Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 21 mai 2014 à 14h30
Débat sur le climat et l'énergie en europe

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

La communauté de communes de Badonviller, en zone rurale, a voulu requalifier une friche industrielle en centrale photovoltaïque. Le projet était créateur d’emplois, mais il n’a pu voir le jour, en raison des dispositifs de la Commission de régulation de l’énergie, qui avait privilégié le sud de la France.

J’ai vu que, dans votre région, madame la ministre, les choses bougeaient. Que proposerez-vous pour soutenir les projets locaux, et notamment pour permettre aux territoires ruraux, ces beaux territoires de France, de s’inscrire dans la dynamique de la transition énergétique ?

Que dire de la méthanisation ? Aujourd'hui encore, on rencontre trop souvent dans nos territoires des obstacles liés à l’injection du biogaz dans les réseaux. J’ai en tête l’exemple d’un beau projet dans l’agglomération de Nancy, avec une grande entreprise, qui rencontre aujourd'hui bien des difficultés.

Il n’est, me semble-t-il, pas acceptable que les actions entreprises par les gouvernements de gauche fassent si souvent rimer l’écologie avec des contraintes ou des taxes supplémentaires. Je prendrai deux exemples.

Le premier, c’est la labellisation « reconnu garant de l’environnement », ou RGE, qui conditionne les aides liées au crédit d’impôts ou les certificats d’économie n’énergie. Cela va fortement contraindre les artisans, qui ne disposent pas toujours des informations nécessaires.

Le second, c’est l’écotaxe. Le Gouvernement semble y avoir perdu son latin, alors que les transporteurs ont fait connaître un dispositif susceptible de donner satisfaction à tout le monde : Écomax.

Donnons-nous véritablement les moyens d’une vraie politique de maîtrise énergétique. Arrêtons la cosmétique et positivons les enjeux de la transition énergétique !

Je m’en tiendrai à deux propositions.

La première porte sur les certificats d’économie d’énergie, les CEE.

Je ne reviendrai pas sur les conséquences regrettables des atermoiements de vos prédécesseurs, qui nous ont menés à une période de transition pénalisant en fait tout le monde.

J’insisterai en revanche sur les lourdeurs et blocages administratifs, qui sont inadmissibles. Pour le Grand Nancy, seule collectivité à s’être engagée dans une démarche de mutualisation des certificats d’économie d’énergie avec l’ensemble des habitants, des associations, des entreprises et des bailleurs sociaux, les blocages avec le pôle national ne sont plus acceptables. Sachez que les dossiers de la fin de l’année 2012 viennent enfin – c’était il y a quelques jours, mais j’espère qu’il n’y a pas, avec ce débat, de lien de cause à effet – d’être soldés. Quinze mois de délai, ce n’est pas acceptable ! C’est de l’argent qui dort alors que notre pays a besoin de toutes les liquidités et une économie dynamique ! Surtout dans un contexte où les dotations aux collectivités locales s’effondrent et où nos concitoyens ploient sous le fardeau de l’impôt.

Madame la ministre, je vous propose d’imaginer une forme de validation automatique. Les CEE pourraient ainsi, un peu à l’instar des permis de construire, être validés automatiquement dans un délai de trois mois en l’absence de réponse.

Pour introduire ma deuxième proposition, je souhaite rappeler que la politique énergie-climat ne peut pas faire l’impasse sur la qualité de l’air. Ce précieux indicateur est aussi un repère pour nos politiques publiques nationales, européennes et internationales. Nous connaissons le diagnostic de l’Organisation mondiale de la santé : près de 7 millions de personnes seraient décédées prématurément en 2012 du fait de l’exposition excessive à la pollution de l’air. Ces chiffres confirment que la pollution de l’air est désormais le principal risque environnemental pour la santé dans le monde.

Dans l’évaluation des politiques publiques, imposons le thermomètre « air ». Nous avons aujourd'hui, en France, les moyens d’évaluer avec les associations de surveillance de la qualité de l’air. Tout est prêt ; n’attendons pas.

J’en arrive à ma conclusion.

L’enjeu de la prochaine consultation démocratique européenne, dans quelques jours, aurait dû être de convaincre nos concitoyens de la nécessité de refonder ensemble, par-delà les différences locales et nationales, les bases d’une économie européenne, comme en 1951, lors de la signature du traité instituant la CECA, sur cette grande révolution énergétique : tirer les justes bénéfices d’une volonté collective de lutter contre le changement climatique, objectif que l’Europe aura – faut-il le rappeler ? – été la première à ériger en priorité.

La construction d’une politique européenne de l’énergie est non plus une option, mais un devoir. L’enjeu n’est ni plus ni moins que la reprise en main par l’Union européenne de son destin énergétique et, in fine, économique et stratégique. Madame la ministre, la France se doit d’être à la hauteur de ce formidable défi. §

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