Tous les pays européens sont touchés par le crime organisé endogène - comme la Camorra, la Ndrangheta, ou la Mafia, en Italie - mais nous sommes de plus en plus la cible de mafias étrangères ou de crimes organisés étrangers.
Dans le trafic des êtres humains, les trafiquants sont issus de réseaux exclusivement étrangers. Toutes les enquêtes que nous menons en Italie sont claires à ce sujet : il s'agit de mafias étrangères, nigérianes, ou de mafias criminelles d'Europe centrale et orientale, de Baltique. Même les organisations criminelles chinoises sont très présentes. Leur objectif est de faire parvenir leurs membres en Europe et l'Italie est souvent le premier pays par lequel transitent ces personnes.
Ceci engendre évidemment d'énormes problèmes. L'Italie, comme la France ou la Grande-Bretagne, pays avec lesquels je suis en contact permanent grâce à la collaboration entre nos forces de l'ordre, se rendent compte qu'elles ne peuvent faire face qu'au dernier maillon de la chaîne, le moins important. Il s'agit des personnes qui, sur place, sont en contact avec celles qui gèrent ce trafic depuis l'étranger, contrôlent les victimes et décident de leurs mouvements.
L'Union européenne ne peut guère agir vis-à-vis des pays de transit ou d'origine, où résident les vrais trafiquants. Nous n'avons aucune possibilité concrète d'intervention à leur encontre. Je suis d'ailleurs en train de mener une campagne à ce sujet. J'essaye d'en parler à l'échelon international, mais avec très peu de résultat, hélas ! En France, en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, nous n'avons pas eu de réponse convaincante de la part des autorités judiciaires de pays comme le Nigeria. Les pays du Maghreb, la Libye, l'Egypte ne nous ont donné aucune réponse.
De nouveaux trafics en provenance de Chine, d'Afghanistan ou d'Irak concernent des personnes qui veulent quitter leur pays pour arriver en Europe. Ces trafics reposent sur des bases de transit solidement établies en Turquie et en Grèce. Malheureusement, nous n'avons aucune forme de collaboration avec ces pays. Si l'on veut traiter ces problèmes, il faut élargir notre champ de vision. Je le dis et le répète lorsque je m'adresse à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), aux Nations unies ou à l'Union européenne : il faudrait que l'Europe se dote d'une législation complète et homogène en la matière. Nous devons mettre en oeuvre des directives européennes, mais aucun organisme international, pas même l'Union européenne, ne peut vérifier si ces pays ont bien transposé les normes prévues par les conventions, les traités et les actes internationaux...
Tous les pays européens partagent ce problème, mais aucun n'a développé de politique visant à l'affronter ensemble. J'ai suggéré quelques idées qui pourraient être mises en place avec un pays comme le Nigeria, s'il fallait n'en identifier qu'un seul. Il faudrait faire en sorte que la politique étrangère européenne dialogue avec au moins l'un des pays les plus touchés par ce phénomène. Aucun gouvernement n'y est jusqu'à présent parvenu !