L'état des lieux que vous venez de dresser nous offre une vision objective de l'activité de la Hadopi et permet ainsi d'argumenter le débat institutionnel, juridique et économique relatif au piratage. Celui-ci a longtemps opposé les créateurs aux consommateurs de culture et il était important de sortir de cette impasse. S'y combattaient deux conceptions politiques, l'une répressive et l'autre davantage permissive, qui allait jusqu'à dénoncer l'inadaptation de la conception française des droits d'auteur à l'Internet. Notre commission a, dans ce cadre, défendu les droits d'auteur et la juste rémunération des créateurs. Par ailleurs, l'industrie musicale, qui a tardé à aborder le tournant technologique d'Internet et les nouvelles habitudes de consommation basée sur la gratuité, notamment chez les jeunes, a demandé un soutien législatif : ce fut la création de la Hadopi. L'offre commerciale musicale a évolué depuis lors et ce sont les industries audiovisuelles qui sont désormais concernées par une indispensable adaptation. Aujourd'hui, un certain type de pillage demeure pourtant légal : celui des grandes plateformes, qui échappent à l'impôt bien que leurs activités se déroulent sur le territoire national. Ce contournement fiscal frappe également les créateurs en raison du manque à gagner dû au piratage.
Sans revenir sur les débats qui ont accompagné la création de la Hadopi, je m'inscris dans la continuité des positions du Sénat contre la multiplication des autorités administratives indépendantes. Puisque vos préoccupations ne se limitent plus au piratage individuel, qui avait en son temps légitimé la possibilité d'interrompre, peu judicieusement à mon sens, l'accès à Internet, je considère regrettable que d'autres structures publiques travaillent sur ces mêmes questions et plaide en faveur de la rationalisation de ce dispositif. Il en va de l'efficacité des pouvoirs publics dans la lutte contre le pillage fiscal dûment constaté à l'échelle nationale et européenne.
J'aurai enfin une question au sujet des chiffres que vous nous avez exposés : sur la centaine de dossiers transmis au Parquet, combien de condamnations ont-elles été prononcées ?