Intervention de Thierry Braillard

Réunion du 11 juin 2014 à 14h30
Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales

Thierry Braillard , secrétaire d’État :

Par ailleurs, ce rapport est aussi essentiel en ce qu’il pose enfin la question des infrastructures sportives. À cet instant, je veux rendre hommage au courage de ses auteurs.

Aujourd'hui, notre pays est à un tournant culturel : le modèle français de la collectivité propriétaire et exploitante des équipements a vécu. Sur ce point aussi, je souscris aux propos qu’a tenus Dominique Bailly. À l’ère du sport professionnel, on ne peut plus imaginer qu’une ville va financer, gérer et exploiter un équipement qui ne profitera qu’à la société privée utilisatrice. Je partage entièrement le constat établi par les auteurs du rapport : les partenariats public-privé, les PPP, constituent des bombes à retardement, ne serait-ce qu’en raison de l’aléa sportif, que M. Néri a évoqué. La France n’entendant pas adopter le modèle des ligues fermées, comment peut-on signer un engagement sur trente ans, sans certitude que, durant cette période, le club locataire de l’infrastructure jouera toujours au plus haut niveau ? §Qui peut affirmer avec certitude que le club de Clermont – je cite cet exemple au hasard, monsieur Néri ! – restera pendant trente ans en Top 14 ? On ne le peut pas, en raison de l’aléa sportif !

Je le répète, les auteurs du rapport ont été courageux de dire haut et fort que nous allons au-devant de gros problèmes. Cela étant, monsieur Savin, qu’entendez-vous par « sport professionnel arrivé à maturité » ? Pour l’heure, la grande majorité des clubs professionnels bénéficient du soutien de collectivités territoriales. Si, demain, les collectivités n’aident plus les clubs de volley-ball, celui-ci disparaîtra de la carte du sport professionnel français ! Cela vaut aussi pour le hand-ball et, surtout, pour le basket-ball. Restent le football et le rugby…

Le club de rugby d’Oyonnax, qui joue en Top 14, est-il un club professionnel arrivé à maturité, qui ne devrait plus être subventionné par les collectivités ? La réponse est non ! Ce club est un vecteur économique extrêmement important dans la vallée de la plasturgie de l’Ain. Son rôle va bien au-delà du seul domaine sportif. Or, s’il n’était pas soutenu par les collectivités, il ne serait plus en Top 14 !

De même, le club de football féminin de Juvisy relève-t-il du sport professionnel arrivé à maturité ? À nouveau, la réponse est non ! Sans soutien des collectivités, il n’y aurait plus de football féminin professionnel à Juvisy ! Je remercie d’ailleurs Mme Bouchoux d’avoir souligné la nécessité de développer le sport féminin : qu’elle ne doute pas de ma détermination à cet égard.

Enfin, les clubs de football de Caen ou de Metz, qui viennent de monter en Ligue 1, sont-ils arrivés à maturité et ne doivent-ils plus, pour cette raison, bénéficier du soutien des collectivités ? Parlez-en aux sénateurs des deux départements concernés ! M’étant récemment rendu dans le Calvados, j’ai pu constater que le Stade Malherbe de Caen est un vrai vecteur pour les collectivités, et je n’ai entendu personne dire que, maintenant qu’il a accédé à la Ligue 1, ce club ne doit plus être soutenu…

Monsieur Savin, la notion de « sport professionnel arrivé à maturité » est donc difficile à cerner, et sa définition est discutable. Cependant, vous avez raison d’en appeler à « moins d’argent public » et à « mieux d’argent public » et, surtout, je souscris à ce que vous avez dit sur la nécessité d’un changement de culture.

Mme Escoffier a invoqué à juste titre le bon sens. Le désarroi des villes moyennes est patent. Le cas du Havre, évoqué par plusieurs sénateurs, est exemplaire, mais il procède d’un autre schéma : une convention d’occupation temporaire du domaine public permet au club de football de la ville d’exploiter l’équipement ; j’y reviendrai. Quant aux métropoles, aux régions et au Grand Paris, ils doivent eux aussi définir leur relation avec les clubs professionnels.

Monsieur Vanlerenberghe, vous avez parlé de « privatisation des bénéfices ». Je vous mets au défi de me dire quels clubs professionnels ont dégagé et réparti des bénéfices au cours des cinq dernières années : il n’y en a pas !

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