Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce débat sur les agences régionales de santé est très intéressant, car il soulève la question des besoins sanitaires de nos concitoyens et la façon dont on y répond au plus près des territoires.
Je salue donc l’initiative que vous avez prise, et je remercie MM. Le Menn et Milon pour la qualité de leur travail, dont personne ne s’étonnera, tant est grande leur connaissance des enjeux de santé. Dans leur rapport, ils mettent en lumière l’apport qu’a représenté la création des agences régionales de santé dans le pilotage de nos politiques de santé – cet apport est incontestable –, mais il montre aussi les limites de la réforme qui a été menée, liées notamment aux conditions de mise en place de ces agences. Ces limites, il convient aujourd’hui d’y apporter une réponse.
Pour engager la modernisation des agences régionales de santé, il nous faut avoir à l’esprit que leur création n’est pas tombée du ciel : elle est le fruit d’une histoire. Ces agences sont en effet les héritières d’un processus de régionalisation progressive de notre organisation des soins, qui a pris son essor en 1991 avec l’instauration des schémas régionaux d’organisation sanitaire et la mise en place des comités régionaux de l’organisation sanitaire et sociale. La création des agences régionales de santé, en 2009, a marqué une nouvelle étape dans cette démarche.
Depuis deux ans, le Gouvernement a mis les agences régionales de santé au service de la modernisation de notre système de santé. Leur rôle – je reviendrai tout à l’heure sur les réussites et les moindres satisfactions – est de renforcer la territorialisation et le décloisonnement de nos politiques.
C’est vrai, madame Cohen, que les agences régionales de santé ont un statut spécifique, y compris sur le plan administratif, mais, comme plusieurs orateurs l’ont dit, elles doivent à la fois décliner une politique nationale et répondre à une préoccupation territoriale. C’est bien cela leur spécificité, et je reviendrai ultérieurement sur les propos de M. Lenoir.
Selon moi, la question n’est donc pas de savoir si le statut doit être remis en cause. L’enjeu, c’est ce double objectif de mise en œuvre d’une politique nationale et de prise en compte des objectifs locaux. Nous devons nous demander si nous avons les meilleures chances de l’atteindre et si nous nous donnons les bons moyens pour y parvenir. Et si je souhaite l’élaboration d’une nouvelle loi, c’est parce que nous devons aller plus loin !
Pour remplir ces missions, les agences régionales de santé disposaient en 2013 d’un budget de fonctionnement de 1, 2 milliard d’euros et d’un budget d’intervention d’un peu plus de 3, 4 milliards d’euros, dont 3, 1 milliards d’euros au titre du Fonds d’intervention régional.
Derrière ces chiffres, il y a aussi des hommes et des femmes qui participent chaque jour à la mise en œuvre de la politique que je définis. Ainsi, les agences régionales de santé regroupent environ 9 000 agents – de 77 pour la Guyane à un peu moins de 1 200 pour l’Île-de-France –, selon la taille des agences et des territoires, pour accomplir des missions aussi diverses que la prévention, la veille et la sécurité sanitaires, la santé environnementale, la régulation de l’offre de soins de ville, l’encadrement et l’accompagnement de la politique hospitalière, l’organisation du secteur médicosocial, le suivi des professionnels de santé sur les territoires ou encore l’animation des instances de démocratie sanitaire, ces dernières permettant de recueillir les besoins des usagers.
Ainsi, ce sont des professionnels extrêmement divers qui s’engagent au quotidien : médecins, pharmaciens, ingénieurs du génie sanitaire, inspecteurs de l’action sanitaire et sociale, spécialistes de l’organisation de l’offre de soins, contrôleurs de gestion, … Venant de services de l’État ou de la sécurité sociale, ces professionnels ont des histoires et des parcours très différents, c’est ce qui fait la richesse du dispositif, mais c’est ce qui explique aussi les difficultés qu’ils peuvent rencontrer. Issus d’horizons divers et ayant des histoires administratives différentes, ces professionnels sont en effet confrontés à des statuts pluriels ; j’y reviendrai.
Grâce à ces équipes, à leur implication et à leur mobilisation, nous avons réalisé depuis deux ans des progrès importants. Je pense notamment au développement de la contractualisation entre les agences régionales de santé et les établissements de santé, au rôle d’impulsion des agences dans la mutualisation au service d’une meilleure prise en charge des patients.
Je veux rappeler, par exemple, que ce sont les agences régionales de santé qui ont porté la mise en œuvre du pacte territoire-santé, que j’ai présenté afin de lutter contre les déserts médicaux. Dans ce cadre, une attention particulière est portée à chaque territoire, en particulier à la Martinique, monsieur Antiste. C’est précisément parce qu’il existe une déclinaison régionale que nous avons prévu un bloc d’objectifs spécifiques pour l’outre-mer et les moyens qui permettront de les atteindre.
Je tiens à saluer l’action des agences régionales de santé, qui ont fait preuve d’un grand dynamisme pour la mise en place des bourses en direction des étudiants en médecine, en contrepartie de leur engagement à exercer dans des territoires sous-dotés. Elles ont également montré leur engagement pour le déploiement du dispositif, que le Parlement a adopté, en faveur des praticiens territoriaux de médecine générale, lequel vise à favoriser l’installation de jeunes professionnels dans ces territoires sous-dotés. Ce dispositif, plébiscité par les jeunes médecins, je l’ai reconduit pour 2014. À la fin de l’année, ce sont 400 nouveaux médecins, notamment des jeunes femmes, qui s’installeront dans nos territoires, en particulier en zone rurale.
Dans le cadre de ce pacte, se pose aussi la question de la coordination et de la prise en charge des interventions d’urgence. Monsieur Antiste, vous avez insisté sur l’organisation de la permanence des soins, à laquelle je suis très attentive. C’est bien parce que la permanence des soins doit être coordonnée qu’il faut veiller à la prise en charge des urgences.
Je sais, monsieur Lenoir, qu’il y a un enjeu autour de l’articulation entre les urgentistes médecins hospitaliers et les services départementaux d’incendie et de secours. Mon directeur de cabinet a reçu, aujourd’hui même, les responsables de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers. Je crois pouvoir dire qu’un dialogue constructif s’est engagé. Une méthode de travail commune au ministère des affaires sociales et au ministère de l’intérieur sera rapidement proposée pour traiter des questions liées à cet enjeu tout à fait fondamental.