… le débat, qui a eu lieu aussi au Sénat, portait sur le fait de savoir comment nous pouvions, pour reprendre l’expression consacrée à l’époque, en finir avec l’organisation « en silo ».
Nous devons constater que si la création des agences régionales de santé a permis de franchir une étape très importante dans la mise en place de ce décloisonnement, nous ne sommes pas allés au bout du chemin. Cela tient notamment au financement de chacune des missions qui existent aujourd'hui. Nous devons donc aller plus loin – M. Mézard l’a également souligné.
Je maintiens l’analyse que je faisais à l’époque : les agences régionales de santé, telles qu’elles nous étaient alors proposées, relevaient davantage d’une logique administrative que de la volonté de construire des projets de santé et de décloisonner. Je le répète, en matière de décloisonnement, nous devons aller plus loin.
Pour autant, j’ai toujours soutenu la régionalisation des politiques de santé, mais à condition qu’elle se fasse dans un cadre national. Je rappelle que j’avais voté pour la mise en place des agences régionales de santé.
J’entends bien ici les questions qui se posent sur la place des différents acteurs de santé, comme celle des professionnels libéraux en lien avec la permanence des soins ou celle des hôpitaux locaux, dont M. Vall a parlé. Je veux d’ailleurs lui rappeler, même s'il le sait très bien, que le Parlement a voté dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale une adaptation de la tarification à l’activité pour permettre la prise en considération de facteurs spécifiques, avec la mise en place d’une tarification pour les parcours de soins au sein de l’hôpital – dont j’indique à Mme Cohen qu’elle me semble très importante pour prendre en compte la spécificité du service public hospitalier – et un financement particulier en direction de certains établissements.
Pour ma part, je considère que les hôpitaux locaux sont un maillon indispensable de la prise en charge dans nos territoires. Comment demander à des professionnels libéraux de s'installer dans les territoires ruraux si, dans le même temps, nous ne permettons pas le déploiement des actions et des missions des hôpitaux locaux ?
Par ailleurs, le rapport aborde le sujet du pilotage national des agences. Il existe en effet un enjeu fort d’animation et de cohérence du réseau des agences régionales de santé. En 2013, j’ai donc fait le choix de créer un poste de secrétaire général adjoint du ministère des affaires sociales, ainsi qu’un poste de chef de service. Il leur revient d’assurer le pilotage de la stratégie nationale de santé et des agences régionales de santé. Cela permet une meilleure articulation du travail des ministères sociaux.
Monsieur Le Menn, je partage votre souci de conforter le conseil national de pilotage ; cette instance, unique dans notre paysage administratif, a changé les modes d’action des administrations publiques. Vous avez exprimé des insatisfactions ou des impatiences au sujet de cette structure de pilotage, mais reconnaissez que, par rapport à ce qui existe dans le reste de l'administration, elle constitue une avancée importante.
Plus largement, le projet de loi de santé publique contiendra des dispositions concrètes afin de prendre acte de l’implantation durable des agences régionales de santé dans nos territoires.
J’en viens maintenant à la question des missions confiées aux agences régionales de santé. Ces missions, nombreuses, je l’ai dit, il ne s'agit pas de les opposer entre les unes aux autres. Je souscris donc à votre recommandation, monsieur le sénateur, de stabiliser le champ actuel des missions des agences régionales de santé.
Je partage aussi votre préoccupation de donner aux agences régionales une feuille de route claire et de concentrer leur travail sur les missions à plus forte valeur ajoutée pour la bonne organisation de notre système de santé. Je souhaite – je réponds ainsi à Mme Archimbaud – qu’elles fassent de la réduction des inégalités en matière de santé non pas un nouvel axe, mais un principe directeur de leur action, afin que cet objectif soit mieux atteint qu’il ne l’est aujourd'hui.
