Il faut également saisir l’opportunité qu’offre cette proposition de loi pour exiger des opérateurs le professionnalisme qui s’impose aux acteurs d’une tâche aussi stratégique. Il est ainsi proposé que l’exercice de ces missions soit subordonné à l’accomplissement d’une formation préalable, disposition à laquelle le Gouvernement est tout à fait favorable.
La proposition de loi, dans la mesure où elle entend, à travers les conventions de coordination, renforcer et rénover les relations entre les polices municipales et les forces de sécurité nationales, contribue également à l’émergence de nouvelles formes de coopération sur le terrain entre les différents acteurs de la sécurité, ce qui constitue également une excellente mesure. J’en suis convaincu, la notion de « coproduction » de la sécurité doit structurer notre approche de la sécurité dans les territoires et je place d’ailleurs cette préoccupation au cœur de mon action au ministère de l’intérieur.
L’expérience prouve que la signature d’une convention de coordination, à condition bien sûr qu’on lui donne vie et qu’on en assure un suivi attentif, est le meilleur moyen de parvenir à une complémentarité efficace des forces de sécurité. C’est là l’un des piliers de la lutte contre l’insécurité.
Mme la rapporteur a d’ailleurs souhaité abaisser à quatre agents le seuil au-delà duquel une convention de coordination est obligatoire. Je m’en réjouis, car nous savons tous que ce document constitue un outil pour le maire, qui peut y préciser les missions qu’il entend confier à sa police municipale, décliner la doctrine d’emploi pour mieux centrer son action sur son cœur de métier, à savoir la tranquillité publique.
Le ministère de l’intérieur veillera à faciliter la tâche des petites communes qui souhaiteront signer ces conventions en faisant élaborer par ses services des conventions types tenant compte des caractéristiques locales, qu’il s’agisse de stations balnéaires, de villages de montagne ou de bourgs ruraux. Ce pourra être un outil utile aux maires des collectivités concernées. Il s’agit non pas de les enfermer dans des normes trop contraignantes qui ne correspondraient pas à la spécificité de leur territoire, mais de leur offrir au contraire un cadre facilement adaptable et, par conséquent, de nature à leur permettre d’élaborer facilement les textes conventionnels qu’ils souhaitent mettre en œuvre.
En revanche, je l’ai déjà dit aux auteurs de la proposition de loi et à Mme la rapporteur, je suis très réservé sur la proposition de faire signer le projet de convention de coordination par le procureur de la République. Je préfère le dispositif de transmission du projet de convention pour avis, qui est actuellement en vigueur.
En effet, ce dispositif sauvegarde une flexibilité de la procédure d’élaboration et ménage le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, principe très important pour les juges comme pour les acteurs publics et administratifs.
Cependant, il est souhaitable de prévoir la mise en place d’une instance de pilotage qui, elle, associerait le maire, le préfet et le procureur, une fois la convention de coordination signée. Il ne s’agit pas pour moi de laisser de côté le procureur de la République, acteur dont on a grandement besoin. Je me souviens d’avoir toujours veillé, quand j’étais maire, à associer étroitement le procureur de la République à nos démarches, que ce soit au sein des groupes locaux de traitement de la délinquance ou eu égard à la convention police municipale-police nationale que nous avions signée.
Par conséquent, pour le confort tant des procureurs de la République que des maires, il faut que l’association des procureurs de la République au dispositif de pilotage n’aille pas jusqu’à l’agrément ou à la signature de la convention par eux.
Je tiens également à souligner que, si les conventions supposent des engagements réciproques de la part des signataires, il n’est en revanche pas possible que la police et la gendarmerie nationales précisent la nature et les lieux de leurs interventions. En effet, l’organisation des forces de sécurité intérieure, lesquelles ont vocation à intervenir sur tout le territoire qu’elles couvrent, ne permet pas de répondre à cette demande.
En outre, comme le savent bien ceux d’entre vous qui exercent des responsabilités locales, l’assiette territoriale d’un commissariat de police ou plus encore d’une unité territoriale de la gendarmerie se compose de plusieurs communes, ce qui rend la mise en œuvre de ce dispositif complexe. Cette organisation ne permet donc pas un engagement « contractualisé » sur une seule commune, car le service doit être adapté dans le temps et l’espace en fonction de l’analyse d’une situation à un moment donné.
En vous mettant ainsi en garde, j’exprime ma préoccupation de faire en sorte que les territoires conservent des forces de sécurité vraiment efficaces, en leur permettant de se déployer à tout moment là où sont les urgences, sans que l’évocation de cette convention, qui n’a qu’un périmètre municipal, puisse venir contrarier la relation entre les maires et les préfets, les maires pouvant se réclamer de la convention pour regretter que les gendarmes ne soient pas là au moment où ils l’auraient souhaité et les préfets pouvant justifier de l’urgence ou de la priorité qui apparaît à un moment donné en tel ou tel point du territoire pour expliquer l’affectation de gendarmes ou de policiers à cet endroit.
Ce ne sont pas davantage les conventions de coordination qui doivent préciser les modalités d’accès des agents de police municipale aux traitements de données personnelles. Ces modalités sont approuvées par décret ou arrêté, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Un important travail a été entrepris sur ce point par le comité de pilotage chargé du dossier des polices municipales au sein du ministère de l’intérieur. Il sera complété par celui d’un groupe de réflexion, émanation de la commission consultative des polices municipales. Il s’agit en effet de préciser les conditions juridiques et techniques dans lesquelles les policiers municipaux pourraient avoir, le cas échéant, un accès direct à certains fichiers en vue d’obtenir des informations utiles à l’exercice de leurs missions.
Il convient de concevoir des procédures d’authentification de l’appelant, de définir le spectre des informations accessibles et de veiller à l’exercice d’un réel contrôle de l’officier de police judiciaire, comme cela est exigé par le Conseil constitutionnel.
Je sais que nous aurons à en débattre plus précisément au cours de l’après-midi, mais je tiens néanmoins à dire d’emblée mon attachement à la dénomination actuelle de « police municipale ».