Intervention de Gilbert Barbier

Commission des affaires sociales — Réunion du 25 juin 2014 : 2ème réunion
Conséquences de la crise économique sur le système de protection sociale espagnol — Compte rendu de la mission d'information

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

La crise a également conduit le Gouvernement à préciser les modalités de gouvernance et de régulation des finances publiques et sociales.

La prise en charge des besoins de financement de la sécurité sociale - dont les pensions de retraite constituent la grande majorité des dépenses - fait intervenir un fonds de réserve de la sécurité sociale institué en 1997 dans la continuité du Pacte de Tolède qui, signé par toutes les forces politiques et sociales du pays, visait à établir une feuille de route pour garantir la soutenabilité des prestations sociales. Il a été décidé en 2003 que l'utilisation de ce fonds serait réservée au financement des pensions contributives et qu'il ne pourrait être mobilisé qu'à hauteur de 3 % au maximum du montant des pensions contributives.

Pour faire face à la persistance des difficultés financières et assurer le financement des pensions, l'application de cette limite a été suspendue pour les années 2012, 2013 et 2014 dans le cadre d'une loi organique qui oblige les administrations de sécurité sociale à maintenir leurs comptes à l'équilibre ou en excédent. Si cette obligation n'est pas remplie, le déficit maximum autorisé pour l'administration centrale est minoré à hauteur du déficit enregistré par la sécurité sociale. Le Gouvernement a ainsi été autorisé à disposer du fonds de réserve dans la limite du montant du déficit de la sécurité sociale. En 2012 et 2013, 18,6 milliards d'euros ont été mobilisés pour financer le déséquilibre des comptes sociaux. Fin 2013, le niveau du fonds de réserve atteignait 53,7 milliards d'euros.

La loi organique de 2012 fixe également les conditions dans lesquelles les communautés autonomes doivent respecter un objectif global de déficit et de dette publics, notamment pour leurs dépenses de santé.

L'adoption de ce nouveau cadre de gouvernance et de ces nombreuses réformes structurelles, qui se traduisent par des critères d'éligibilité plus stricts pour l'accès à un grand nombre de dispositifs, ont mécaniquement amoindri le rôle d'amortisseur et de stabilisateur joué par les dépenses de protection sociale.

La profondeur et la durabilité de la crise ainsi que l'ampleur des efforts d'assainissement ont conduit à une très forte dégradation de la situation sociale. Les associations que nous avons rencontrées (Caritas, la Croix Rouge, le Mouvement pour la paix) ont de manière unanime - et sans surprise hélas - alerté sur le nombre sans cesse croissant de personnes en situation de précarité, voire de pauvreté.

L'une des manifestations les plus visibles des difficultés rencontrées est sans doute la dégradation du marché du travail. Entre 2008 et 2013, le taux de chômage espagnol est en effet passé de 8 % à 27 %, ce qui correspond à une augmentation de 4,3 millions du nombre de demandeurs d'emploi. Les jeunes générations sont particulièrement touchées puisque le taux de chômage des 20-24 ans s'élevait à 49 % en 2012 contre 17 % en 2007.

Entre 2007 et 2009, un million de personnes supplémentaires ont basculé sous le seuil de pauvreté selon l'enquête sur les conditions de vie de l'Institut national de la statistique espagnol (INE). Le taux de pauvreté atteignait près de 21,8 % en 2011 contre 14 % en France et 17 % en moyenne dans l'Union européenne. Le nombre de travailleurs pauvres est estimé à 940 000. Le Mouvement pour la paix demeure en outre particulièrement préoccupé par l'importance de la pauvreté infantile qui place l'Espagne au deuxième rang après la Grèce au sein de l'Union européenne.

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