Intervention de François Marc

Réunion du 7 juillet 2014 à 16h00
Loi de finances rectificative pour 2014 — Discussion d'un projet de loi

Photo de François MarcFrançois Marc :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de finances rectificative pour 2014 qui nous est soumis constitue, avec le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, que nous examinerons dans les prochains jours, la première traduction législative du pacte de responsabilité et de solidarité. Celui-ci vise à concilier le soutien à la croissance et à l’emploi, à l’aide de baisses ciblées de prélèvements, et la consolidation des finances publiques, qui prend la forme d’un plan d’économies de 50 milliards d’euros sur la période allant de 2015 à 2017.

Ces deux textes, s’ils ne comprennent pas l’ensemble des mesures législatives prévues par le pacte, permettent de tracer une perspective pour l’évolution des dépenses publiques, mais aussi pour celle des prélèvements obligatoires, pour la suite de la législature et au-delà. Nous le savons, cette visibilité est essentielle pour le retour de la confiance des acteurs économiques, après une période qui a contraint les gouvernements successifs à procéder à des ajustements fréquents, compte tenu de l’ampleur de la crise et de ses effets sur les finances publiques.

Ainsi, le pacte prévoit la poursuite de l’allégement du coût du travail reposant, dès 2015, sur la suppression des cotisations patronales au niveau du SMIC et la révision du barème des allégements. Compte tenu du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le coût du travail serait allégé d’environ 30 milliards d’euros au total en 2017.

Ce pacte engage une modernisation de la fiscalité des entreprises, qui fait suite aux concertations intervenues dans le cadre des assises de la fiscalité. Est privilégiée la diminution des impôts assis sur les facteurs de production avec, notamment, la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, programmée sur plusieurs années, une première réduction de 1 milliard d’euros intervenant dès 2015. Le pacte prévoit également la fin de la contribution exceptionnelle, dite « surtaxe », sur l’impôt sur les sociétés, dont la suppression en 2106 est entérinée par le présent projet de loi de finances rectificative, et la diminution du taux d’impôt sur les sociétés de 33, 1/3 % à 28 % d’ici à 2020, avec une première étape en 2017.

Ce pacte comprend enfin des mesures de solidarité pour les ménages modestes, d’un montant total de plus de 6 milliards d’euros, avec une mesure provisoire d’allégement de l’impôt sur le revenu, qui figure dans le projet de loi de finances rectificative et à laquelle devrait succéder, pour 2015, une mesure pérenne portant sur le « bas de barème ».

La prévision de recettes fiscales nettes pour 2014 est revue à la baisse de 5, 3 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale et s’élève à 279 milliards d’euros. Cette évolution résulte essentiellement du rendement moins élevé qu’anticipé de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés, compte tenu, pour une large part, de la reprise en base des moins-values de recettes fiscales de 2013, pour un montant de 4 milliards d’euros.

S’agissant des dépenses de l’État, des annulations de crédits pour un montant de 1, 6 milliard d’euros sont prévues sur le périmètre « zéro valeur », c’est-à-dire hors charge de la dette et des pensions, afin de contribuer à l’effort supplémentaire en dépenses de 4 milliards d’euros.

Les dépenses totales de l’État en 2014 relevant du périmètre « zéro volume » seraient, quant à elles, inférieures de 3, 4 milliards d’euros à la prévision initiale, en raison de la révision à la baisse de la charge de la dette – de l’ordre de 1, 8 milliard d’euros – permise par la faiblesse de l’inflation et des taux d’intérêt. On rappellera à cet égard que les taux sont historiquement bas, avec un taux à dix ans autour de 1, 6 % pour la dette française et un spread avec l’Allemagne de l’ordre de 40 points de base.

Cette situation témoigne de la crédibilité de notre politique, mais aussi, car l’ensemble des taux d’intérêt se sont rapprochés dans la zone euro, des progrès que cette dernière a réalisés tant du point de vue des efforts accomplis que des avancées en termes de gouvernance au cours des derniers mois.

Les annulations de crédits portent essentiellement, à hauteur de 965 millions d’euros, sur des crédits qui n’avaient pas été mis en réserve en début d’année, et 635 millions d’euros sont annulés au sein de la réserve de précaution. Elles n’ont pas porté sur les dépenses obligatoires et pratiquement pas sur les dépenses de personnel, seules les dépenses pleinement maîtrisables par les gestionnaires étant concernées.

D’importantes marges de manœuvre sont, malgré tout, conservées afin d’assurer le respect de la norme de dépense en exécution, puisque les crédits mis en réserve s’élèveraient encore à 6, 8 milliards d’euros après les annulations du projet de loi de finances rectificative pour 2014. Cette réserve devrait permettre de faire face aux différents aléas de l’exécution budgétaire, comme les dépenses qui pourraient résulter des contentieux agricoles avec la Commission européenne.

Au total, le projet de loi de finances rectificative pour 2014 prévoit un déficit budgétaire de 83, 9 milliards d’euros, incluant les investissements d’avenir. Certes, cela correspond à un déficit accru de 1, 4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale, mais à une amélioration d’environ 3 milliards d’euros par rapport à l’exercice 2013, sur lequel nous reviendrons dans quelques jours.

Le présent projet de loi de finances rectificative poursuit, avec le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, l’effort de consolidation des comptes publics engagé par le Gouvernement en 2012. Cet effort a été considérable. Il n’a toutefois pas produit les effets escomptés compte tenu de la conjoncture économique, déprimée à l’échelle mondiale et tout particulièrement au sein de la zone euro. C’est la raison pour laquelle a été déclenché le mécanisme de correction budgétaire, le Haut Conseil des finances publiques ayant identifié, dans son avis du 23 mai 2014, un « écart important » entre le solde structurel constaté en 2013 et les orientations arrêtées par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

L’effort projeté en 2014, plus important que ne le prévoit la loi de programmation, permet d’engager la correction de cet écart. Cette évolution est mise en évidence par l’article liminaire, qui retrace les prévisions de soldes effectif et structurel.

L’Assemblée nationale a modifié cet article – la commission des finances en a débattu et nous aurons l’occasion d’y revenir tout à l’heure – en dégradant la prévision de solde conjoncturel et en améliorant celle de solde structurel. Cela revient à modifier notre croissance potentielle et à nous rapprocher du retour vers l’équilibre structurel.

J’indique d’emblée qu’une telle réévaluation en cours de route n’est pas souhaitable. Une permanence dans les méthodes et les hypothèses fondamentales utilisées pour le calcul du solde structurel me paraît au contraire indispensable.

C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons défini une trajectoire de PIB potentiel dans la loi de programmation des finances publiques et que le Haut Conseil des finances publiques, à la suite d’une modification apportée par le Sénat sur l’initiative de notre collègue Jean-Pierre Caffet, est tenu de retenir « la trajectoire de produit intérieur brut potentiel figurant dans le rapport annexé [à la loi de programmation] ».

Au surplus, le non-respect de ce cadre budgétaire que nous suggère l’Assemblée nationale pourrait porter atteinte à la crédibilité de la France auprès de nos partenaires et fragiliser les règles de gouvernance économique et financière. En effet, si elles s’écartaient des méthodes définies dans leurs propres textes, les autorités françaises donneraient le sentiment qu’elles s’arrogent le droit d’améliorer comme bon leur semble leur trajectoire de solde structurel.

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