Intervention de Marc Drouet

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 11 juin 2014 : 1ère réunion
Archéologie préventive — Table ronde

Marc Drouet, sous-directeur de l'archéologie au ministère de la culture et de la communication :

Le pillage est malheureusement une réalité mais le ministère en fait une de ses priorités d'action dans la lignée du rapport du CNRA de 2011. Nous entreprenons parallèlement des actions pédagogiques et répressives.

Les actions pédagogiques tiennent compte du fait que le pillage est fréquemment dû à des utilisateurs de détecteurs de métaux. La loi oblige le vendeur de ces instruments à rappeler leur condition d'utilisation. En particulier, il est interdit de s'en servir pour des fouilles archéologiques sans autorisation préalable. L'encadrement de l'utilisation est donc sévère mais force est de constater le décalage entre les possibilités laissées aux détenteurs de détecteurs de métaux et le nombre de ventes de ces instruments réalisées chaque année. Une association d'utilisateurs a d'ailleurs saisi la Commission européenne d'un recours contre la loi française qu'elle considère contraire aux règles du marché intérieur. La défense du ministère repose sur le principe bien stabilisé que la liberté d'achat est garantie mais que la loi peut encadrer l'utilisation. Il y a bien un besoin d'explication et de pédagogie ; c'est pourquoi le ministère de la culture a publié des plaquettes synthétiques qu'il diffuse régulièrement.

En fait d'action pénale, le ministère de la culture a entrepris une sensibilisation des services de police et de gendarmerie ainsi que des douanes. Un agent du ministère est affecté spécialement aux relations avec ces services et travaille avec l'office spécialisé en la matière. La sensibilisation concerne également les magistrats grâce à des formations dispensées à l'école nationale de la magistrature. Il est essentiel que l'appareil judiciaire comprenne la nécessité de poursuivre les infractions à la législation sur le patrimoine.

J'ai personnellement été entendu comme expert dans une affaire jugée par le tribunal de Melun. En collaboration avec les douanes et la gendarmerie, nous étions parvenus à débusquer un réseau très organisé. En remontant la filière, nous avions réussi à saisir un butin colossal de pièces de l'époque du bronze dont le total excédait la collection exposée au musée national d'archéologie de Saint-Germain-en-Laye. Beaucoup avaient pourtant déjà été écoulées sur Internet. C'est la raison pour laquelle nous exerçons une veille sur les sites et que nous envoyons systématiquement un courrier aux responsables dès que nous observons une vente en ligne suspecte. Il est clair que les opérateurs ne connaissent pas la législation sur le patrimoine, mais ils sont en général très réceptifs à nos demandes.

Outre la question du pillage c'est le régime de propriété des vestiges qui occupe particulièrement les services du ministère ces temps-ci. Ce régime est en effet très éclaté puisqu'il faut distinguer entre les vestiges mobiliers et immobiliers, entre les produits d'une fouille préventive d'une fouille délibérée et d'une découverte fortuite, ainsi qu'entre les recherches maritimes et terrestres. Nous avons l'ambition de rassembler ces différents régimes au sein d'un nouveau cadre unifié et refondu. En tout état de cause, il nous faudra respecter la Constitution, les normes communautaires et le code civil. C'est une tâche très ardue ; l'objectif est bien de pouvoir établir la propriété de l'État, en conservant la faculté, pour les collectivités territoriales, de disposer des objets pour les présenter au public et en faisant obligation aux éventuels propriétaires privés de contribuer financièrement à la conservation des sites. Comme exemple de gestion privée, j'aimerais donner l'exemple remarquable de la grotte des trois frères qui présente des conditions de visite et de conservation excellentes.

La réunion est levée à 12 heures.

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