Je présenterai tout d'abord les principes de ce nouveau dispositif. Le Cice a été créé par la loi de finances rectificative pour 2012. Ce dispositif est entré en vigueur le 1er janvier 2013 et s'adresse aux entreprises employant des salariés et imposables à l'IS ou à l'IR. Il se calcule à partir de l'ensemble de la masse salariale des salariés dont les rémunérations brutes n'excèdent pas 2,5 fois le montant annuel du Smic et s'élève à 4 % de la masse de ces salaires inférieurs à 2,5 Smic pour ce qui concerne les rémunérations versées en 2013, puis à 6 % à partir de 2014. Les entreprises imputent le crédit d'impôt au titre des salaires versés une année donnée sur le solde d'impôt qu'elles déclarent l'année suivante. Par ailleurs, un dispositif de préfinancement permet de bénéficier d'un effet « de trésorerie » dès l'année de versement des salaires.
En outre, et c'est là une innovation prévue par cette loi de finances rectificative pour 2012, la loi de finances instaure un comité de suivi ad hoc. Placée auprès du Commissariat général à la stratégie et à la prospective, cette instance, composée pour moitié des partenaires sociaux et pour moitié de représentants des administrations compétentes, est en effet chargée de veiller au suivi de la mise en oeuvre et à l'évaluation du Cice. Il établit un rapport public exposant l'état des évaluations réalisées.
Son premier rapport, rendu public en octobre 2013, a présenté une série de questions suscitées par la mise en oeuvre du Cice, à savoir les entreprises bénéficiaires, ses effets sur leur comportement, ainsi que son impact au niveau macro-économique. Ce rapport distingue également le suivi, de l'évaluation micro-économique et de l'analyse macro-économique du Cice et en présente les premiers éléments de suivi.
Comment s'articule le Cice avec les allégements de cotisations sociales ? Le Cice emprunte aux allégements tout en étant un crédit d'impôt. Les deux instruments poursuivent des objectifs distincts. Les allègements agissent sur le coût du travail des bas salaires. Le Cice a pour objet l'amélioration de la compétitivité des entreprises à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement. Son assiette est la masse salariale brute et il concerne les salaires plafonnés à 2,5 fois le Smic, sans présenter de dégressivité avec, potentiellement, un effet de seuil. Son effet sur la trésorerie est différé de 1 à 4 ans. Il vise le soutien de l'emploi peu ou moyennement qualifié et représente pour les finances publiques un coût de vingt milliards par an. Les principaux secteurs directement concernés par sa mise en oeuvre sont enfin mixtes : les services, le BTP, les transports, mais aussi l'industrie.
La distribution des salaires nets annuels selon le secteur d'activité en 2010 permet de préciser le ciblage du Cice. En effet, dans les services mixtes qui comprennent les services financiers, le salaire médian est environ de 27 000 euros nets par an, avec près de 10 % des salaires qui sont en deçà de 15 000 euros nets annuels. En revanche, dans la plupart des secteurs - hors services mixtes - près de la moitié des salaires sont inférieurs à 1,6 Smic, avec une tendance baissière constatée pour les services aux particuliers. Enfin, près de 75 % des salaires versés dans l'industrie sont inférieurs à 2,5 Smic.
Comment se répartissent les gains du Cice entre entreprises en fonction de leur chiffre d'affaires réalisé à l'export? Les entreprises exportatrices recevront 62 % du Cice. Mais le gain indirect pour les entreprises exportatrices, via leurs fournisseurs, qui bénéficient du Cice n'a pas fait, pour l'heure, d'évaluation.
La mise en oeuvre du Cice a conduit également à s'interroger sur l'origine du différentiel de compétitivité de la France, notamment par rapport à l'Allemagne. Le différentiel de compétitivité-coût se joue-t-il dans l'industrie ou dans les services ? L'évaluation conduite par l'Insee, d'après l'enquête européenne Ecmo pour les coûts salariaux et eurostat pour les prix, des coûts horaires de la main d'oeuvre fournit, pour l'année 2013, des informations intéressantes : alors que ces coûts sont plus élevés pour l'ensemble de l'économie en France qu'en Allemagne et que pour la zone euro, ils sont relativement similaires pour l'industrie manufacturière. Cependant, on observe une différence défavorable à la France pour le transport et l'entreposage, et davantage encore pour les services administratifs et de soutien aux entreprises.