Intervention de Giusto Sciacchitano

Commission spéciale sur la lutte contre le système prostitutionnel — Réunion du 7 mai 2014 : 1ère réunion
Audition par visioconférence de M. Giusto Sciacchitano adjoint au procureur national anti-mafia direction nationale anti-mafia — Rome italie

Giusto Sciacchitano :

Il s'agit là d'aspects différents. La victime de la traite à laquelle on donne ce permis de séjour n'est pas la même personne que celle que l'on reçoit dans ces centres d'accueil. Le premier cas correspond au phénomène de la traite des êtres humains, le second concerne les clandestins. Il s'agit de deux sujets qu'il ne faut pas confondre car, du point de vue de la législation, ils ne sont pas soumis aux mêmes lois.

Ces centres d'accueil s'adressent aux clandestins qui arrivent de leur propre chef ; ce sont en grande partie des personnes en provenance de pays en guerre, qui demandent le droit d'asile, ce qui est très différent du phénomène du « smuggling », c'est-à-dire de la contrebande. Pour l'instant, l'Italie est le pays d'arrivée de tous les gens en provenance de la corne de l'Afrique, de la Libye, de la Syrie, pays touchés par de graves problèmes. Les centres d'accueil cherchent à savoir si ces personnes ont les documents nécessaires pour bénéficier de ces permis.

L'autre phénomène concerne les victimes de la traite des êtres humains qui souhaitent sortir des réseaux prostitutionnels. Dans le cas du « smuggling », lorsque la victime arrive en Italie, elle n'a plus de rapport avec le trafiquant, car le clandestin souhaite arriver en Italie ou du moins en Europe. L'Italie constitue le premier pays par où passer pour se rendre en France, en Angleterre, en Suisse ou ailleurs. Cette personne n'utilise donc plus les moyens du trafiquant. Dans les cas de traite des êtres humains, la victime est contrainte de quitter son pays pour connaître une vie meilleure à l'étranger, mais doit subir l'exploitation du proxénète.

D'une manière générale, la victime qui veut sortir du réseau prostitutionnel peut bénéficier d'un permis de séjour temporaire, ainsi que je l'ai déjà dit. Lorsque la victime demande à pouvoir bénéficier de ce permis de séjour temporaire pour sortir d'une organisation dont elle est victime, le ministère de l'intérieur lance une procédure destinée à délivrer un document. Bien évidemment, des enquêtes sont menées et, lorsque les dires de la personne sont démontrés, un titre de séjour de six mois est délivré. Il peut être renouvelé. Pendant ce laps de temps, la victime est aidée par l'État d'un point de vue financier.

Comme je l'ai dit, ce système s'est révélé être très utile, car nous savons que chaque victime, qu'il s'agisse de la traite ou du « smuggling », en arrivant en Italie, ne fait pas confiance aux autorités. J'ai moi-même pu le constater. Au début, la victime ne sait pas qu'il existe une différence entre un policier italien et un policier nigérian et peut penser que le policier italien est corrompu comme son homologue du Nigeria. Elle assimile donc le policier au trafiquant.

Notre système de sortie des réseaux de traite a permis d'établir une relation de confiance entre la victime et les pouvoirs publics italiens, notamment les forces de police, qui peuvent maintenant facilement faire comprendre aux victimes qu'elles peuvent avoir confiance dans une structure étatique mise en place pour elles. Bien souvent, ces collaborations nous permettent d'identifier les trafiquants et de les poursuivre en justice.

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