Aux termes de ce projet, le Gouvernement nous demande de procéder par voie d'ordonnances. Les versions adoptées par nos deux assemblées comportent des différences très importantes, en particulier sur un point majeur. Votre rapporteur et moi-même nous sommes rencontrés pour voir s'il était possible d'aboutir à un compromis sur l'article 3. Après avoir échangé nos arguments, nous avons dû constater des divergences d'appréciation qui empêchent tout accord global sur le texte. Si nous nous accordons sur une nécessaire réforme du droit des obligations et des contrats ainsi que sur l'urgence, nous nous opposons sur la méthode employée : le Gouvernement veut procéder par voie d'ordonnance alors que le Sénat souhaite mener un véritable travail législatif. Vous avez adopté une position de principe : vous entendez que la réforme passe par une loi. Après réflexion, l'Assemblée nationale s'en est remise au principe de réalité ; nous voici au milieu d'un quinquennat, avec une très lourde charge de travail : le temps nous manque pour examiner un tel texte. Dès lors que nous ne disposons pas de plusieurs semaines pour étudier quelque trois cents articles, les examiner au pas de charge n'aurait pas de sens. Depuis des décennies, la réforme du droit des contrats n'a jamais abouti. L'examen de ce texte ne se justifierait que si nous pouvions y consacrer plusieurs semaines.
Cette réforme a été longuement mûrie : des universitaires, des professeurs de droit tels que Pierre Catala et François Terré y ont travaillé, tout comme la chancellerie et de nombreux parlementaires. Voulons-nous que ce texte rejoigne le grand cimetière des réformes non menées alors que nous le savons urgent et indispensable, notamment pour les particuliers et les entreprises ? Depuis 1804, le droit des obligations et des contrats n'a, pour l'essentiel, pas été réformé : la jurisprudence adapte le code civil aux mutations de notre société, de sorte que le droit des contrats se trouve dans le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation : est-ce acceptable ? Cela met en cause la lisibilité de notre droit ainsi que la sécurité juridique. Des pans entiers du droit des contrats, ainsi la période précontractuelle, ne sont pas traités par le code civil.
Pour toutes ces raisons, l'Assemblée nationale a accepté de rétablir l'article 3 et souhaite le maintenir. Du fait de l'incompatibilité de nos positions respectives, je suggère que notre commission mixte paritaire constate son échec.