Intervention de Bertrand Bakaj

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 11 juin 2014 : 1ère réunion
Archéologie préventive — Table ronde

Bertrand Bakaj, membre du Syndicat national des professionnels de l'archéologie :

Notre syndicat avait déjà rencontré M. Jacques Legendre, il y a quelques années pour évoquer les questions relatives au rôle des opérateurs privés de l'archéologie préventive.

Pour revenir au projet de loi sur les patrimoines, sujet dont nous nous sommes quelque peu écartés, je partage l'exigence de qualité pour l'ensemble des opérateurs. Je m'étonne, en revanche, des demandes récurrentes de nouvelles normes en matière sécuritaire et environnementale, dans un contexte où le code du travail comme la convention collective applicable aux bureaux d'études apparaissent particulièrement contraignants en la matière. Les normes existent déjà même si, je vous l'accorde, leur application gagnerait à être mieux suivie et contrôlée.

Depuis la loi de 2003, se sont développées plusieurs structures privées dont certaines ont, depuis lors, disparu à défaut d'avoir mis en oeuvre les moyens de mener efficacement leurs missions. J'avais évoqué ce risque à l'époque de la rédaction du Livre blanc : il est facile de fouiller un site, il l'est moins de rédiger des rapports. De fait, a contrario du risque de prolifération d'opérateurs privés évoqué par l'Assemblée nationale lors des débats de 2003, on observe une régulation du marché et une stabilisation du nombre de ces opérateurs à une petite vingtaine. Je partage donc le sentiment exprimé par M. Thomas Vigreux s'agissant de la maturité progressivement atteinte par le système mis en place en 2003. Ne modifions donc pas inutilement la législation, hormis sur quelques adaptations mineures et consensuelles, notamment pour ce qui concerne le mobilier archéologique.

Enfin, s'agissant des problématiques scientifiques, je ne peux que constater que les exigences demandées en la matière aux opérateurs privés ne sont pas logiquement suivies de la participation de ces derniers aux instances scientifiques de l'archéologie préventive. À titre d'exemple, et comme le proposait pourtant dès juillet 2011, le rapport « Archéologie préventive : pour une gouvernance au service de la recherche » de MM. Pierre Bordier et Yves Dauge, il conviendrait qu'un représentant des opérateurs privés soit membre de droit du CNRA. Il me semblerait également utile que nos salariés, dont le niveau de qualification est identique à celui des archéologues en poste à l'INRAP ou dans les collectivités territoriales, soient autorisés à intégrer des unités mixtes de recherche (UMR) mais également à bénéficier de jours homme/recherche dans le cadre de projets d'activités scientifiques (PAS). Sur ce point, je regrette que, dans sa lettre adressée à M. Garcia en date du 23 octobre dernier, Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, se montre si réservée sur l'intégration d'archéologues salariés des opérateurs privés comme membres de droit des UMR, cette position me semblant contraire aux qualités scientifiques exigées de ces mêmes archéologues.

S'agissant des blocages évoqués, ils m'apparaissent en réalité procéder plus de problèmes de personnes que du système lui-même, même si ce dernier peut, à certains égards, sembler conservateur. Peut-être un renouvellement générationnel permettra-t-il de lever les quelques obstacles constatés ? Il est exact, en revanche, qu'après l'embellie économique des années 2006 à 2008, le marché de l'archéologie préventive connait une contraction préoccupante. Les opérations sont moins nombreuses et chaque structure répond à l'ensemble des appels d'offres, concurrence effrénée qui génère craintes et crispations. Toutefois, si le marché de l'archéologie préventive connaissait un nouveau regain, il conviendrait de le réguler : les opérateurs privés pourraient alors constituer d'utiles variables d'ajustement dans un contexte où l'INRAP, comme les collectivités territoriales, voient leurs effectifs contraints.

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