Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 30 juin 2014 à 16h00
Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mes chers collègues, comme chaque année à cette période, nous dressons le bilan de l’application des lois pendant la session parlementaire écoulée – cette fois, la session 2012-2013.

Seules trois lois relevant de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication ont été adoptées au cours de cette session, contre cinq au cours de la précédente.

Toutefois, autant la loi du 31 janvier 2013 tendant à abroger la loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l’absentéisme scolaire, issue d’une proposition de loi de notre collègue Françoise Cartron, était un « petit texte » sur le plan du travail législatif, autant la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République et la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche se sont placées parmi les textes majeurs, avec de nombreux d’amendements et une discussion approfondie.

Les projets dont la commission de la culture est saisie tendent toujours à se concentrer au début de chaque législature. De ce point de vue, l’activité constatée au cours de la session 2012-2013 est tout à fait comparable à celle de la session 2007-2008, qui, elle aussi, suivait une année d’élections présidentielle et législatives.

La loi tendant à abroger la loi visant à lutter contre l’absentéisme scolaire était d’application directe et elle est donc applicable. La loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République et la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite « loi ERS », sont partiellement applicables : pour mémoire, la loi sur la refondation de l’école compte 89 articles et la loi ESR 129 articles.

Un certain nombre de ces dispositions ne sont pas encore applicables et ne le seront pas avant plusieurs mois, voire avant quelques années.

Je pense, par exemple, au rapport annuel des organismes créés par la loi, tel le Conseil supérieur des programmes, ou à la procédure de nomination des présidents d’organisme de recherche. Sans que soit intégralement mise en œuvre la méthode prévue par la loi, il a néanmoins été procédé à l’audition du candidat pressenti en commission du Sénat pour l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, les décrets relatifs au statut des organismes de recherche n’ayant pas encore été modifiés.

On peut considérer qu’un quart des dispositions de la loi ESR sont mises en application alors que trois quarts des dispositions de la loi pour la refondation de l’école sont mis en œuvre. Ces deux textes ont été adoptés à la même date, la loi ESR après application de la procédure accélérée, la loi pour la refondation de l’école au terme du vote conforme du Sénat en deuxième lecture. Choisir la procédure accélérée, plutôt que de laisser la navette se poursuivre, est sans aucun effet sur le rythme de publication des mesures d’application de la loi.

Pour la refondation de l’école, sur les dix-huit mesures prévues, douze ont été prises dans un délai de six mois et deux existaient déjà. Manquent donc encore quatre mesures d’application prévues dans la loi. En outre, quinze mesures non prévues ont été prises, dont le décret du 7 janvier 2014 portant expérimentation d’une procédure d’orientation des élèves dérogeant à l’article L. 331-8 du code de l’éducation, disposition introduite sur l’initiative de notre commission, et les circulaires non prévues relatives au dispositif d’initiation aux métiers en alternance, au fonds d’amorçage ou à la prévention et la lutte contre le harcèlement à l’école.

S’agissant de la loi ESR, sur les vingt-neuf mesures prévues, sept seulement ont été prises dans un délai de six mois. Vingt-deux manquent donc à l’appel. Par ailleurs, quatre mesures non prévues ont été prises. C’est avec stupéfaction, monsieur le secrétaire d'État, que j’ai découvert dans le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt un amendement du Gouvernement qui, entre vaches et cochons, visait à modifier les arbitrages du Parlement sur la loi ESR !

Parmi les mesures attendues, et pour faire écho à un rapport remarqué de nos collègues Dominique Gillot et Michel Magras, je mentionnerai l’ordonnance qui devrait être prise, d’ici au 22 juillet 2014, afin de définir les nouveaux contours du système universitaire aux Antilles et en Guyane.

Par ailleurs, sur les treize rapports prévus par la loi, le Gouvernement a pris du retard pour l’un d’entre eux déjà, qui lui aussi concernait une disposition introduite par le Sénat : dans un délai de six mois après la promulgation de la loi, soit avant le 22 janvier 2014, le Gouvernement devait remettre un « rapport formulant des propositions en vue d’améliorer le mode de sélection et de formation des futurs médecins et d’élargir les origines sociales et géographiques des étudiants ». Il s’agissait de donner suite aux recommandations de nos collègues de la commission du développement durable en matière de désertification médicale.

Je ne serais pas complète si je ne mentionnais pas que deux des lois promulguées au cours de la précédente session sont entrées totalement en application au cours de l’année parlementaire 2012-2013. Il s’agit de la loi relative à la rémunération pour copie privée et de la loi tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles.

De surcroît, toutes les mesures d’application de la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision promulguée lors de la précédente législature sont désormais parues. Autre signe encourageant, la parution d’un décret d’application de la loi de février 2012 visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs.

Enfin, le 8 juillet 2013 a été publié un décret d’application de la loi relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet, en clair la loi HADOPI. Ce texte a supprimé la peine contraventionnelle complémentaire de suspension de l’accès à un service de communication au public en ligne. C’est une inflexion notable, qui appelle néanmoins une vraie loi sur la société numérique, le partage et la rémunération de la création.

En conclusion, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle et l’application des lois, malgré une assiduité étiolée et quelques présidents de commission absents parce qu’ils sont retenus ailleurs, je salue ici votre motivation et votre sérieux pour mener à bien ce travail et élaborer chaque année le rapport.

Cependant, il nous faudra des moyens démocratiques d’alerte de nos concitoyens plus lisibles : je pense à un portail internet grand public de type Légifrance. En effet, il ressort aujourd'hui d’une lecture attentive du rapport que celui-ci est un peu le miroir de notre impuissance. Nous avons besoin de la mobilisation populaire pour exiger que les lois soient appliquées.

Je vous encourage donc, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle et l’application des lois, à utiliser la capacité d’indignation dont vous savez faire preuve pour faire savoir à Mme Fioraso que la loi agricole n’est pas le lieu pour modifier des arbitrages intervenus au Parlement.

À titre personnel, je vous invite également à signifier au Gouvernement que quatorze mois d’attente pour une loi sur les lanceurs d’alerte, afin d’éviter les conflits d’intérêts en matière sanitaire, …

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