Intervention de Robert Badinter

Commission spéciale sur la lutte contre le système prostitutionnel — Réunion du 14 mai 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Robert Badinter ancien garde des sceaux

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Je suis à votre disposition. C'est la moindre des choses, à tous égards.

S'agissant des conditions du vote de la loi, la pratique parlementaire montre que tous les bancs ne sont pas nécessairement remplis au moment du vote d'une loi. Je crois qu'en l'espèce, ils ne l'étaient pas spécialement. J'ajoute que ceci a été débattu en un temps limité. Ce n'est pas la seule loi acquise dans ces conditions - on en connaît de plus importantes.

Je souhaite que, dans cette maison, où les travaux sont particulièrement sérieux, vous examiniez tous les aspects de la loi. J'insiste notamment sur le fait d'écouter celles et ceux qu'elle concerne. Peut-être l'avez-vous déjà fait : c'est à la fois déchirant et éloquent. Il ne faut jamais perdre de vue que c'est à eux que s'adresse d'abord cette loi, y compris en matière sanitaire, qui n'est pas le plus mince des problèmes que j'ai évoqués.

En ce qui concerne la question de la personne vulnérable, nous sommes d'accord : je trouve tout à fait légitime qu'on les assimile aux mineurs.

Pour ce qui est du caractère migratoire, j'ai rappelé au début que la prostitution d'aujourd'hui est déambulatoire, ce qui entraîne une présence importante sur le sol français d'étrangères ou d'étrangers se livrant à la prostitution. Par rapport au pourcentage de nationaux, cela a beaucoup changé depuis vingt ou trente ans, surtout durant les dix dernières années.

Il faut que vous fassiez venir le directeur des libertés publiques, ou le ministre de l'intérieur, à propos de la question de la réinsertion des personnes prostituées qui veulent quitter la prostitution, sujet qui m'a énormément préoccupé. Des régularisations sont en effet prévues.

Dans le moment où nous sommes, avec ce qui se passe en Ukraine, la mafia fait venir des prostituées pour trois mois en leur promettant une carte de résidence et une carte de travail. C'est une ignominie de plus, car ils utiliseront les dispositions d'une loi qui est foncièrement généreuse à leurs fins. Ce sera un appel d'air. Dans ces pays, partir, avoir le droit de séjour et une carte de travail est un rêve ! On voit ce qui se passe au Sud, à Lampedusa. Voyez comment les gens peuvent risquer leur vie ! C'est une question très importante, car le résultat, pour celles qui auront été attirées de la sorte, sera navrant !

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