Intervention de Jean-Paul Raillard

Mission commune d'information impact emploi des exonérations de cotisations sociales — Réunion du 28 mai 2014 : 1ère réunion
Audition conjointe de Mm. Jacky Fayolle directeur du centre etudes et prospective groupe alpha jean-françois poupard directeur général et jean-paul raillard chargé d'étude cabinet syndex

Jean-Paul Raillard, chargé d'études auprès du comité de direction du cabinet Syndex :

Après avoir exercé les fonctions de M. Poupard, je dirige une cellule de recherche qui travaille sur des questions telles que les allègements de cotisations sociales, la loi sur la sécurisation de l'emploi, le Cice. Nous avons peu de recul pour analyser les conséquences que les allègements de cotisations et la mise en place du Cice ont pu avoir sur l'orientation stratégique des entreprises. Sur nos 1 500 clients, une dizaine d'entreprises seulement ont démarré cette consultation.

L'un des effets pervers des exonérations a été de favoriser au niveau du Smic la formation d'un plancher collant. En maximisant l'effet de l'allègement de charges, les entreprises ont créé des trappes à bas salaires. Le phénomène s'est beaucoup vu dans les centres d'appel ou les entreprises de services à la personne. Les réactions ont varié selon le type d'entreprise. Dans les TPE et les PME les exonérations ont pu modifier le dispositif de recrutement. L'effet des exonérations sur la création d'emplois est plus complexe à analyser dans les grandes sociétés car, qu'elles soient filiales de groupes ou entreprises intermédiaires, leur stratégie se développe à long terme. Les allègements ont davantage eu un effet d'aubaine et n'ont que peu modifié la politique de recrutement.

D'autres critères d'analyse interviennent : l'entreprise est-elle soumise ou non à la concurrence internationale ? Son activité est-elle délocalisable ? Quand ce n'est pas le cas, l'entreprise intègre les allègements comme une donnée économique. Par exemple, dans le secteur des aides à la personne, les exonérations auront un effet sur le coût des prestations, favorisant la position sur le marché de l'entreprise qui en bénéficie. Dans les transports, en diminuant ce coût, les aides renforcent la position de l'entreprise dans sa négociation avec le donneur d'ordre. Des syndicalistes venus d'une entreprise de protection sociale qui a touché 150 000 euros de Cice m'expliquaient ce matin que cette somme a compensé la hausse récente de la taxation des parcours de soins. D'une manière générale, en 2013, les entreprises n'ont pas mené de réflexion sur l'utilisation du Cice. Les arguments restent pauvres. L'Insee l'a constaté dans une note, au début de l'année. Un dernier exemple est celui d'un groupe de transports qui m'a dit avoir utilisé le Cice pour continuer les opérations en cours.

Manifestement, les effets que le Cice aurait pu avoir sur la compétitivité ou sur l'emploi n'ont pas été considérés. Si aucune politique industrielle n'est mise en place pour favoriser la transformation de l'économie française et le développement d'industries d'avenir, rien ne se fera. Si aucune consultation n'a lieu dans les entreprises sur l'utilisation du Cice, les exonérations n'auront aucun effet immédiat sur la politique de l'emploi au sein de l'entreprise.

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