Aire au succès économique retentissant, avec une croissance de 6% par an ces 5 dernières années, marché de plus de 600 millions d'habitants, demain comparable en taille à l'Union européenne, l'Asie du Sud Est est aujourd'hui le coeur du commerce globalisé. La moitié du trafic mondial passe par le détroit de Malacca, véritable veine jugulaire de l'économie. L'Asie, moins de 20% du PIB mondial en 1980, en représentera le tiers en 2030.
Ensemble, les 10 économies d'Asie du Sud-Est -ou ASEAN- forment la 4ème puissance économique mondiale, attirent 110 milliards d'investissements étrangers chaque année. C'est nouveau : elles consomment, 54% de leur PIB -un record !- et les classes moyennes se comptent désormais en centaines de millions, en particulier en Indonésie, Malaisie, Thaïlande. Ces pays investissent : 1.000 milliards d'euros d'infrastructures seront construites dans les 10 prochaines années. Dans 5, 10 ou 20 ans, suivant les cas, tous les pays de l'ASEAN auront rejoint le groupe des pays à hauts revenus.
Les chiffres sont spectaculaires :
- Le trafic aérien a cru de 80% à Jakarta depuis 2008, Airbus y a vendu 240 avions l'année dernière ;
- il se vend déjà plus de voitures en Indonésie qu'en France : 1,1 million par an, alors que le taux d'équipement n'est que de 3% ;
- La capitalisation boursière a été multipliée par 5 en 10 ans dans l'Asie du Sud-Est ;
- 117 projets miniers sont en cours dans l'ASEAN, l'Indonésie est leader mondial du charbon, la Thaïlande celui du caoutchouc, Malaisie et Indonésie ceux de l'huile de palme ; Indonésie et Brunei produisent des hydrocarbures ;
- 20 000 km de voies ferrées sont à construire, des lignes à grande vitesse (entre la Malaisie et Singapour, et en Thaïlande) et 13 lignes de métro sont en projet ;
- À elle seule, la Chine investit 10 milliards de dollars chaque année dans la région, dans le secteur énergétique et les infrastructures principalement...
On assiste à une inversion de la relation de dépendance économique avec l'Asie du sud-est : désormais c'est l'occident qui a besoin de l'Asie du Sud-Est, pour aller chercher sa croissance, et non plus l'inverse.
Cette région souffre toutefois de faiblesses :
. Une pression sans précédent est exercée sur l'environnement et les ressources naturelles. Le développement a un revers écologique : le charbon va devenir le 1er combustible de l'ASEAN en 2030, pour satisfaire une demande en énergie qui a été multipliée par 5 depuis 1990 et qui va continuer à croitre au même rythme. L'Indonésie a perdu 20% de ses forêts en 20 ans (l'équivalent d'un terrain de tennis par minute).
. Déséquilibre, ensuite, d'un développement vertigineux qui engendre de tentaculaires mégalopoles, avec 4 villes de plus de 10 millions d'habitants en 2025 (Manille, Jakarta, Bangkok, Ho Chi Minh ville), des problèmes d'assainissement, d'étalement urbain, d'embouteillages, de pollution ;
. Vulnérabilité au dérèglement climatique, ensuite, avec des catastrophes naturelles dévastatrices : tsunami, typhon Hayan, inondations...
. Explosion des inégalités sociales : le décile le plus riche totalise 30% de la consommation de l'ASEAN ;
. Corruption, qui entrave le développement, notamment au Vietnam et en Indonésie ;
. Instabilité politique, en Thaïlande, ou « contrôle » étatique étroit, au Viet Nam ;
. et enfin trafics, de drogue ou de migrants, irrédentismes et terrorisme...