Intervention de Françoise Gatel

Réunion du 10 novembre 2014 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel :

Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, je suis honorée que ma première intervention dans cet hémicycle porte sur un texte aussi important que le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cependant, mon enthousiasme est largement tempéré par les constats qui s’imposent.

Avant toute chose, je tiens à remercier notre président et nos rapporteurs pour l’excellence de leur travail. Au nom du groupe UDI-UC, je me concentrerai sur les équilibres généraux du texte et les perspectives qu’il ouvre. Puis, ma collègue Élisabeth Doineau présentera la position de notre groupe sur les différentes mesures.

En ce qui concerne les soldes consolidés, le moins que l’on puisse dire est qu’ils sont inquiétants, car ce projet de loi confirme l’enrayement de la dynamique de réduction des déficits sociaux.

Depuis 2008, d’importants efforts ont été consentis pour les résorber. Toutefois, ils représentent encore un montant vertigineux de plus de 15 milliards d’euros.

Surtout, depuis 2013, la dynamique vertueuse s’est essoufflée, puisque la résorption du déficit a quasiment stagné entre 2013 et 2014. Il risque fort d’en être de même entre 2014 et 2015 au vu des hypothèses macroéconomiques optimistes retenues.

Le Gouvernement mise sur une croissance de 1 % du PIB et de 2 % de la masse salariale en 2015 alors que celle-ci a été de 1, 6 % en 2014. Chacun le sait, la masse salariale est une variable-clé, car c’est sur elle que sont assises les cotisations sociales qui représentent encore plus des deux tiers du financement de la protection sociale.

Une véritable incertitude plane donc sur les recettes de la sécurité sociale.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit pas d’augmentation de recettes. La recherche de l’équilibre passe uniquement par des diminutions de dépenses. Cela mérite d’être salué, à condition que ces diminutions soient réellement au rendez-vous, ce qui, hélas ! ne semble pas être le cas.

Toute la stratégie budgétaire du Gouvernement repose sur une réduction de dépenses de 9, 6 milliards d’euros pour la protection sociale dès 2015. Or M. le rapporteur général l’a très bien exposé, le présent projet de loi ne permet de retracer qu’une partie de cette somme.

Madame la ministre, où sont donc passés les milliards d’euros manquants ? Cette question n’a pas reçu de réponse à l’Assemblée nationale. Je ne doute pas que vous aurez à cœur de nous en donner une au Sénat.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale présente donc des recettes incertaines et un plan d’économies incomplet : autant dire que des doutes s’imposent sur sa sincérité et sa contribution au retour à l’équilibre des comptes sociaux.

Certes, la situation est difficile. Le remède ne peut être un claquement de doigts. La gravité de la situation impose à tous courage et lucidité, qualités dont ce texte ne peut se prévaloir. En effet, il faut avouer, pour utiliser une métaphore maritime d’actualité avec l’arrivée de la Route du Rhum, qu’avec ce projet de loi financement de la sécurité sociale, vous écopez, vous colmatez, mais le navire poursuit sa dérive. Il faut le renflouer durablement et retrouver le cap de l’équilibre ! La navigation à vue n’a jamais constitué une politique.

Ce projet délaisse les sujets majeurs qui inquiètent profondément les élus locaux et nos concitoyens – les déserts médicaux, la permanence des soins. Il fragilise la politique familiale, véritable réussite de notre pays qui a permis une démographie dynamique, un taux d’emploi significatif des femmes.

Il l’affaiblit par la réforme du congé parental, décidée sous le prétexte fallacieux de l’égalité entre les femmes et les hommes. Or cette réforme retirera la liberté aux familles, et ignore la réalité et la diversité de la vie professionnelle.

Il la fragilise de façon inéquitable par la réforme des allocations familiales alors qu’il existe dans la fonction publique un supplément familial dont la modulation n’a jamais été évoquée.

Vous n’affrontez pas les vrais gisements équitables d’économie, comme le rétablissement du jour de carence dans la fonction publique.

Vous éludez le lancinant problème du financement des retraites, première dépense sociale de notre pays, largement évoqué par M. le rapporteur Gérard Roche.

Vous annoncez, et en soi c’est une bonne nouvelle, la création de places de crèches supplémentaires alors que nos collectivités locales, soumises à une véritable disette budgétaire, ne pourront assurer leur part du coût de fonctionnement de ces structures.

Pour conclure, l’objectif de retour à l’équilibre des comptes sociaux semble renvoyé sine die. Nous aurions souhaité, parce que l’état du pays le nécessite, plus de réalisme, de courage et d’ambition. Nous ne pouvons que constater, avec regret, que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est incertain et reste, sur de nombreux points, comme l’a souligné M. le rapporteur général, très en deçà des mesures qu’exige la gravité de la situation.

En ce sens, je ne peux que souhaiter, madame la ministre, une écoute extrêmement attentive de votre part aux amendements que présenteront la commission et les membres du groupe UDI-UC.

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