Intervention de Ronan Dantec

Réunion du 28 octobre 2014 à 16h15
Réforme territoriale — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Ronan DantecRonan Dantec :

Il y a un problème de méthode. Reconnaissons donc l’intérêt du débat de ce jour pour essayer d’y voir plus clair.

J’insiste tout d’abord – cette remarque a déjà été formulée – sur l’ordre de présentation des projets de loi. Si l’on peut comprendre – ne soyons pas caricaturaux – quelques urgences liées aux contraintes constitutionnelles du calendrier électoral, il n’en paraît pas moins évident qu’annoncer un aussi vaste redécoupage des régions françaises avant d’avoir précisé les compétences n’a guère contribué à la clarté du débat.

Si je prends l’exemple que je connais le mieux, celui du redécoupage de l’ouest, le statu quo défendu par nombre de grands élus des deux régions, plus par calculs électoraux de court terme et patriotisme d’organisation que par vision d’avenir, n’aurait peut-être pas résisté à la prise de conscience collective des nouvelles logiques de planification inscrites dans la future loi que présentera Marylise Lebranchu. On peut s’interroger…

Les élus régionaux de ces deux régions administratives, Bretagne et Pays de la Loire, auraient-ils pu continuer à soutenir un statu quo, indéfendable sur le fond, s’ils avaient dû expliquer aux citoyens que, demain, un schéma prescripteur régional d’aménagement du territoire ne chapeautera même pas l’axe majeur d’aménagement de l’ouest – l’axe Rennes-Nantes –, lequel va se retrouver tronçonné entre deux schémas prescriptifs différents ?

L’incohérence devait alors sauter aux yeux et l’immobilisme, qui a trouvé dans l’ouest tant de défenseurs au sein de ces deux régions, s’en serait peut-être trouvé ébranlé.

J’en viens à la question qui va nous occuper pendant deux ou trois jours, celle de la bonne carte pour la France du XXIe siècle. Je crois, monsieur le Premier ministre, avoir compris votre logique : une France reconstruite autour de grandes aires urbaines censées entraîner l’ensemble de leur territoire. Une grande région pour Bordeaux, Toulouse, Lyon, Marseille ou Lille ; une armature urbaine pour la Normandie ou l’est de la France. Cette position peut se concevoir, être défendue, mais la démonstration aurait gagné en clarté si vous nous aviez expliqué précisément comment la richesse sera redistribuée entre Toulouse et Foix ou entre Lyon et Aurillac.

L’absence de définition des mécanismes de solidarité territoriale interne autour de ces grandes régions nuit probablement à la démonstration et réduit l’adhésion à cette réforme de territoires qui se sentent aujourd’hui faibles et excentrés. Nous avons toutefois encore le temps de retravailler sur ces mécanismes de solidarité dans le cadre de la discussion de la future loi Lebranchu. Il s’agit de l’un des socles d’une réforme réussie.

Cette réforme n’a également de sens que dans la construction d’un « vouloir vivre ensemble » clairement exprimé. Plus de deux siècles après la création des départements, plus de soixante ans après celle des circonscriptions d’action régionale, quelle grande opportunité que l’élaboration d’une nouvelle carte à l’image de la France d’aujourd’hui !

Malheureusement, monsieur le Premier ministre, vous avez refusé d’aller au bout de la logique que vous aviez pourtant mise en œuvre. En limitant la réforme à l’alternative entre fusion de régions ou statu quo, vous avez raté l’occasion d’une carte partagée, comprise et largement défendue.

Le sujet passionne pourtant les territoires : il a fait descendre des dizaines de milliers de personnes dans les rues, à Nantes ou à Strasbourg, et fait la une des journaux régionaux. Pourquoi ne pas avoir organisé un plus grand débat public, avec vote des assemblées concernées autour de différents scénarios, voire des consultations populaires, là où il n’y avait pas consensus ?

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