Intervention de Antoine Durrleman

Commission des affaires sociales — Réunion du 8 juillet 2014 : 1ère réunion
Suite à donner à l'enquête de la cour des comptes sur les relations conventionnelles entre l'assurance maladie et les professions libérales de santé — Audition de M. Antoine duRrleman président de la sixième chambre de la cour des comptes M. Frédéric Van roekeghem directeur général de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et M. Thomas Fatome directeur de la sécurité sociale

Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

S'agissant de la gouvernance globale du système, l'Etat nous paraît absent juridiquement et présent pratiquement. Le cadre de la loi de 2004 confère à l'Etat sa juste place et le contrat qui lie ce dernier à l'Uncam gagnerait à être précisé afin de clarifier le rôle de celui-ci dans le cadrage d'un type de négociation particulier. Mais, comme rappelait M. Fatome, l'Etat ne dispose pas aujourd'hui de la capacité juridique à agir en ce sens. Ceci aurait pour vertu d'assurer la réalisation des objectifs de la loi de 2004.

En outre, la régulation de la relation des soins de ville avec le monde hospitalier pourrait être assurée par le conseil national de pilotage des ARS, ce qui permettrait d'utiliser un outil présidé par l'exécutif et d'aboutir à une forme de pilotage plus unifié.

L'ensemble de ces mesures redonnerait son plein sens au dispositif de la loi de 2004, sans conduire à une remise à plat du système et dans une démarche pragmatique et concrète.

La place des assurances complémentaires fait aussi débat. Il ne s'agit pas de retirer à l'assurance maladie son rôle premier, mais dans un certain nombre de domaines, comme l'optique, celle-ci est un partenaire faible par rapport à d'autres acteurs. Aujourd'hui, nos concitoyens éprouvent de plus en plus de difficultés devant le niveau élevé des assurances complémentaires, du fait notamment de l'absence de régulation de certains secteurs et du comportement propre à certaines d'entre elles face aux effets de concurrence. La volonté de captation de parts de marché renchérit leurs frais de gestion et se répercute, in fine, sur leur tarification. La présence de ces complémentaires nous parait légitime dans certaines discussions conventionnelles. C'est pourquoi la Cour émet une sorte d'étonnement poli à constater que la disposition législative du code de la sécurité sociale prévoyant l'existence d'un point annuel entre l'Uncam et l'Unocam sur les négociations conventionnelles n'a pas encore trouvé à s'appliquer. Cette disposition avait pourtant été votée par le Parlement !

S'agissant des rémunérations et de l'évolution différentielle des professions qui en découle, toute une série de mesures ont concerné les médecins généralistes. En revanche, la Cour constate un phénomène d'échappement sur les dépassements d'honoraires pratiqués par les médecins du secteur II qui ont été gagnants par rapport à leurs confrères du secteur I, en matière notamment de taux d'évolution. In fine, l'assurance maladie, par le biais de l'avenant n° 8, est amenée à consentir à la pérennisation des dépassements. Des incitatifs puissants, parmi lesquels la possibilité pour certains médecins en secteur I, de rejoindre le secteur II, ont dû être mis en place. Les 16 000 signataires de cet avenant ont, dans leur grande majorité, bénéficié d'un effet d'aubaine. Telle une sorte de prime à la signature, l'assurance maladie a accepté de prendre en charge une partie des cotisations sociales des médecins de secteur II, certes sur la partie opposable de leurs honoraires. Jusqu'à maintenant, les avantages sociaux étaient associés, précisément, aux honoraires conventionnels. Ils sont désormais étendus aux médecins du secteur II qui sont bénéficiaires, par ailleurs, des marges procurés par les dépassements qu'ils pratiquent.

Enfin, l'usage des conventions demeure à géométrie variable comme en témoigne l'évolution des accords prix-volumes qui ne reposent pas sur un avenant conventionnel, mais sur un protocole d'accord signé entre les syndicats de biologistes et l'assurance maladie qui relève d'une procédure contractuelle. D'un côté se trouvent donc une convention qui se pérennise et se statufie depuis 1994, et de l'autre un protocole qui ne s'inscrit pas du tout dans le cadre conventionnel. Une telle situation ne peut que soulever nos interrogations.

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