Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 7 juillet 2014 à 16h00
Loi de finances rectificative pour 2014 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

J’attends de voir comment vous allez procéder.

Pour en revenir à la fiscalité, le CICE a pour objet de redonner des marges d’action aux entreprises. Plutôt que de se crisper sur une codification, au demeurant impossible, des contreparties, il faut faire en sorte – c’est tout l’enjeu du dialogue social dans notre pays – que les salariés aient la possibilité de demander des comptes aux dirigeants qui bénéficient déjà de cette mesure et qu’un contrôle consolidé soit exercé sur ces entreprises grâce à l’observatoire qui sera mis en place : il s’agit de savoir si les entreprises vont embaucher, investir en capital humain, par exemple dans la formation, ou dans l’innovation matérielle et immatérielle.

Ce sont des attitudes concrètes qui comptent, non des postures, et ce dialogue social doit vivre au plus près de la réalité, que ce soit l’entreprise ou la branche professionnelle. Le patronat ne peut se dédouaner de ses responsabilités : on ne peut pas prendre sans s’engager.

Telle est la meilleure voie pour ramener la confiance, afin d’engager un cycle de croissance capable d’endiguer le chômage, véritable cancer de la société.

Par ailleurs, l’impôt sur les sociétés, on le constate depuis quelques années, suscite des réactions presque aussi vives dans le débat public que l’impôt sur le revenu. On connaît son défaut : des taux élevés combinés à une assiette réduite, comme on connaît le défaut de l’impôt sur le revenu, qui frappe finalement très peu de contribuables, d’ailleurs souvent excédés de la lourdeur de leur contribution.

Rappelons quand même qu’un engagement de force majeure a été tenu par la majorité actuelle, à savoir la réintroduction d’une certaine progressivité dans l’impôt sur le revenu. Nul ne peut le contester.

S’agissant de l’impôt sur les sociétés, je l’ai déjà indiqué, je regrette, tout comme mon collègue du RDSE, que la baisse du taux facial soit reportée à 2017. Je constate aussi un certain flou gouvernemental, monsieur le secrétaire d’État : à combien s’établira ce taux ? Sera-ce 32 %, sera-ce 28 % ? Le taux actuel est dissuasif, alors que, dans le même temps, nos partenaires de la zone euro – ils sont également, il ne faut pas l’oublier, nos concurrents en matière d’attractivité du territoire et de compétitivité dans la bataille économique internationale –, en particulier l’Espagne et l’Italie, les réduisent de manière très significative.

Le projet de directive sur l’assiette commune de l’impôt sur les sociétés en est d’autant plus urgent. Il doit vraiment figurer en tête de l’agenda des institutions européennes. Il est urgent de prendre conscience à l’échelle européenne la plus pertinente qu’une union fiscale doit être réalisée. Les États-Unis ont compris depuis longtemps que la fiscalité comme le droit devaient être au service de leurs entreprises et, à cet égard, dans le combat économique mondial, la loi FATCA leur assure un reporting mondial des entreprises où leurs intérêts sont en jeu.

L’action doit se situer à ce niveau, et elle est plus productive que la lamentation.

Je voudrais également évoquer un sujet important, même s’il n’est pas essentiel, qui a agité l’Assemblée nationale et a suscité des réflexions au sein de la commission des finances, je veux parler des augmentations de la taxe de séjour votées par l’Assemblée nationale.

L’une de ces hausses, qui s’élève à deux euros, ne peut surprendre le Gouvernement, puisqu’elle est réclamée par la région d’Île-de-France et qu’elle figurait dans les conclusions de la mission Carrez sur le financement du projet de transports du Grand Paris dont bénéficiera toute l’économie française, mission à laquelle, du reste, certains d’entre nous ont participé en 2009.

L’autre augmentation est sortie, il est vrai, d’un chapeau très parisien : elle est forte, elle est importante.

Le rapporteur général de notre commission des finances a décidé très sagement, et nous l’avons suivi, de reporter l’application de l’une et de l’autre à 2015. Je considère, monsieur le secrétaire d’État, qu’il revient au Gouvernement de clarifier ses positions sur le fond des propositions.

Bien sûr, tous les choix qui sont dans ce projet de loi de finances rectificative pour 2014, comme ceux de toutes les lois de finances, seront jugés à leur exécution : le rythme de baisse des déficits, le soutien ciblé à la croissance, les mesures fiscales optimisées pour que l’investissement privé reparte et que les ménages consomment – parce que c’est un moteur essentiel de la croissance en France –, enfin, l’action énergique annoncée par le Premier ministre pour que la construction des logements – c’est une priorité – reparte. Tout est affaire de calibrage.

Il n’en reste pas moins que, depuis vingt ans, la France a un déficit de croissance par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE de 0, 5 point de PIB par habitant.

Le programme national de réforme qui nous est proposé par le Gouvernement concrétise les enjeux de la période : accroître le taux d’activité, diminuer le chômage structurel, soutenir la productivité par l’innovation et la formation professionnelle, ainsi que par la flexisécurité, n’ayons pas peur du mot.

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