Intervention de Christian Demuynck

Réunion du 11 mai 2005 à 15h00
Volontariat associatif et engagement éducatif — Discussion d'un projet de loi

Photo de Christian DemuynckChristian Demuynck :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui est un texte essentiel pour le développement de la vie associative de notre pays et l'essor du volontariat associatif.

Avec seulement 400 volontaires, la France, qui, paradoxalement, est l'un des pays comptant le plus grand nombre d'associations, connaît un immense retard par rapport à ses homologues européens, lesquels, à l'instar de l'Allemagne, se sont depuis longtemps intéressés au volontariat associatif.

Ce manque d'intérêt est principalement dû, comme M. le ministre l'a très justement souligné, au véritable vide juridique en la matière.

Le bénévolat est particulièrement développé dans notre pays, tout comme le salariat. L'un comme l'autre permettent aux nombreuses associations de fonctionner et de participer à la vie de la société française, alors que le volontariat associatif, ne disposant pas de statut, est resté à l'état d'embryon.

L'objectif de ce texte est justement de combler ce vide juridique, afin de soutenir les personnes qui s'engagent pour l'intérêt général.

La principale vocation du volontariat, en effet, est bien de développer la participation citoyenne et l'engagement solidaire, en menant au sein d'associations ou de fondations d'utilité publique, de façon désintéressée, un projet d'intérêt général.

Les associations, de par leur proximité et leur connaissance du terrain, sont effectivement, plus que tout autre organisme, à même de répondre aux attentes de la société et de prendre en charge des missions que ne peut assumer l'Etat.

Le statut que vous proposez pour les volontaires, monsieur le ministre, est ainsi la résultante de la démarche citoyenne entreprise par certains et du projet collectif d'intérêt général porté par les associations.

Ce statut va permettre de développer une notion qui me tient particulièrement à coeur et dont j'ai déjà relevé l'intérêt dans le rapport sur les violences scolaires que j'ai remis à M. François Fillon en juin dernier : le service civil volontaire.

En effet, une telle démarche permet aux citoyens, et notamment aux jeunes, de prendre conscience du fait qu'ils vivent dans une société solidaire où l'intérêt général garde tout son sens et n'est pas un vain mot.

Ce texte répond aux attentes légitimes d'un grand nombre d'associations qui, aujourd'hui, rencontrent des difficultés à se développer en raison du manque de clarté du droit français.

Il ne s'agit donc nullement, comme l'a rappelé M. le rapporteur, d'un « sous-contrat » de travail. La démarche des volontaires ne vise d'ailleurs ni la professionnalisation ni la formation professionnelle. Il s'agit bien d'une action désintéressée, où seuls priment l'intérêt général et la volonté de se mettre au service de la collectivité.

Le projet de loi que vous nous présentez, monsieur le ministre, représente donc une grande avancée pour les associations et pour l'engagement éducatif. Il mérite cependant quelques éclaircissements, et je vais maintenant aborder quelques points que je voudrais voir développés dans le texte.

Ainsi, concernant les personnes pouvant être volontaires, je pense qu'il serait intéressant de stipuler que les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion ou de toute autre allocation recouvreront automatiquement leurs droits à la fin de leur mission. Le volontariat ne doit effectivement pas être un frein pour ceux qui souhaitent s'investir.

Je désire également évoquer le problème de la mesure d'agrément, qui me semble important et que j'ai déjà soulevé à plusieurs reprises. L'article 10 du projet de loi, qui y fait référence, précise que « l'association ou la fondation qui souhaite faire appel au concours de personnes volontaires dans les conditions prévues par la présente loi doit être agréée par l'Etat ». Or il me paraît important que les associations aient à formuler une demande d'agrément non pas pour chacune de leurs missions, mais bien pour l'ensemble de celles-ci, de façon que leur fonctionnement ne soit pas entravé. En effet, nous le savons, une association se doit de réagir rapidement devant les situations et ne peut se permettre de répondre sans cesse à des demandes administratives. Il est plus important, pour elle et pour la société, qu'elle soit présente sur le terrain pour y effectuer les missions d'intérêt général qui relèvent de sa compétence. Il est donc primordial, à mon sens, de ne pas trop l'encadrer, de lui faire confiance, un excès de réglementation aboutissant souvent, nous avons déjà pu le constater, à un enlisement du système.

Enfin, comme vous l'avez à plusieurs reprises fait remarquer, monsieur le ministre, le volontariat associatif reste trop méconnu du grand public, notamment des jeunes. Aussi vous proposerai-je d'inscrire dans ce projet de loi qu'il sera présenté une fois par an à l'ensemble des collégiens et des lycéens, afin que ces derniers puissent, le moment venu, faire le choix de l'engagement solidaire pour la période qu'ils souhaiteront. Cela leur permettrait d'obtenir un maximum d'informations sur le sujet. Vous avez d'ailleurs abordé ce point au cours de votre intervention.

S'agissant toujours de la sensibilisation des jeunes, je pense qu'une présentation du volontariat associatif pourrait avoir lieu lors des journées d'appel de préparation à la défense qui ont lieu tous les ans. De telles journées permettent en effet de toucher tous les jeunes, quels que soient leur formation et leur milieu social.

Concernant par ailleurs l'engagement éducatif, les multiples réunions que j'ai conduites dans mon département pour débattre du projet de loi ont appelé mon attention sur les risques que peut comporter le dispositif pour les 120 000 salariés qui travaillent aujourd'hui dans les centres de vacances organisés par des personnes morales de droit privé à but lucratif.

Je crains en effet que le dispositif prévu ne crée une concurrence déloyale entre, d'un côté, les associations qui pourraient en bénéficier et, de l'autre, les entreprises qui en seraient exclues, alors qu'elles font strictement la même chose. A titre d'exemple concret, une association relevant des dispositions de ce projet de loi devrait débourser 318 euros par animateur, tandis qu'une entreprise devrait, quant à elle, payer 2 247 euros pour un séjour de sept jours, tout simplement parce qu'elle est obligée d'appliquer les 35 heures : là où un seul animateur suffirait pour une association, il en faudrait trois pour une entreprise.

Une telle situation aurait, vous en conviendrez, une incidence économique dévastatrice sur l'emploi dans ces entreprises. Elle risquerait de pousser certaines d'entre elles à se transformer en associations, afin de ne pas avoir à supporter de telles charges. Aussi me semble-t-il nécessaire d'étudier comment nous pourrions éviter ce genre de conséquences. Dans cette perspective, j'ai d'ailleurs cosigné un amendement déposé par notre collègue Henri de Raincourt et tendant à ouvrir le bénéfice des dispositions du projet de loi aux personnes privées. Je vous ai toutefois entendu déclarer, monsieur le ministre, que vous étiez très attentif au devenir des entreprises concernées, que vous aviez reçu leurs représentants et que vous vous étiez engagé à trouver une solution : je m'en réjouis, et j'espère que nous pourrons obtenir rapidement des informations sur les propositions que vous serez amené à formuler.

Pour conclure, monsieur le ministre, je souhaite vous féliciter du travail de concertation que vous avez mené avec les différentes associations et qui a permis d'aboutir à ce texte, qui n'est sans doute pas parfait mais qui répond aux attentes du monde associatif ; nul doute qu'il constituera un véritable facteur de développement du volontariat dans notre pays. Je vous renouvelle donc tout mon soutien pour ce projet de loi ambitieux, qui permettra à la France de combler son retard en matière de volontariat associatif.

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