Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 27 mai 2014 à 9h30
Questions orales — Situation des enfants recueillis dans le cadre d'une kafala

Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie :

Monsieur le sénateur, Mme la garde des sceaux, actuellement à l’Assemblée nationale pour une audition devant la commission des lois, vous prie de bien vouloir excuser son absence.

La kafala est une institution qui a pour objet d’offrir à un enfant une protection sans créer de lien de filiation entre ce dernier et la personne qui le recueille, assure son éducation et son entretien. La kafala est expressément reconnue par plusieurs conventions que la France a ratifiées.

S’agissant de la filiation, une modification de la loi actuelle ne paraît pas envisageable. En effet, l’article 370-3 du code civil, issu de la loi du 6 février 2001 relative à l’adoption internationale, adoptée à l’unanimité par le Parlement français, prévoit que « l’adoption d’un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France ».

Il ne serait donc pas raisonnable de revenir sur cette disposition qui repose sur le respect de la souveraineté des États prohibant l’adoption et qui est aussi conforme aux exigences de la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur l’adoption internationale.

En ce qui concerne la suppression de la durée de résidence de cinq ans exigée pour l’acquisition de la nationalité française, la question mérite plus ample expertise et discussion : il ne faudrait en effet pas créer de différences de traitement entre, d’une part, les enfants recueillis par kafala et, d’autre part, les enfants nés de parents étrangers en France et y résidant, pour lesquels une résidence habituelle en France de cinq ans depuis l’âge de onze ans est exigée pour acquérir la nationalité à la majorité.

Au demeurant, les enfants recueillis par kafala ne sont pas dépourvus, en France, de statut. En effet, une kafala judiciaire, comme toute décision relative à l’état des personnes, est reconnue de plein droit sur le territoire français, sans formalité particulière, dès lors que sa régularité n’est pas contestée. Si l’enfant n’a pas de filiation établie ou a été abandonné, il sera protégé au titre des règles relatives à la tutelle.

Si, en revanche, l’enfant dispose encore d’une filiation établie à l’égard de l’un de ses parents, la personne qui l’a recueilli en France sera considérée comme délégataire de l’exercice de l’autorité parentale.

D’ailleurs, la Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt en date du 4 octobre 2012, a considéré que le dispositif français ne portait pas atteinte au respect de la vie privée et familiale, et ce d’autant que l’enfant, s’il devient Français ultérieurement, est ensuite adoptable.

Conscient toutefois de la nécessité de mieux faire connaître cette institution, le ministère de la justice entend rappeler par voie de circulaire les effets produits en France par une kafala, afin de faciliter les démarches effectuées par les familles.

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