Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 28 mai 2014 à 14h30
Prescription de l'action publique des agressions sexuelles — Article 1er, amendements 2 3

Laurence Rossignol, secrétaire d'État :

Avec votre permission, monsieur le président, je donnerai l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 2 et 3 de la commission, joints par leur cohérence et leur logique.

Ces amendements ont une première qualité : ils ne soulèvent aucun problème de constitutionnalité. Nous pouvons donc porter sur eux un regard plus confiant que sur la proposition de loi. §

Toute l’ambiguïté et la difficulté du sujet sur lequel vous travaillez, madame Dini, consistent à trouver la moins mauvaise solution pour les victimes. Il ne faut pas minorer le fait que plus on allonge le délai de prescription, plus les preuves vont être difficiles à rapporter. Il s’agit alors non plus de trouver des preuves matérielles, mais de s’appuyer essentiellement sur des témoignages.

Or, plus le temps passe, plus il est difficile de recueillir les témoignages. Il ne faudrait pas imposer à ces victimes une deuxième blessure, une deuxième souffrance : le classement sans suite de l’affaire, un non-lieu, ou, tout simplement, la difficulté à obtenir justice, ce qui reviendrait, pour elles, à un deuxième déni.

Il n’est pas aisé d’évaluer cette difficulté : autant de victimes, autant de situations différentes, autant de chemins psychologiques différents, autant de capacités différentes à faire valoir des témoignages, autant d’instructions et d’actions en justice qui se concluent différemment. Je tenais seulement à attirer votre attention sur ce point, mesdames, messieurs les sénateurs, qui vaut aussi pour les amendements déposés par M. le rapporteur.

En outre, attention à la proportionnalité. Certes, il s’agit là d’un système dérogatoire au droit commun de la prescription, qui, en principe, part des faits. En l’occurrence, nous partons non pas des faits, mais de la victime ; le point de vue est déplacé. Néanmoins, mesdames, messieurs les sénateurs, il faut maintenir une proportionnalité.

Pour toutes ces raisons, mais aussi parce qu’il sensible s’inscrit dans la démarche engagée ici et qu’il mène une réflexion globale et plus cohérente sur les délais de prescription, que l’on ne peut pas toujours traiter au cas par cas, le Gouvernement, sur les amendements n° 2 et 3, s’en remet à la sagesse du Sénat, et je sais à quel point elle est grande ! §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion