Intervention de Selma Mahfouz

Mission commune d'information impact emploi des exonérations de cotisations sociales — Réunion du 14 mai 2014 : 1ère réunion
Audition de Mme Selma Mahfouz commissaire général adjointe Mme Claire Bernard et M. Antoine Naboulet chargés de mission au commissariat général à la stratégie et à la prospective cgsp

Selma Mahfouz, commissaire général adjointe à la stratégie et à la prospective :

La DGFIP devrait être davantage en mesure de répondre à cette question. Initialement instauré afin de permettre aux PME en difficulté de bénéficier d'un effet de trésorerie dès 2013, le préfinancement du Cice incite à sa mise en oeuvre par les entreprises. Son principe est simple : l'entreprise vend à une banque sa créance d'impôt « en germe » sur le Trésor public, sur la base du montant estimé du Cice dont elle bénéficiera. Depuis son lancement en mars 2013, BPI France en est l'opérateur quasi-exclusif. Le premier bilan de ce dispositif, pour l'année 2013, est prometteur : ce sont ainsi près de 800 millions d'euros de préfinancement qui ont été accordés par BPI au profit de 11 600 entreprises. Ce dispositif a été renouvelé en 2014 : il a déjà concerné, pour le premier trimestre, 3 000 bénéficiaires et BPI s'est fixé un objectif pour cette année de 1,2 milliard d'euros, avec toutefois une incertitude s'agissant de la mobilisation des banques commerciales.

L'appropriation du Cice par les entreprises conduit à s'interroger également sur sa prise en compte dans les décisions managériales : le Cice, par sa nature fiscale et sa désynchronisation par rapport au paiement des salaires, est-il assimilé à une baisse du coût du travail ? Car il est vrai que l'affectation du Cice se pose en termes différents pour les entreprises selon leur taille et leur structuration : si, dans les grandes entreprises et les groupes, le montant du Cice a été probablement anticipé, en cas d'intégration fiscale entre filiales, sa réaffectation à ces dernières dépend du régime fiscal retenu ; l'affectation du crédit d'impôt à des finalités précises supposant une prise en compte dans les procédures existantes de comptabilité analytique. On constate par ailleurs une moindre anticipation, un moindre formalisme des procédures comptables ainsi qu'une plus grande proximité entre centres décisionnels et services opérationnels dans les entreprises de plus petite taille. Ces dernières devraient ainsi bénéficier d'un lien plus direct entre le Cice et les décisions d'emploi ou d'investissement.

L'affectation du Cice en 2014 est ainsi conditionnée par les perspectives conjoncturelles des entreprises, leurs contraintes économiques immédiates ou les priorités stratégiques.

L'Insee a ajouté un module de questions sur le Cice à l'enquête conjoncture auprès des entreprises de l'industrie et des services. Ces questions sont posées chaque trimestre. Elles portent sur le montant du Cice et son utilisation. La première vague a eu lieu en janvier 2014.

Pour cette première vague le taux de réponses aux questions sur le Cice était relativement faible et ce pour trois raisons : la nouveauté des questions, le fait qu'au mois de janvier les entreprises avaient alors encore peu de visibilité sur le Cice et leur complexité. L'Insee réfléchit à reformuler les questions pour les enquêtes des troisième et quatrième trimestres.

Au mois de janvier 2014, les entreprises étaient plus nombreuses à déclarer que le Cice sera utilisé pour financer des investissements que pour créer ou préserver des emplois. Ces résultats sont plus au moins marqués selon les secteurs. Les réponses semblent ainsi très liées à la situation conjoncturelle des entreprises. Celles qui ont une vision positive de la situation conjoncturelle prévoient un usage du Cice plus fortement orienté vers l'emploi ; celles prévoyant d'investir en 2014 déclarent plus fréquemment qu'il sera mobilisé pour l'investissement, tandis que celles faisant état d'une dégradation sur leur position compétitive dans l'UE privilégient une affectation pour baisser leurs prix.

Nombreuses sont également les questions recensées par le comité de suivi : tout d'abord, quelles entreprises bénéficient-elles du Cice? Quels sont les effets sur l'allocation des gains générés entre l'emploi, les investissements, les prix, les marges et les salaires? Quels sont encore les effets sur les relations sociales dans l'entreprise ou sur les relations inter-entreprises, les éventuels effets secondaires ainsi que les interactions avec des dispositifs de réduction des cotisations sociales ? Quels sont encore les effets macro-économiques du Cice sur la croissance et l'emploi, la compétitivité, la profitabilité, ainsi que le pouvoir d'achat ?

L'évaluation du Cice mobilise trois types d'instruments. Un premier suivi est assuré, via les données descriptives sur les évolutions globales du coût du travail, de l'emploi, des salaires et de l'investissement, ainsi que des enquêtes de conjoncture et sur la mise en oeuvre du dispositif connexe de préfinancement. D'autre part, une évaluation micro-économique ex ante sera réalisée par des organismes de recherche qui devraient être sélectionnés par appel d'offres, cette évaluation devant être complétée par des travaux qualitatifs. A cette évaluation devrait enfin s'ajouter un bouclage macro-économique ex-post, permettant de prendre en compte les effets globaux et indirects. Le calendrier de ces travaux d'évaluation s'étale jusqu'à 2017, date de la restitution du bouclage macro-économique.

Au-delà du Cice, des problématiques d'évaluation englobant les allègements doivent également être envisagées : leur efficacité sur l'emploi et la compétitivité par rapport aux objectifs affichés par les politiques publiques, le ciblage et l'identification des éventuels effets d'aubaine ou des effets indésirables, l'impact sur la formation des salaires, les effets de seuil, les effets combinés des politiques, l'articulation entre allégements et crédits d'impôt. Certes, il reste la question générale du contrefactuel, l'évolution économique en l'absence d'un tel dispositif.

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