Intervention de André Trillard

Réunion du 24 septembre 2014 à 15h00
Engagement des forces armées en irak — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de André TrillardAndré Trillard :

Je veux les saluer également pour leur langage de vérité et de paix. Ils ont su rappeler que le meurtre, la sauvagerie, le sectarisme ne sont pas des valeurs de l’islam.

Quant à nous, responsables politiques français, européens, ainsi que tous nos homologues à travers le monde, nous nous devons d’ouvrir lucidement les yeux sur la réalité de cette menace qui pèse sur nos peuples.

Pour sa part, attaché à l’unité nationale, c’est en toute responsabilité que le groupe UMP soutiendra le Gouvernement dans sa lutte contre le terrorisme en France, en Irak et dans le monde.

Au nom de notre groupe, je me dois de rappeler ici que la France et les Français ont déjà connu les menaces et subi le terrorisme.

Sur le sol national comme à l’étranger, les Français ont été les victimes de mouvements fanatiques, détournant et instrumentalisant la religion musulmane pour le compte de leur propre folie. Il en est de même pour nos alliés belges, espagnols et britanniques, pour ne citer qu’eux.

Il est donc grand temps de prendre la vraie mesure des nouvelles réalités du terrorisme global.

Il est temps d’adopter une grille de lecture cohérente des attentats de ces dernières années, qui dépassent très largement la Méditerranée : Paris en 1995, Madrid en 2004, Londres en 2005, Marrakech en 2011, les assassinats perpétrés par Mohamed Merah en 2012, la prise d’otages à In Amenas en Algérie en janvier dernier, la tuerie de Bruxelles, il y a quatre mois, sans oublier les soldats algériens tués en Kabylie au mois de juin dernier.

La litanie de ces macabres événements démontre que nous avons franchi un cap. L’Europe comme territoire est tout entière concernée. Chaque ressortissant européen à l’étranger est devenu une cible potentielle. L’enlèvement de notre compatriote, auquel nous pensons tous aujourd’hui, en est, hélas, l’illustration la plus récente...

L’augmentation du nombre d’enlèvements est proportionnelle à la cruauté de ceux qui disent agir au nom du djihad. Il n’y a pas de mots assez durs pour qualifier la terrible mise en scène des décapitations de journalistes, d’humanitaires, de civils.

Aujourd’hui, les responsables politiques doivent faire face à une double menace : la surenchère de mouvances terroristes plurielles ; l’embrigadement via internet d’individus rêvant de « faire leurs classes », si je puis utiliser cette expression, dans des camps d’entraînement au Pakistan, au Yémen ou en Syrie.

Les cartes ont changé. Il ne s’agit plus seulement de nébuleuses clairement identifiables telles Al-Qaïda ou AQMI au Sahel. Il y a désormais l’émergence de sectes comme Boko Haram en Afrique de l’Ouest. Et aujourd’hui, nous sommes face à Daech, dont les ramifications se situent en Syrie – j’y reviendrai.

Plus grave, ces organisations sectaires se voient talonnées par d’autres réseaux, tout aussi criminels et organisés. Ces derniers trouvent des soutiens opportunistes, au sein de telle ou telle tribu ou de telle ou telle communauté.

Depuis la mort de Ben Laden, ces groupuscules sont en rivalité permanente. Ils sont en quête de reconnaissance sur la scène internationale. Tous considèrent que leur barbarie est un gage de leur crédibilité politique et tous jouent de leur médiatisation.

Toutefois, je veux rappeler ici que le fléau du terrorisme, quelle que soit l’appartenance de ses acteurs, trouve ses origines d’abord dans la déliquescence des structures étatiques. Si ces factions contrôlent des régions entières du monde, c’est parce que des États se sont effondrés. Nous l’avons vu au Mali. Ces structures sont à la tête de trafics de drogues, d’armes et d’êtres humains qui ne connaissent pas de frontières.

Pour l’Irak, il faut comprendre et se souvenir que les Irakiens n’ont jamais cessé, depuis dix ans, de vivre sous la terreur. Combien d’attentats, combien de morts à Bagdad depuis 2003 ? Le retrait des troupes américaines n’a strictement rien changé.

Il faut le dire clairement : l’État islamique d’Irak et du Levant est né des cendres de la deuxième guerre d’Irak – la communauté internationale s’est détournée de ce pays – tout comme les membres de Daech sont légitimés par les trois années de guerre en Syrie, où Bachar Al-Assad continue de sacrifier la population, alors même que, il y a quelques années, lui-même n’avait pas combattu ces terroristes avec autant d’énergie

Il y a un an, dans ce même hémicycle, il était question d’intervenir en Syrie contre un dictateur usant d’armes chimiques contre son peuple. Aujourd’hui, force est de constater que la France doit combattre le même ennemi que Bachar Al-Assad...

Dans cette redistribution géopolitique totale au Moyen-Orient, ni les interventions de la France ni celles des États-Unis ou des Britanniques n’aboutiront sans une clarification des positions des puissances régionales.

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