Ce n’est pas la première fois que nous avons l’occasion d’intervenir sur ce sujet, puisque nous procédons de la sorte chaque fois qu’un texte de même nature que la présente proposition de loi est examiné.
Les armes de catégorie B regroupent notamment les lanceurs de balle de défense, dont certains sont commercialisés sous le nom « Flash-Ball », et les pistolets à impulsion électronique, souvent appelés « Taser » du nom du principal fabricant.
Leur utilisation est censée permettre une riposte graduée et proportionnée à des situations dangereuses, mais, dans de nombreux cas, la question de la proportionnalité des moyens utilisés par la police a été au cœur des polémiques. Si ces armes permettent d’éviter le recours incomparablement plus dangereux aux armes à feu, la multiplication des incidents met à jour leur dangerosité et leur banalisation, alors même qu’elles sont employées comme moyens offensifs pour la dispersion des attroupements et manifestations.
La multiplication de drames entraînant parfois la mort a suscité des réactions et des interrogations, particulièrement de la part de nos institutions.
Saisie au mois juillet 2009, afin de procéder à une enquête sur un incident survenu le 8 juillet précédent au cours duquel un homme, atteint par un tir de Flash-Ball, avait perdu l’usage d’un œil, la Commission nationale de déontologie de la sécurité avait noté que « même si le tireur respecte les prohibitions et injonctions exprimées dans la doctrine d’emploi technique, l’utilisation d’une telle arme à plus de sept mètres et, plus encore de nuit, par des hommes casqués, sur des cibles mobiles, sans prendre de visée précise, est susceptible d’occasionner de graves blessures ». C’est une « probabilité qui confère à cette arme un degré de dangerosité totalement disproportionné au regard des buts en vue desquels elle a été conçue ». La commission recommandait alors « de ne pas utiliser cette arme lors de manifestations sur la voie publique, hors les cas très exceptionnels qu’il conviendrait de définir très strictement ».
Au mois de septembre 2010, le Conseil d’État a ordonné la suspension de l’utilisation par la police municipale des pistolets à impulsion électrique, estimant qu’ils avaient été introduits en l’absence de formation et de garanties adéquates.
Le 4 mai 2012, le Défenseur des droits s’inquiétait à son tour « des problèmes soulevés par l’utilisation de cette arme par les forces de l’ordre ». Son rapport, rendu en mai 2013, fait état de plusieurs affaires ayant donné lieu à condamnation judiciaire, dont la plus récente a été prononcée contre l’État par le tribunal administratif de Paris, le 17 décembre 2013, après la blessure de Clément Alexandre par une balle de défense tirée par un policier lors de la fête de la musique à la Bastille, le 21 juin 2009.
Il nous revient aujourd'hui de réagir et d’encadrer strictement toutes les formes d’utilisation de ces armes, afin de prévenir les dérives et les risques concernant leur utilisation. Cela nous paraît essentiel à la protection de la liberté de manifestation et d’expression des mouvements sociaux.
La présente proposition de loi traite indirectement de la question de l’armement des polices municipales. Son examen est l’occasion de revoir notre législation sur ce point, en commençant par instaurer un moratoire sur l’utilisation et la commercialisation de ces armes, ce qui laisserait le temps d’évaluer la pertinence de leur utilisation dans l’exercice du maintien de l’ordre public.
D’ores et déjà, nous estimons qu’il faudrait interdire leur utilisation par toutes les polices et la gendarmerie contre des attroupements ou manifestations.