Intervention de Antoine Durrleman

Commission des affaires sociales — Réunion du 2 juillet 2014 : 1ère réunion
Certification des comptes du régime général de sécurité sociale exercice 2013 — Audition de M. Antoine duRrleman président de la sixième chambre de la cour des comptes

Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

S'agissant des engagements pluriannuels, le plan comptable des organismes de sécurité sociale est muet sur ce point. Deux visions s'affrontent : d'un côté, la Cour estime que leur prise en compte est nécessaire et possible, de l'autre, la direction de la sécurité sociale juge que ce ne l'est pas. Je remarque toutefois que cette dernière position n'est pas partagée par toutes les directions ministérielles concernées, en particulier de la direction du budget qui, elle, y est favorable. Cette question a fait l'objet d'une saisine du conseil de normalisation des comptes publics qui n'a, à ce jour, pas abouti.

La lutte contre la fraude au sein de la branche maladie se heurte à deux principales difficultés. Premièrement, les caisses primaires ont fait d'importants efforts s'agissant de la dématérialisation des procédures, mais le règlement des prestations en nature n'est toujours pas lié à la présence de pièces justificatives. Un des leviers de progrès consisterait donc à les rapprocher. Deuxièmement, la Cnam n'ayant pas toujours une vision très claire de ses faiblesses en matière de lutte contre la fraude, son action demeure insuffisamment ciblée. Par exemple, certains secteurs, comme les transports sanitaires, ne sont pas suivis de manière assez rigoureuse. La Cour avait déjà soulevé cette question dans son rapport de septembre 2012 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

Concernant la branche famille, nous constatons une forme de déni de réalité de la part de la Cnaf. Ses responsables pensent que les erreurs et anomalies de portée financière sont liées à la qualité des données qui leur sont transmises par les assurés ou les autres organismes, alors que nous estimons qu'il y aussi un problème de « compétences-métier » au sein des Caf. Trois actions nous paraissent devoir être entreprises : mettre sous tension le réseau les Caf autour d'objectifs chiffrés de qualité de leur production ; procéder à une analyse fine des tâches de gestion des prestations en vue d'une réingénierie des processus dans les Caf ; mettre en oeuvre une politique de contrôle plus dense. Le problème est donc principalement d'ordre managérial. La convention d'objectifs et de gestion (Cog) 2013-2017, signée l'année dernière, l'a bien compris puisqu'elle fait de l'optimisation du fonctionnement du réseau des Caf l'un de ses axes forts. Les indicateurs de suivi, qui seront définis cette année, doivent permettre à la branche de progresser.

L'intégration du FSV dans le périmètre du régime général ne pose aucun problème technique. Nous n'avons donc pas d'explication convaincante au fait que notre recommandation en la matière n'ait pas été suivie. Un esprit malicieux pourrait penser que le fait de faire apparaître deux déficits dans deux entités distinctes réduit optiquement l'impact qu'aurait la présentation d'un seul déficit global. Mais je n'ose penser que ce soit la motivation des pouvoirs publics pour laisser perdurer cette situation qui remonte à la création du FSV. Il convient de noter que dans les rapports de la Cour, les données du FSV et du régime général sont agrégées et que la commission des comptes de la sécurité sociale adopte elle-aussi désormais cette présentation.

Sur la branche AT-MP qui est, comparativement, une « petite » branche de la sécurité sociale avec un budget d'environ 13 milliards d'euros, il est certain que les questions comptables peuvent avoir une incidence importante sur le résultat. Néanmoins la trajectoire de progrès est réelle.

Le principe de la branche est d'être à l'équilibre sur la base des cotisations employeurs, même si elles sont partiellement mutualisées. On peut relever que la mutualisation des cotisations est également le principe qui sous-tend la contribution de la branche au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva). Le principe du financement par les cotisations employeurs est constant et entraine l'augmentation des cotisations quand la branche est en sous-équilibre. Le suréquilibre actuel vient réduire la dette de la branche constituée auprès de l'Acoss.

Sur le RSI, il faut relever les réels progrès de pilotage réalisés depuis deux ans. La direction générale du RSI a repris les choses en main en lien avec l'Acoss et la direction de la sécurité sociale. Ceci devrait permettre de résorber les problèmes à terme. Il est certain que le recouvrement contentieux est encore en devenir et qu'il y a encore beaucoup de taxations d'office non régularisées.

L'intégration du RSI au régime général n'aura pas d'effet sur les constats de la Cour relatifs aux faiblesses qui continuent à affecter les processus de gestion des cotisations. Le PLFRSS prévoit l'octroi d'une subvention d'équilibre par le régime général. Cette intégration financière au régime général est-elle susceptible de fragiliser ce dernier ? Tout dépend des ressources qui lui sont affectées pour compenser cette subvention. Il y a un point de sensibilité qui est que l'équilibre démographique se dégrade, même si cela est masqué par l'afflux d'auto-entrepreneurs. La subvention est donc appelée à augmenter et il faudra donc que la recette affectée suive la même évolution.

Il est certain que le RSI peut apparaître comme un régime fragilisé : le recouvrement est fait par les Urssaf, les prestations sont en grande partie liquidées par des organismes conventionnés et désormais l'équilibre sera assuré par le régime général.

La Cour ne s'est pas prononcée sur le circuit de versement du RSA.

Le régime de sécurité sociale des étudiants est couvert par la certification des comptes de la branche maladie. Les liens entre le régime général et les mutuelles étudiantes sont analysés et les faiblesses importantes du contrôle interne ont entraîné la formulation d'une réserve par la Cour.

La Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines n'entre pas dans le champ de la mission de certification des comptes du régime général confiée à la Cour.

Enfin la Cour n'a pas travaillé sur les conséquences du tiers payant mais une étude d'impact a été conduite par l'Inspection générale des affaires sociales.

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