Notre assemblée examinera à l'automne prochain le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français. C'est dans cette perspective que nous avons conduit, en association avec la commission du développement durable, une série d'auditions des grands acteurs du secteur, notamment du côté des producteurs et des fournisseurs.
Aujourd'hui, nous passons du côté des consommateurs pour nous intéresser aux entreprises dites « électro-intensives », dont la consommation d'électricité est stratégique de par leur activité même et parce qu'ensemble, elles représentent la moitié de la consommation électrique du secteur manufacturier. Il s'agit bien souvent d'entreprises de grande taille, fortement exportatrices ; certaines sont filiales de grands groupes internationaux qui regardent de près leurs coûts de production : les établissements pourraient être délocalisés si les coûts de l'électricité devenaient insoutenables.
L'enjeu est donc stratégique pour l'emploi, mais aussi pour notre indépendance économique car il est essentiel de conserver ces productions sur notre territoire.
Ces entreprises bénéficient de plusieurs dispositifs, notamment d'exonérations ou de réductions sur les différentes taxes portant sur l'électricité. Elles ont aussi accès à des contrats d'approvisionnement de long terme, dans le cadre du consortium Exeltium.
Les bouleversements qu'ont connus les marchés de l'électricité depuis cinq ans doivent toutefois nous amener à réexaminer la situation de ces industriels. L'introduction d'une électricité d'origine nucléaire à prix régulé (ARENH) et le choc des énergies renouvelables sur les prix de marché, voire le débat sur le maintien à terme d'un parc nucléaire dont la production de base correspond bien au profil de consommation de ces industries, remettent par exemple en cause l'intérêt du dispositif Exeltium.
Mais ces évolutions ne constituent qu'une première étape dans la transition énergétique, à laquelle les industriels électro-intensifs peuvent apporter beaucoup.
Nous sommes tout particulièrement intéressés par la capacité qu'ont ces industriels à adapter leurs habitudes de consommation aux besoins du réseau. En effet, comme cela a souvent été souligné devant notre commission, la transition énergétique bute notamment sur la variabilité de la production d'origine éolienne ou photovoltaïque, qui risque de causer des déséquilibres sur le réseau. Or les industriels électro-intensifs peuvent « s'effacer », c'est-à-dire déplacer leur consommation lorsqu'il y a un risque de déséquilibre. Ils peuvent aussi, en sens inverse, absorber un surplus de production afin peut-être d'éviter les phénomènes de « coût négatif » de l'électricité.
Nous avons souhaité réunir autour de ces enjeux des intervenants venant en premier lieu de l'industrie et des services associés à l'effacement. Les représentants de RTE, ainsi que de l'Ademe et de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), complèteront utilement les premières interventions.
Cette table ronde est largement due à l'action de notre collègue Jean-Pierre Vial, qui nous a souvent sensibilisés à ces questions avec expertise mais aussi pédagogie. C'est cette même pédagogie que nous attendons des intervenants, afin de nous aider à bien comprendre des enjeux particulièrement complexes. Car l'équilibrage entre l'offre et la demande doit être réalisé à chaque instant, en fonction de paramètres qui ne sont parfois connus que quelques secondes à l'avance.