniors ? Personnellement, j’en doute !
En tout état de cause, quelle que soit la décision prise, le dispositif de cessation anticipée d’activité pour carrière longue doit être maintenu, afin de ne pas pénaliser ceux qui ont commencé à travailler tôt.
J’évoquerai, deuxièmement, la durée de cotisation. Son allongement a été acté par la réforme Fillon de 2003, avec le principe de progressivité et aussi, il faut le reconnaître, une lisibilité plutôt rare dans notre système. Une accélération de cette progressivité rendrait l’avenir de leur retraite illisible et sans doute très anxiogène pour les Français, particulièrement les plus jeunes.
Enfin, troisièmement, je dirai un mot de l’assiette des cotisations.
Les cotisations reposent aujourd’hui essentiellement sur les salaires. Les augmenter serait donc toucher au pouvoir d’achat de nos concitoyens. Une telle évolution ne pourrait être que modérée et étalée dans le temps.
En fait, c’est surtout l’élargissement de l’assiette qu’il convient d’envisager. Dans cette perspective, monsieur le ministre, nous demandons qu’un bilan précis, en termes d’emplois, des exonérations des cotisations sociales nous soit transmis.
Si elles doivent être maintenues, ces exonérations pourraient être annualisées – c’est manifestement le choix retenu dans votre projet de loi –, tandis que les exonérations sur les heures supplémentaires seraient réexaminées au vu tant de leur coût que de leurs conséquences sur l’emploi.
D’autres ressources pourraient être mobilisées : les prélèvements sociaux sur les revenus du capital, une taxation supplémentaire des stock-options, et une contribution additionnelle à l’impôt sur le revenu visant les plus hauts contribuables. En outre, même si cette proposition ne figure pas dans le rapport, le bouclier fiscal pourrait être supprimé, à mon avis.
La MECSS a également étudié les autres leviers financiers du système de retraite. Elle souhaite en particulier, j’y insiste, que le Fonds de réserve pour les retraites soit sanctuarisé, car elle considère que son utilisation prématurée serait le symbole éclatant du report du problème sur les générations futures.
Le FRR dispose aujourd’hui d’environ 33 milliards d’euros, qui ont été placés en tenant compte d’un objectif précis, à savoir entamer les décaissements à partir de 2020. Or cette somme est à peine supérieure au montant du déficit total du régime général et du FSV attendu pour la seule année 2010 ! Le Fonds de réserve pour les retraites ne peut donc en aucun cas être une solution pour résorber les déficits actuels. Le ponctionner aujourd’hui serait, en quelque sorte, prélever de l’argent sur le compte en banque de nos enfants pour renflouer notre propre déficit.