J’ai souhaité que les futurs contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens entre l’État et les agences régionales de santé, qui seront préparés à la fin de l’année 2014, permettent de mieux cadrer les orientations stratégiques et opérationnelles fixées aux agences. Parallèlement, un programme de remise à plat des missions des agences régionales de santé, servant d’appui à la simplification et à la transformation des processus de travail, est piloté par le secrétariat général. Je serai particulièrement attentive à la réussite de la démarche.
Nous devons également renforcer la capacité des agences à innover. Pour cela, il nous faut leur donner des marges de manœuvre. C’est la raison pour laquelle j’ai modernisé, assoupli et abondé le Fonds d’intervention régional à hauteur de 3, 4 milliards d’euros. J’ai également assoupli son périmètre et je lui ai donné une plus grande visibilité institutionnelle, notamment à l’égard du Parlement. En effet, le Fonds d’intervention régional constitue désormais un sous-objectif à part entière de l’ONDAM, voté pour la première fois dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, à hauteur de 3, 2 milliards d’euros, auxquels il convient d’ajouter les crédits de l’État et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ce qui explique le total de 3, 4 milliards d’euros. En outre, j’ai mis en place un groupe de travail pour examiner la recommandation qui est faite dans le rapport d’un transfert aux agences régionales de santé de la gestion administrative du Fonds d’intervention régional.
Comme le souligne le rapport, un autre défi majeur pour les agences régionales de santé est celui du dialogue social et de la gestion des ressources humaines. Comme je l’ai indiqué précédemment, les agences régionales de santé payent aujourd'hui, si j’ose dire, les conséquences des regroupements trop rapides entre agents de l’État et salariés de l’assurance maladie. C’est ce qui explique les différences de statuts et de conditions de travail.
Il était urgent de rétablir la confiance avec ces agents. J’ai donc donné aux directeurs généraux de nouvelles orientations pour leur gestion du personnel, en recommandant un circuit de veille et de suivi des situations difficiles. J’ai aussi insisté sur leur rôle de management et préconisé une réflexion sur l’organisation du travail et sur les conditions de travail. Enfin, j’ai demandé à la direction des ressources humaines de mon ministère de préparer un plan d’action, qui fera l’objet de discussions avec les organisations syndicales d’ici à la fin de l’année.
Il s’agit également de fluidifier les parcours professionnels. Le secrétaire général a engagé des travaux en ce sens pour apporter des réponses aux agents qui veulent diversifier leur carrière. Un groupe de travail sur les parcours professionnels entre agences régionales de santé et caisses de sécurité sociale est en cours d’installation.
Quant au dialogue social, j’ai tenu à ce qu’il soit consolidé. Les directeurs généraux en sont les garants au sein de leur établissement. Sur la base de mes orientations, ils veilleront encore davantage à placer le dialogue social au cœur de la vie des agences régionales de santé. D’ores et déjà, je voudrais insister sur la mobilisation de ces dernières, à travers la signature d’accords locaux.
Enfin, nous devons renforcer la gouvernance des agences et franchir une nouvelle étape dans l’approfondissement des droits des malades.
En matière de gouvernance, les agences régionales de santé ont besoin de stabilité. Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à une recomposition en profondeur du conseil de surveillance. En revanche, le rapport et plusieurs interventions témoignent de la préoccupation de renforcer la relation entre les directeurs généraux des agences régionales de santé et les élus. Cette préoccupation, je la fais mienne. Je suis en effet convaincue du caractère décisif de l’implication des collectivités territoriales pour la réussite des politiques de santé : je pense aux actions mises en œuvre dans le cadre des contrats locaux de santé, par exemple sur l’obésité ou le dépistage organisé des cancers ; je pense aussi à l’action des collectivités en faveur de l’autonomie des personnes ou du soutien des malades, qu’il s’agisse de programmes d’aides à la mobilité ou de services à domicile. Ainsi, la loi de santé publique facilitera la reconnaissance des responsabilités prises par les collectivités territoriales au service des politiques de santé dans les territoires.
Concernant la réforme territoriale, je veux rassurer M. Lenoir, ainsi que tous les élus qui s’inquiètent.