Face à la concentration dans le secteur, après l'annonce d'une réforme territoriale qui suscite des questions sur le rôle des départements, fondamental pour la mise en oeuvre du plan France très haut débit, mais aussi sur les contours des régions, il est tout à fait légitime que les élus et les parlementaires en particulier s'interrogent : le plan de déploiement de l'internet à très haut débit sera-t-il remis en cause ? La question se pose autant dans les 53 % du territoire en zone dite « AMII » (appel à manifestation d'intention d'investissement), où les opérateurs privés sont autorisés à déployer la fibre dans le cadre de contrats avec l'État et les collectivités territoriales, que dans les zones dites « blanches », qui regroupent les 47 % restants, où les autorités publiques et les collectivités locales interviennent pour déployer le très haut débit. Remettre en cause ce plan reviendrait à remettre en cause l'engagement du président de la République de déployer la fibre optique d'ici à 2023.
Soyons lucides et relativisons ! Dans cette période charnière, les opérateurs doivent être en mesure de continuer à investir. L'État s'est fortement engagé, à hauteur de 3,3 milliards d'euros : c'est le plus grand chantier d'infrastructures de ce début de siècle, le plus grand du quinquennat. Toutes les études montrent que le très haut débit entrainera un gain de valeur économique, de croissance et d'emplois. Il n'est pas question de remettre en question l'engagement de l'État. Le plan France très haut débit procède d'un cadre souple, fondé sur un dialogue avec les acteurs, animé par la mission du même nom. Il n'y a plus d'opposition de principe entre les opérateurs et les collectivités locales, sous l'arbitrage de l'État. Le dialogue prime et porte ses fruits, puisque les projets des départements ont été validés. Ce cadre souple permet aux opérateurs de mobiliser leurs capacités financières au service de nouvelles infrastructures en fibre optique, le plus rapidement possible dans les zones prioritaires, comme les écoles, visées par le plan École connectée que nous avons récemment lancé avec Arnaud Montebourg et Benoît Hamon. Déjà, 54 dossiers ont été déposés pour obtenir le soutien du fonds numérique, afin d'offrir à quatre millions de foyers l'accès au très haut débit, et à 600 000 autres un meilleur débit sur le réseau de cuivre. Cela répond à une demande des élus, que le Gouvernement doit entendre. Nous ne refusons pas par principe un mix technologique, car il y a urgence, pour combler la fracture numérique, sans remettre en cause, je l'ai dit, l'engagement du président de la République.
Le volume global des investissements s'élève à 7 milliards d'euros à ce jour : 3,2 millions de logements accèdent au très haut débit, dont 600 000 en dehors des zones les plus denses. Une dynamique est engagée. Le Gouvernement veillera à ce qu'elle ne soit pas enrayée, à ce que la concentration bénéficie à tous, à ce que les engagements soient respectés, comme les 450 millions d'euros supplémentaires de SFR et Numericable dans le plan « France très haut débit », de 2015 à 2017, pour les zones denses, et les 50 millions d'euros supplémentaires pour amorcer l'arrivée des grands fournisseurs d'accès à internet sur les réseaux publics.
Nous travaillons à l'accélération de cette dynamique au profit des territoires : ainsi, la réglementation de l'accès des immeubles à la fibre ne doit pas la pénaliser par rapport à d'autres technologies. Nous encourageons les montages de long terme, par lesquels les investisseurs accompagneront les investissements des opérateurs. Nous réfléchissons aux moyens de faire en sorte que la concurrence entre infrastructures bénéficie aux usagers.
Le plan cible les besoins prioritaires, pour le raccordement des entreprises et des services publics et pour le raccordement rapide des zones les moins favorisées. Le Gouvernement n'a nullement l'intention de remettre à plat l'ensemble de ce plan. Il entend, bien au contraire, rassurer les usagers et les opérateurs. Nous tiendrons compte des conséquences de la concentration du secteur et de la réforme territoriale pour trouver des outils de financement innovants, permettant de répondre aux besoins spécifiques, en particulier dans les zones denses.