Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’adoption d’un texte par la commission mixte paritaire marque le terme de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. L’accord trouvé entre les sénateurs et les députés, s’il n’a pas recueilli un vote unanime, a permis qu’une majorité confortable se dégage pour entériner le travail accompli par les deux chambres depuis plusieurs mois.
Je tiens à souligner la qualité du travail de nos rapporteurs, Didier Guillaume et Philippe Leroy, ainsi que celle du dialogue qui s’est instauré entre eux et les membres de la commission. Cette volonté de dialogue a permis de trouver, conjointement avec Germinal Peiro, le rapporteur de l’Assemblée nationale, les bonnes formulations, propres à ce qu’une majorité d’entre nous puissent s’accorder sur un texte qui devrait faire date dans l’évolution des pratiques agricoles.
Comme tout texte de loi, celui-ci suscite à la fois de l’enthousiasme et des regrets. Je commencerai par parler des regrets, avant d’aborder les aspects positifs du projet de loi, qui sont nombreux et correspondent à de réelles avancées ; je ne les citerai pas tous, car M. le rapporteur les a déjà énumérés.
L’interdiction des remises, rabais et ristournes pour les produits alimentaires, introduite par le Sénat en seconde lecture, a été supprimée en commission mixte paritaire. Cela est fort regrettable, d’autant que les pratiques irrégulières des grandes surfaces, qui confinent parfois à l’extorsion, ont fait l’objet très récemment d’un communiqué conjoint des ministres de l’agriculture et de l’économie, ceux-ci s’appuyant sur les informations recueillies à l’occasion des enquêtes de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, dont le rapport est attendu durant l’été.
L’abandon de cette mesure d’interdiction amène à laisser de côté la question de l’équilibre des relations commerciales entre les agriculteurs, les fournisseurs et les distributeurs, dont chacun connaît les imperfections. Il aurait pourtant été souhaitable d’apporter des solutions concrètes.
Je regrette aussi la suppression des alinéas 30 et 31 de l’article 3, que nous avions réintroduits en seconde lecture afin de faciliter la commercialisation des semences au sein des GIEE. Pour justifier leur retrait du projet de loi, on a brandi le risque d’une multiplication de GIEE créés à cette seule fin ; cet argument ne tient pas, car ces groupements ont une vocation tout autre et font l’objet d’un examen attentif de l’administration avant d’être constitués. Toutefois, cette suppression ne porte pas atteinte à la possibilité de procéder à l’échange de semences non couvertes par un certificat d’obtention végétale.
Concernant les dispositions introduites au Sénat et supprimées en commission mixte paritaire, il faut encore évoquer la mesure visant à limiter la dissémination des pesticides hors des parcelles agricoles situées à proximité d’habitations. L’amendement que le Sénat avait adopté en seconde lecture allait pourtant dans le sens que l’on souhaite donner à cette loi : s’engager vers une moindre utilisation des pesticides et faire preuve d’une plus grande vigilance quant à leur incidence sur la santé humaine et sur l’environnement. La suppression de cette disposition est d’autant plus étonnante que cet amendement avait reçu un avis favorable du ministre et du rapporteur.
Quoi qu’il en soit, il va sans dire que les personnes vulnérables comme les enfants ou les personnes âgées, en considération desquelles la loi encadre les pratiques d’épandage autour des écoles, des hôpitaux et des maisons de retraite, sont tout aussi vulnérables lorsqu’elles sont à leur domicile. Par ailleurs, toute personne ne doit-elle pas être considérée comme vulnérable et pouvoir bénéficier de ces mesures de précaution ? Notre collègue Bernadette Bourzai, qui ne pouvait participer à ce débat, m’a demandé de vous faire savoir qu’elle partage ce constat.
Il faut toutefois reconnaître qu’un certain nombre de mesures prévues au même article vont dans le bon sens et s’appuient sur les conclusions du rapport de la mission commune d’information sur les pesticides.