Je vais essayer de vous convaincre, mon cher collègue.
Pourquoi supprimer cette superposition ?
Le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance est une instance très formalisée, qui doit être présidée par des personnes aux fonctions clairement définies. Si se superpose un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance, les mêmes personnes n’assureront jamais la présidence de toutes les sessions. Ce ne seront que des espèces de grands-messes, fonctionnant de façon bancale.
Mieux vaut un seul conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance qui, sur un territoire rationnellement défini, veillera à l’organisation et à la répartition des moyens, s’informera sur l’évolution des formes de la délinquance et sur ses glissements géographiques. Ensuite, si sa trop grande taille le justifie, il confiera à des commissions infra-intercommunales, qui ne seront pas forcément présidées par le président de l’EPCI, le procureur ou le préfet, le travail de terrain effectif et opérationnel. C’est ce niveau de relation et de travail qui est efficace. Cela suppose de faire remonter les informations au conseil intercommunal, échelon de l’organisation, afin de faire le point sur l’évolution de la délinquance en termes tant de géographie que de nature.
Je suis tout à fait d’accord avec ceux qui disent que l’intercommunalité, l’EPCI, n’est pas forcément l’échelon de l’action efficace, mais c’est bien l’échelon de l’organisation, de la répartition des moyens et de la transmission des informations générales.
Telle est la raison fondamentale pour laquelle nous ne souhaitons pas que ces deux niveaux se superposent.
Les conventions de coordination, qui régissent à cet égard les rapports entre l’État et les collectivités territoriales, nous semblent primordiales. La commission est allée encore plus loin que ne le souhaitaient François Pillet et René Vandierendonck, proposant une réciprocité et une égalité de pouvoir de décision en la matière, chaque fois que c’était possible et jusqu’au maximum des possibilités.
Nous souhaitons que ces conventions de coordination se généralisent. Néanmoins, nous ne voulons pas bousculer les petites communes rurales qui n’avaient, hier, qu’un seul garde champêtre et qui auront, demain, un policier territorial. Elles risqueraient, en plus, de devoir conclure une convention de coordination, alors que ni le travail de nuit ni l’armement ne sont nécessaires dans ces territoires ruraux.
Incitons les communes ou les intercommunalités à conclure ces conventions de coordination, mais n’allons pas trop vite ! Laissons-leur le temps de souffler et d’avoir besoin d’utiliser leurs policiers territoriaux au maximum de leurs compétences.
Autrement dit, les conventions de coordination telles que nous les proposons seront obligatoires dès lors que les agents de police territoriale devront travailler de nuit, être armés ou mener des actions communes avec la police nationale ou la gendarmerie.
Je le répète, nous devons inciter fortement les collectivités à suivre cette voie, mais il convient de ne pas précipiter les choses et de laisser du temps avant de rendre les conventions obligatoires.
J’évoquerai les mesures supplémentaires relatives aux fichiers.
Les policiers territoriaux doivent avoir un accès direct aux fichiers lorsque cela est indispensable à l’exercice de leurs seules missions et dans le cadre de leurs seules attributions. Telle est la position de la commission des lois.
Nous devons aussi prévoir, s’agissant des conventions de coordination, les modalités de transmission des informations. Il arrive en effet que la police nationale et la gendarmerie soient quelque peu réticentes quant à la transmission des informations dont elles estiment qu’elles relèvent de leur pré carré. C’est humain, c’est légitime. Nous devons donc les inciter à instaurer davantage de coordination et un réel partenariat. Les uns ne doivent pas être les supplétifs ou les subordonnés des autres !
En matière de centres de surveillance urbaine, nous vous proposons essentiellement, là encore, de former les opérateurs, car c’est une nécessité.
Je ne parlerai pas des brigades vertes du Haut-Rhin, sachant que Catherine Troendlé, qui y est très attachée et qui connaît le sujet sur le bout des doigts, ne manquera pas de l’évoquer.
S’agissant des tenues, les textes prévoient qu’elles doivent permettre de distinguer parfaitement policiers municipaux, policiers nationaux, ASVP et ATPM. Or, selon de très nombreux témoignages concordants, y compris le mien, il s’avère que les uniformes et les véhicules se ressemblent tous. Peut-être ce texte et les décrets qui vont suivre donneront-ils l’occasion de mettre un terme à la confusion…
Je sais que le volet social relève non pas de la loi mais du règlement. Je vous ferai néanmoins part, monsieur le ministre, de quelques réflexions que nous avons entendues et sur lesquelles nous aimerions connaître votre avis. Sur deux points, la commission n’a pas trouvé de solution, mais elle considère que les remarques émises par certains syndicats sont assez justifiées.
Le premier sujet concerne les détachements des policiers nationaux ou des gendarmes vers la police municipale, lesquels concernent presque exclusivement des postes d’encadrement. Ces postes sont pourtant peu nombreux à être proposés aux policiers territoriaux, et ceux-ci en retirent un sentiment d’injustice, éprouvant même une certaine amertume.
Le deuxième sujet est le contingentement de certains indices, en matière de carrière des policiers territoriaux, au bénéfice des collectivités de 10 000 habitants. Autant le contingentement et la nécessité d’exercer des responsabilités pour atteindre ces indices nous semblent normaux et naturels, autant nous pensons qu’ils ne sont pas forcément liés à la taille de la commune. Sans doute faudrait-il plutôt les lier à l’exercice effectif de responsabilités, sous l’autorité du maire, qui est leur employeur, ou éventuellement à une taille de brigade de police municipale, mais non pas à la taille de la ville.
Certaines communes de 10 000 habitants peuvent n’avoir que deux ou trois policiers municipaux, voire aucun, quand d’autres, de 5 000 ou 6 000 habitants, disposent d’une véritable brigade de policiers municipaux qui exercent toutes les fonctions et missions attachées à leur statut.
Telles sont les questions sur lesquelles, même si elles ne relèvent sans doute pas du domaine législatif, la commission des lois souhaitait appeler votre attention, monsieur le ministre.
L’amendement n° 90 nous étant parvenu trop récemment, vous comprendrez que je n’aie pas eu le temps d’en faire une synthèse précise et parfaite. Nous y reviendrons au cours de la discussion des articles.
En tout état de cause, la commission des lois a émis un avis très favorable sur cette proposition de loi, qui a fait en son sein l’objet d’un large consensus. §