Intervention de Raymond Couderc

Réunion du 11 juin 2014 à 14h30
Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales

Photo de Raymond CoudercRaymond Couderc :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 30 avril dernier, la mission commune d’information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales présentait ses conclusions au Sénat, nous donnant ainsi l’opportunité de débattre de ce sujet aujourd’hui.

Je veux souligner la qualité du travail de cette mission, féliciter son président et, à travers vous, madame Escoffier, son rapporteur, M. Stéphane Mazars.

Il s’agit d’un sujet que j’ai eu à connaître de très près pendant de nombreuses années. S’il n’est pas nouveau, puisque la Cour des comptes, en 2009, recommandait déjà « aux collectivités territoriales de mieux maîtriser leurs engagements à l’égard du sport professionnel et de rechercher ainsi un partenariat plus équilibré en termes de soutien financier, de mise à disposition d’équipements sportifs, d’amélioration et de construction des équipements », ce sujet reste encore aujourd’hui totalement à traiter.

Cette question est donc toujours pertinente dans un contexte financier difficile pour nos collectivités territoriales, le Premier ministre ayant annoncé vouloir réaliser 11 milliards d’euros d’économies sur ces dernières. L’argent public devient de plus en plus rare et précieux !

Il est donc urgent, pour les collectivités, de rationaliser leurs budgets et de réserver prioritairement leurs dépenses à leurs compétences principales.

En parallèle, nous ne pouvons plus nier l’émergence, depuis plusieurs années, d’une véritable industrie du sport professionnel qui, pour une part, dispose de fonds propres parfois importants, lui permettant une autonomie certaine. Je pense, par exemple, aux clubs de Ligue 1 de football ou à ceux du Top 14 de rugby et à quelques autres encore.

Aussi, pourquoi les collectivités territoriales continueraient-elles à subventionner autant les clubs de sport professionnel ? Cette question est d’autant plus légitime qu’il s’agit d’argent public utilisé souvent pour des intérêts privés.

Or, au-delà des aides accordées de bonne grâce par certaines collectivités, il existe des situations ambiguës pouvant s’apparenter à une insidieuse quasi-obligation de subvention. Ainsi, quand une collectivité finance largement son ou ses clubs, comment les élus de la collectivité voisine pourraient-ils refuser de faire de même ? Une pression s’installe sur la seconde collectivité, la poussant à faire comme la première. L’opinion publique, en effet, ne comprendrait pas qu’on « laisser tomber » son club fétiche.

De plus, au-delà des subventions, les demandes de certains clubs se font de plus en plus subtiles, notamment à travers des achats d’espaces publicitaires, le flocage de maillots et de shorts, la réduction des prix de location des installations, et on a parlé de l’inflation normative qui pèse sur les budgets, sans oublier des interventions plus ou moins fictives des joueurs auprès des jeunes de la ville, du quartier ou parfois du département…

Pour autant, le tableau n’est pas tout noir. Il est possible de discerner un point d’équilibre où collectivités et clubs peuvent trouver un juste profit. Il est exact que les collectivités peuvent bénéficier de l’image de leurs clubs, ainsi que du sentiment de cohésion liée aux résultats sportifs.

Au final, les préconisations du rapport sont à considérer comme des objectifs à atteindre et non comme des impératifs immédiats.

En revanche, ce qui est impératif, c’est de rendre transparentes au plus vite les relations entre clubs sportifs et collectivités, en distinguant clairement les éléments qui relèvent des activités commerciales de ceux qui relèvent de « services » d’entreprises privées. Il faut expressément réserver l’argent public à des objectifs d’intérêt général.

Ainsi, une distinction pourra se faire entre les disciplines masculines – surtout – et féminines – pour une part – très médiatisées et celles dont les répercussions sociales et médiatiques sont plus modestes, c’est-à-dire les disciplines dans lesquelles les entreprises privées n’ont guère de bénéfices à espérer dans l’immédiat.

Ce rapport prévoit donc des préconisations intéressantes, mais à mettre en œuvre avec précaution et discernement – ce qui est valable pour la Ligue 1 et le Top 14 ne l’est pas forcément pour la fédération de badminton –, tout cela sur la base de la transparence, afin d’éviter tout abus.

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