Intervention de Catherine Deroche

Commission des affaires sociales — Réunion du 1er juillet 2014 : 1ère réunion

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche, membre du comité de suivi :

Le deuxième axe de nos propositions vise à améliorer la qualité du repérage amiante, qui constitue le maillon faible sur les chantiers de désamiantage, et à faire du dossier technique amiante un document de référence.

Selon des informations communiquées à votre comité de suivi, seulement 25 à 30 % des dossiers techniques amiante (DTA) étaient réalisés en 2009-2010. Ce dossier, obligatoire uniquement pour les parties communes d'immeubles collectifs et les immeubles à usage commercial ou professionnel, constitue pourtant une véritable « carte d'identité amiante », comprenant les repérages, l'historique des travaux et des mesures d'empoussièrement, une fiche récapitulative et des recommandations générales. Quant aux DTA existants, ils sont rarement actualisés et peu demandés par les entreprises intervenantes. Qui peut se satisfaire d'une telle situation ?

C'est pourquoi nous souhaitons, avant toute chose, que l'Etat joue pleinement son rôle pour contrôler la réalisation des DTA.

En particulier, les corps de contrôle relevant de la compétence de la direction générale de la santé (DGS) doivent être plus présents sur le terrain et contrôler la réalisation des DTA et si besoin sanctionner les propriétaires récalcitrants. Lors de l'audition des représentants de la DGS, votre comité de suivi a appris avec effarement que seuls 16 équivalents temps plein étaient mobilisés au niveau national dans les agences régionales de santé (ARS) pour contrôler la réglementation amiante dans les hôpitaux et établissements médico-sociaux. Surtout, le contrôle par les services de l'Etat des obligations relatives au DTA dans les autres bâtiments semble quasiment inexistant.

Le Gouvernement doit aussi rapidement édicter une circulaire pour rappeler aux préfets leurs prérogatives en matière de protection de la population contre le risque amiante en cas de carence du propriétaire, la dernière circulaire remontant au 14 juin 2006.

L'Etat doit également être exemplaire, à travers la création d'une base de données internet, régulièrement mise à jour, avec tous les DTA de ses établissements publics. Cette base de données pourrait s'inspirer du site cadastre.gouv.fr, et être étendue dans un second temps aux établissements publics relevant de la compétence des collectivités territoriales. Nous reprenons ainsi une proposition formulée dès 1998 par le professeur Claude Got et défendue par le Sénat en 2005.

Nous proposons qu'à terme le DTA devienne un document unique et obligatoire quelle que soit la nature du bâtiment, afin de mieux protéger la santé des salariés et des artisans qui y interviennent.

Nous souhaitons également que le repérage amiante pour les locations, rendu obligatoire par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), soit ambitieux et vise les listes A et B, comme pour les appartements ou les maisons en cas de vente aujourd'hui.

La direction générale de la santé doit enfin rapidement mettre en place un système informatique de recueil des rapports annuels d'activité des diagnostiqueurs amiante et exploiter les données ainsi obtenues.

Venons-en justement à la mauvaise qualité des repérages et des diagnostics amiante, qui est dénoncée par quasiment toutes les personnes que nous avons auditionnées.

Insuffisamment formés, peu contrôlés par les organismes certificateurs, victimes de pressions économiques dans l'exercice de leurs missions, les diagnostiqueurs sont aujourd'hui sous le feu de la critique.

Les enjeux sont majeurs : un repérage insatisfaisant entraîne des risques d'exposition à l'amiante pour les travailleurs et la population, une dévalorisation parfois dramatique des biens immobiliers, ainsi qu'un allongement de la durée du chantier accompagné de surcoûts souvent considérables.

Le comité de suivi invite par conséquent le Gouvernement à refondre totalement et en urgence l'arrêté compétence amiante du 21 novembre 2006, en prenant comme base de travail le projet d'arrêté modificatif d'octobre 2011.

Ce projet, visant à faire monter en gamme les compétences des diagnostiqueurs amiante, reposait sur deux axes :

- une certification avec mention, pour réaliser des diagnostics dans les copropriétés regroupant plus de cinquante lots, les immeubles de grande hauteur, les établissements recevant du public des catégories 1 à 4, les diagnostics avant démolition et les contrôles visuels, ainsi que les repérages avant-travaux ;

- une certification dite sans mention, donc moins exigeante, pour réaliser les repérages avant-vente, les DTA en partie privative et parties communes des immeubles comprenant moins de cinquante lots, ainsi que les DTA des établissements recevant du public de cinquième catégorie.

En outre, la détention d'un diplôme BAC + 2 dans le domaine du bâtiment et une expérience de 5 ans devenaient obligatoires ; à défaut, le candidat devait présenter une expérience de 10 ans. Par ailleurs, une formation de 3 jours était imposée pour les diagnostiqueurs qui souhaitaient devenir certifiés sans mention (5 jours pour la certification avec mention).

Le comité de suivi souhaite cependant aller plus loin que ce projet d'arrêté modificatif :

- en obligeant les organismes certificateurs à procéder à plusieurs contrôles sur place inopinés, fréquents et diligents pendant la période de surveillance des diagnostiqueurs ;

- en instaurant des stages de formation continue rigoureux, qui exploiteraient une base de données informatique regroupant des retours d'expérience significatifs de diagnostiqueurs ;

- et en rendant obligatoire par voie réglementaire l'application de la norme rénovée NF X 46-020 pour tous les types de repérage, afin d'uniformiser l'activité des diagnostiqueurs.

Par ailleurs, le comité de suivi souhaite mettre un terme au flou juridique actuel en inscrivant dans le code du travail le repérage obligatoire avant travaux, quelle que soit la nature de l'objet concerné (navires, enrobés de route, canalisations...), comme le prévoit d'ailleurs la proposition de loi relative aux pouvoirs de l'inspection du travail, en cours de discussion à l'Assemblée nationale.

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