Quand on n’accuse pas la loi de laxisme, on s’en prend aux juges ! C’est toujours le même discours qui revient quand le système ne fonctionne pas ! Où est le laxisme dans le cas de Monsieur B. ? Non, il s’agit non pas d’un texte laxiste, mais d’un texte lucide, qui se fonde sur un vrai diagnostic de la délinquance et de la récidive et s’attaque à la réelle cause des échecs.
C’est un projet de loi en cohérence, cela a été rappelé tout à l’heure, avec un certain nombre d’autres textes que nous avons adoptés ici, au Sénat, avec un certain nombre de positions que nous avons prises ici même, quelles que soient d’ailleurs les travées sur lesquelles nous siégeons.
Ce texte vise à prévoir un suivi efficace des détenus au moment de leur sortie de prison. C’est un texte de courage, parce qu’il faut du courage et de la pédagogie pour tenir un discours de vérité auprès du grand public. Il faut du courage pour expliquer que la dissuasion ne repose pas sur le quantum des peines, que tous les délinquants sont persuadés qu’ils ne seront pas pris. Chaque fois que Monsieur B. a pris le train, il pensait qu’il ne serait pas contrôlé.
Il faut du courage pour rappeler que toute peine, quelle qu’elle soit, a une fin. Il faut donc que les conditions soient réunies pour que la personne sanctionnée, une fois sa peine effectuée, puisse repartir sur ses deux jambes, sur un autre chemin.
Il faut du courage pour affirmer que la dissuasion ne suffit pas, aussi bien pensée soit-elle. Il faut aussi de la persuasion, pour convaincre qu’une autre voie, une autre vie que celle offerte par la délinquance est possible. Il faut du courage pour affirmer qu’il convient de chercher l’inclusion et non l’exclusion, même si l’enfermement peut être nécessaire dans certains cas, pendant un moment donné.
C’est un texte d’innovation et de confiance envers les professionnels de la justice, les magistrats et les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire. Il se fonde sur les expériences déjà menées par certains de nos voisins.
C’est un texte d’innovation : il permet en effet de sortir du raisonnement ayant si longtemps prévalu, selon lequel l’augmentation des peines suffit à faire diminuer la délinquance. On l’a vu tout au long de la soirée, ce paradigme est aujourd'hui battu en brèche.
Bien sûr, on peut affirmer que ce texte est destiné à faire sortir les gens de prison. Tel n’est pourtant pas le cas ! Aux yeux de mon groupe, un projet politique ne se contente pas de chiffres, et ne traite pas les êtres humains comme des numéros. Un projet politique, c’est un vrai projet, qui vise à faire diminuer la délinquance, à lutter contre la récidive, à réinclure et à réinsérer des personnes qui, à un moment donné, ont enfreint la loi.
Bien évidemment, si l’adoption de ce texte avait pour conséquence de vider les prisons, ce serait une saine conséquence, ne serait-ce que parce qu’elles seraient ainsi rendues plus dignes, plus efficaces, plus utiles à la société. Selon moi, les prisons françaises sont aujourd'hui la honte de notre République.
Ce projet de loi ne nie pas les évidences. Oui, la récidive existe et existera. Non, nous ne parviendrons jamais à un taux de récidive ni à un taux de délinquance de 0 %. La récidive est une rechute qui ne signifie pas la perte de tout espoir. Voyez, sur ce sujet, le parcours de Yazid Kherfi, qu’il décrit lui-même dans ses livres. Il a récidivé plusieurs fois avant de se sortir définitivement de la délinquance et de devenir éducateur en milieu carcéral, afin d’aider des jeunes à sortir eux aussi de la délinquance.
Quant à nos prisons, elles sont aujourd'hui une école de l’humiliation. Or l’humiliation n’a jamais été la bonne porte de sortie de la délinquance.
Ce projet de loi, qui comporte quatre grands points, vise à créer une nouvelle peine, la contrainte pénale. Ne mentons pas en y associant le terme de crime, qui est si mal compris par nos concitoyens. Un crime n’est pas un homicide ! Un crime, dans notre code pénal, c’est une certaine catégorie d’infractions. L’existence de la contrainte pénale ne signifiera pas que les personnes ayant commis un homicide n’iront pas en prison ! Tenons ce discours de vérité.
Pour résumer, ce texte tend à créer une nouvelle peine, à proscrire toute sortie sèche et à prendre en compte la place des victimes, même si celles-ci ne doivent pas être au centre du procès pénal. Parce que des moyens sont prévus – le Gouvernement s’y est engagé, et je lui fais confiance –, ainsi qu’une évaluation de la loi, qui fera office de juge de paix en 2017, la prévention de la récidive connaîtra des victoires, j’en suis intimement persuadée.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe socialiste soutiendra ce projet de loi. §