Intervention de Jacques Marzin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 21 mai 2014 : 1ère réunion
Projet d'opérateur national de paye onp — Audition conjointe de M. Olivier Bourges directeur général adjoint à la direction générale des finances publiques dgfip Mme Marie-Anne Lévêque directrice générale de l'administration et de la fonction publique dgafp M. Jacques Marzin directeur de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication disic et de Mme Valérie Metrich-hecquet secrétaire générale du ministère de l'agriculture

Jacques Marzin, directeur interministériel des systèmes d'information et de communication (DISIC) :

Je vais tenter de résumer un sujet d'une extrême complexité. La DISIC, créée le 21 février 2011 et placée sous l'autorité du Premier ministre, a été rattachée au Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) lors de sa création en octobre 2012. Ses missions sont d'orienter, d'animer et de coordonner toutes les actions des administrations d'Etat en matière de systèmes d'information (SI), et de piloter les nombreuses mutualisations. Une part importante de la mission de la DISIC vise à sécuriser les grands projets informatiques, et c'est à ce titre que nous sommes, très tôt, intervenus sur le projet ONP.

En guise d'historique, je rappellerai que l'ONP a été créé en 2007 à la suite de nombreux travaux menés dès 2002 par la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) avec le soutien de l'Agence pour le développement de l'administration électronique (Adaé), qui a précédé la DISIC. Ces travaux ont d'abord exploré la possibilité d'un seul système d'information des ressources humaines (SIRH) uniforme pour l'ensemble des ministères, et d'un seul calculateur automatique de la paye. En 2006, l'objectif d'un SIRH commun a été abandonné pour centrer l'effort sur le calculateur de la paye, dont la création et la mise en oeuvre a été confiée à l'ONP. La mission de l'ONP était aussi de mettre en place un pilotage de la masse salariale et des effectifs de la fonction publique d'État, et de développer les « référentiels » communs à tous les SIRH ministériels en vue du raccordement au calculateur de la paye. La DISIC est intervenue dès le printemps 2012 pour appuyer le ministère de l'agriculture, pilote de l'opération, afin que le raccordement puisse fonctionner.

Des difficultés sont apparues dans plusieurs ministères concernant le raccordement de leur SIRH au calculateur national, qui ont débouché sur des annonces de décalage temporel et nous ont conduit à alerter les autorités sur des risques supplémentaires qui n'avaient pas été identifiés jusqu'ici. Il était nécessaire de s'intéresser à l'opération dans sa globalité. Une mission a été confiée à l'Inspection générale des finances (IGF) et au Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET), puis j'ai commandé une revue indépendante pour s'intéresser aux aspects techniques de l'opération. Ces missions ont identifié de façon convergente plusieurs difficultés, notamment l'extrême complexité du système et l'ambitieux niveau de qualité attendu des SIRH en vue du raccordement. Des surcoûts allaient inévitablement apparaître du fait de l'allongement des travaux nécessaires au raccordement. Aucune de ces missions d'exploration n'a cependant statué sur l'arrêt du projet. Seules ont été émises des pistes et des recommandations en faveur d'un itinéraire un tout petit peu moins ambitieux, plus progressif, sans remettre en cause les fondamentaux du projet et l'existence du calculateur central.

C'est la raison pour laquelle le Premier ministre m'a mandaté pour conduire des travaux de « refondation » qui nous ont permis d'explorer toutes ces voies techniques et d'en dégager les coûts et de construire de nouveaux plans-projets soumis en décembre dernier. Nous avons travaillé avec tous les ministères, avec toutes les directions parties prenantes et avec l'ONP, dans un allant collectif sans faille, avec la participation extrêmement active de tous les acteurs, et nous n'avons pas douté, jusqu'à la consolidation des éléments de délais et de coûts, que nous puissions trouver une solution qui nous permette de poursuivre le projet.

À l'issue de ce travail, au début du mois de décembre, nous avons fait trois constats difficiles.

Premièrement, la durée du projet : celui-ci devait se terminer en 2016, mais il mais il est apparu qu'il n'aurait pas pu être achevé avant 2023. Or cet horizon 2023 est soumis à des aléas. La priorité est en effet de réparer le logiciel Louvois du ministère de la défense et non pas d'améliorer les SIRH des autres ministères en vue de leur raccordement. Par ailleurs, le ministère de l'éducation nationale est engagé dans un projet d'une très grande complexité sur des masses financières et des populations extrêmement importantes, et dont le calendrier en vue de la « bascule » a dû être révisé pour être plus raisonnable, et forcément plus long. Bref : un projet interministériel dont la durée est prolongée de sept ou huit ans devient un objet dont la bonne fin est extrêmement aléatoire. Ce constat vaut pour tous les projets de systèmes d'information, ne serait-ce que parce que, pendant ce temps, le droit continue à évoluer, la simplification continue de progresser. Tout cela rend les coûts et les délais très incertains.

Deuxièmement, le coût : nous avons pour la première fois consolidé l'ensemble des projets - le calculateur et les SIRH. Nous avons pu constater que même en poussant jusqu'à l'horizon 2034, nous arrivions à une rentabilité extrêmement négative, qui s'établit à un milliard d'euros au minimum. Et cet horizon est plus long que les quinze ou vingt ans que nous prenons habituellement comme référence pour un système informatique de paye.

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