Intervention de Jacques Marzin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 21 mai 2014 : 1ère réunion
Projet d'opérateur national de paye onp — Audition conjointe de M. Olivier Bourges directeur général adjoint à la direction générale des finances publiques dgfip Mme Marie-Anne Lévêque directrice générale de l'administration et de la fonction publique dgafp M. Jacques Marzin directeur de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication disic et de Mme Valérie Metrich-hecquet secrétaire générale du ministère de l'agriculture

Jacques Marzin, directeur interministériel des systèmes d'information et de communication (DISIC) :

Les chiffres que vous citez concernent le coût du seul ONP. Lorsque je parle d'un milliard d'euros, j'intègre non seulement l'ONP mais aussi l'adaptation des huit SIRH ministériels en vue de leur raccordement à l'ONP, car ces sujets ne peuvent être traités l'un sans l'autre. Nous avons travaillé sur le périmètre global de l'écosystème, sans lequel l'ONP n'est rien et ne sert à rien. L'un des défauts originels du projet est que l'on s'est concentré sur un chiffrage très minutieux de la construction du calculateur, mais que l'on s'est insuffisamment préoccupé de la coordination de l'ensemble des SIRH ministériels. C'est ce qui a motivé ma mission : alors que l'ONP avait quasiment achevé son calculateur conformément aux spécifications, on constatait que le ministère de l'agriculture, qui était pilote, ne parvenait pas à se raccorder au calculateur pour liquider la paye.

Aurait-il pour autant mieux valu ne rien faire ? Certainement pas. Les ambitions du projet, les objectifs d'homogénéisation des pratiques, de rationalisation de la chaîne SIRH-Paye et de simplification réglementaire sont et restent prégnantes. Je ne pense pas du tout qu'en ne faisant rien, nous serions allés dans la bonne direction pour pérenniser le calcul de la paye. Par ailleurs, les outils aujourd'hui utilisés par la DGFiP sont des outils certes efficaces, mais extrêmement anciens, conçus dans les années 1970 à partir de technologies pour certaines abandonnées par leurs éditeurs, et qui un jour ou l'autre seront frappés d'une obsolescence technique. Il était donc impensable de ne pas se préoccuper de leur remplacement.

Le critère de la valeur actuelle nette que j'ai utilisé est employé de façon systématique dans tous nos projets. Il est de plus en plus difficile, pour l'État comme pour toute organisation, de lancer des projets qui ne trouvent pas leur équilibre entre les coûts et les bénéfices attendus.

Le troisième élément que je souhaite évoquer porte sur les difficultés techniques qui demeurent. Le projet ONP a consisté à faire vivre un système de paye nouveau et à le maintenir à côté de huit SIRH de conception différente et de fonctionnement différents. Deux ministères notamment fonctionnaient avec des solutions techniques développées en interne. Il existe donc une véritable complexité technique à coordonner cet ensemble dans la durée afin d'éviter les aléas de paye.

Dans une certaine mesure, il est possible de faire un parallèle avec le logiciel de paye Louvois. Il s'agit là de l'accident industriel d'un logiciel en production qui se traduit aujourd'hui par des défauts dans le calcul de la paye des militaires de l'armée de terre, en particulier de ceux qui sont en opérations extérieures (OPEX). Louvois nous rappelle que la paye d'un fonctionnaire, en particulier d'un fonctionnaire actif sur des territoires extérieurs, est complexe - et elle le restera d'ailleurs pour ces derniers, car la participation à des OPEX fait l'objet d'une réglementation extrêmement compliquée. Une grande vigilance est par conséquent nécessaire lors de la mise en place de nouveaux systèmes de paye. L'expérience du ministère de la défense avec Louvois démontre qu'une fois les dysfonctionnements constatés, il est difficile et très long de les régler. Le seul parallèle que l'on puisse réaliser entre ONP et Louvois, c'est qu'il s'agit de deux objets techniques inadaptés.

La grande différence, à l'inverse, c'est que je préconise d'arrêter le projet de calculateur unique de la paye avant que l'on ne constate des dysfonctionnements dans la paye des fonctionnaires. J'ai en effet proposé le scénario qui m'est apparu comme le plus raisonnable, à savoir d'arrêter le raccordement des SIRH ministériels au SI-Paye. Il s'agit de trouver une autre manière de moderniser la chaîne SIRH-paye, à ambitions inchangées.

Dans ce projet tel que je l'ai trouvé, tout le monde était focalisé sur la paye et le raccordement à l'ONP et fort peu sur la gestion des ressources humaines en amont. Il m'a semblé, en tant que technicien, que c'était là prendre le problème dans le mauvais sens. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé au Premier ministre de ne pas remettre en cause l'ambition qui sous-tend l'ONP et de poursuivre la simplification du système. J'ai indiqué que ce que le raccordement représenterait plutôt une entrave à l'évolution des réglementations par une complexification longue de l'écosystème technique de l'État. Pendant dix ans, on aurait eu concomitamment l'application PAY à faire tourner pour l'Éducation nationale, Louvois pour les militaires, et le nouveau système ONP.

Ce que l'on a maintenu en revanche, c'est la nécessité d'une coopération interministérielle globale.

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